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Intervention de Patrick Bloche

Réunion du 5 mai 2009 à 21h30
Protection de la création sur internet — Article 2, amendements 45 87

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche :

Madame la présidente, il existe encore deux groupes distincts dans l'opposition, le groupe SRC et le groupe GDR, et même si nous convergeons dans un même rejet de ce texte, vous me permettrez de soutenir cet amendement n° 87 , qui est essentiel à nos yeux.

L'exposé des motifs du projet de loi, qui justifie la démarche dissuasive et pédagogique dont on nous a fait la réclame pendant plusieurs dizaines d'heures, indique que la HADOPI « a vocation en pratique à se substituer aux poursuites pénales actuellement encourues par les internautes qui portent atteinte aux droits des créateurs ». Nous estimons pour notre part que la HADOPI n'a pas à connaître des faits pour lesquels la juridiction judiciaire a été antérieurement saisie. Nous nous situons dans une démarche assez simple à comprendre visant à ce qu'il n'y ait pas de cumul entre sanction pénale et sanction administrative, cumul que nous avons significativement dénommé « double peine ». On pourrait même parler de « triple peine » car cette nouvelle lecture a été l'occasion d'instaurer – originalité funeste – une sanction financière : au mépris de toutes les règles du droit de la consommation, l'internaute dont la connexion aura été coupée sera contraint de continuer à payer son abonnement.

Ajoutons que la CNIL a conclu qu'elle n'était « pas en mesure de s'assurer de la proportionnalité d'un tel dispositif dans la mesure où il laissera aux seules sociétés de perception et de répartition des droits d'auteur et organismes de défense professionnelle le choix de la politique répressive à appliquer, sur la base d'un fondement juridique dont les contours sont mal définis ». On se rend compte ici de l'inconvénient qui découle de l'absence d'évaluation de la loi DADVSI, qui n'a jamais été appliquée, et de votre refus d'en abroger les dispositions. Si vous n'aviez pas agi de la sorte, on aurait pu mettre de côté les sanctions pénales qui menacent désormais chaque internaute se livrant à des échanges de fichiers sans but lucratif.

Il importe également de rappeler la position de la Commission européenne, qui, dans le cadre de la procédure de la notification, a souligné le risque que « deux actions, l'une administrative, l'autre pénale, [soient] introduites en parallèle », « le cumul de moyens de mise en oeuvre [pouvant] donner lieu à plusieurs décisions différentes pour un même fait. »

De ce fait, l'amendement vise à éviter la double peine et à ne pas laisser au représentant des ayants droit le pouvoir exorbitant de choisir soit la saisine du juge pour contrefaçon, soit la saisine de la HADOPI pour manquement à l'obligation de surveillance de sa connexion à Internet.

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