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Intervention de Lionel Tardy

Réunion du 23 novembre 2011 à 21h45
Rémunération pour la copie privée — Article 4, amendement 9

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLionel Tardy :

J'ai vraiment beaucoup de choses à dire tant je suis sidéré qu'un tel dispositif ait pu passer les différents filtres de l'élaboration d'un projet de loi.

Nous mettons en place un système dans lequel tout le monde paie, y compris dans le cas où la loi dit explicitement « que la redevance n'est pas due ». Quant à ceux qui auraient payé alors qu'ils ne devaient rien, ils bénéficient d'un système de remboursement d'une complexité telle que l'on peut penser qu'il est destiné à décourager les demandes. J'avoue que c'est très fort !

Monsieur le ministre, il va tout de même falloir lever plusieurs ambiguïtés. Comment peut-on prélever une somme quand la loi dit explicitement qu'elle n'est pas due ? J'ai beau chercher, je ne comprends pas. Comment réagiront les administrations, les collectivités locales et les PME ? Avez-vous demandé à vos services comment ils allaient gérer le problème ? Vous auriez un bel aperçu des difficultés auxquelles ces structures vont se heurter : elles ne sont pas armées pour remplir la paperasse administrative des conventions et des demandes de remboursement. Pour un grand nombre d'entre elles, les quelques dizaines d'euros en jeu ne vaudront pas la peine de se mobiliser ; elles laisseront tomber. Or le piège est précisément là : si pour une PME, le montant du remboursement est négligeable, l'addition de toutes ces petites sommes non réclamées – qui constituent ce que nous avons pu appeler « les arnaques au quotidien » dans la loi « consommation » – peut, au final, représenter un petit pactole.

Ce système ne doit pas être le moyen pour les ayants droit d'empocher des sommes qui ne leur sont pas dues. Je propose donc que les sommes non réclamées après deux ans soient reversées au budget de l'État, qui en a bien besoin.

J'attends également des réponses sur ce que je considère comme étant de vrais sujets.

Le premier concerne les remboursements en cas de non-répercussion, en totalité ou en partie, de la redevance pour copie privée sur l'utilisateur final. Je prends un exemple tout simple : l'achat en gros pour lequel le client final paie moins cher. Que se passe-t-il s'il demande le remboursement de la redevance pour copie privée ? Comment savoir si cette redevance a effectivement été répercutée ? On peut très bien envisager que, dans le cadre de négociations commerciales, le grossiste ou l'importateur ait choisi, plus ou moins volontairement, de ne pas la répercuter. Comment fait-on dans ce cas ?

La TVA constitue un deuxième angle mort. Sera-t-elle prélevée sur la redevance pour copie privée si les supports sont vendus à des personnes physiques pour un usage professionnel ou sur des personnes morales qui ne peuvent pas la récupérer ? À quel taux ? Pour quel remboursement ? Si l'étude d'impact soulève bien ce problème, elle n'apporte pas la moindre solution.

Le troisième sujet est celui de la grande complexité du dispositif. Il est prévu que les justificatifs à fournir seront fixés par voie réglementaire. Vous retardez ainsi la mise en oeuvre du texte, et vous instaurez des complications inutiles, comme seules les administrations savent en créer. Mieux vaudrait laisser les redevables libres de faire la preuve par tous moyens des sommes versées au titre de la redevance pour copie privée. Les litiges se régleraient ensuite devant les tribunaux. On gagnerait sans doute du temps. Je pense en effet que, malheureusement, un certain délai s'écoulera avant la sortie des décrets. De plus, une fois parus, ils seront attaqués devant le Conseil d'État qui risque de les annuler étant donné leur faible solidité juridique tant par rapport à la loi française qu'au regard du droit communautaire.

Une fois de plus, je ne comprends pas que l'on invente de telles usines à gaz alors qu'il est possible de faire simple et efficace. C'est un peu désespérant.

(L'amendement n° 9 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

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