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Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 29 novembre 2011 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoland Muzeau :

La faute à la crise, ne cessez-vous de répéter. Mais, selon la Cour des comptes, seul un tiers des déficits sociaux est imputable à cette dernière. En réalité, ce sont surtout vos choix irréalistes et irresponsables, votre incurie et votre incapacité à lutter contre le chômage qui sont en cause.

S'agissant des cadrages macroéconomiques, vous avez fait preuve d'une telle légèreté qu'au cours de l'examen du projet de loi, vous avez été contraints de ramener votre hypothèse de croissance du PIB à 1 % et de réviser à 3 % le taux d'augmentation de la masse salariale. Des prévisions plus mauvaises encore sont annoncées par l'OCDE et augurent un nouveau train de mesures que vous n'osez même pas assumer aujourd'hui. À peine voté, le présent texte pourrait bien être déjà caduc.

Et que dire de votre refus coupable de vous attaquer au manque structurel de ressources dont souffre la protection sociale ? Avec constance, vous avez épargné aux plus hauts revenus et aux revenus du capital une contribution renforcée au financement de la protection sociale. Au contraire, vous avez multiplié les niches fiscales et sociales, les dispositifs d'exonérations de cotisations sociales, dont le nombre a augmenté de plus de 45 % entre 2005 et 2010. Le coût pour la sécurité sociale est allé, lui aussi, croissant, puisque les allégements Fillon sur les bas salaires et les exonérations de cotisations sociales représentent plus de 30 milliards. Le dispositif TEPA a coûté, à lui seul, 15 milliards d'euros, depuis 2007 et le coût des exemptions d'assiettes est estimé à 44,8 milliards.

En adoptant, en première lecture, un texte profondément remanié, les sénateurs ont fait la preuve qu'il était non seulement nécessaire mais aussi possible de pallier le sous-financement de la protection sociale. Ils ont fait preuve d'esprit de justice et de responsabilité, en majorant le forfait social et le prélèvement social sur les revenus du patrimoine, en augmentant la contribution sur les stock-options et les retraites chapeaux et en instituant une contribution sur les bonus des traders, ces rémunérations scandaleusement hors du commun auxquelles le Président de la République voulait mettre un terme en 2008, mais qui, dès 2010, avaient retrouvé leur niveau d'avant la crise.

Las, vous vous êtes entêtés à défaire méthodiquement les apports du Sénat concernant la recherche de recettes nouvelles, que vous avez qualifiées d'irréalistes, alors même que l'Inspection générale des finances, le Conseil des prélèvements obligatoires ou la Cour des comptes contestent l'efficacité, eu égard à leur coût, de certaines niches sociales et appellent au recentrage des exonérations de cotisations sociales patronales.

Résultat : dans le cadre étroit qui est le vôtre, c'est des mêmes que vous attendez tous les efforts, tout en sachant que ceux-ci ne suffiront pas à garantir la pérennité du système de protection sociale et en étant conscients des risques qui pèsent sur l'accès aux soins des populations et des menaces pour l'hôpital public, « usine à soins » en réanimation, pour reprendre l'expression du sociologue Frédéric Pierru.

Les assurés sociaux malades, et coupables de l'être, verront répercuté sur leur contrat complémentaire santé le coût de la taxation des mutuelles, soit 1,1 milliard. Et la menace d'une économie de 200 millions d'euros d'économies pèse toujours sur les salariés, dont les arrêts maladie seraient abusifs. Les malades, les personnes âgées dépendantes et les personnels hospitaliers paieront cash les 2,7 milliards d'euros d'économies réalisées sur l'ONDAM. Les foyers bénéficiant de l'allocation logement et les familles allocataires de prestations familiales verront leur pouvoir d'achat baisser suite à la mesure de gel dont vous attendez 500 millions d'euros d'économies. Quant aux futurs retraités, ils sont mis devant le fait accompli : la réforme, qui est déjà la plus sévère d'Europe, est encore durcie. Alors qu'en Allemagne, l'âge de départ à la retraite est repoussé au rythme de deux mois par an, vous optez, non plus pour quatre mois, mais pour cinq mois par an.

Nous affirmons aujourd'hui notre opposition résolue à ces mesures de rigueur injustes et aveugles que vous avez ajoutées au budget de la sécurité sociale. Nous voterons donc contre ce texte irresponsable qui ne garantit pas l'avenir de notre système solidaire et pèse lourd sur la santé et le pouvoir d'achat de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

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