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Intervention de Sébastien Huyghe

Réunion du 26 octobre 2011 à 16:
Commission élargie : commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Huyghe, président et rapporteur pour avis de la Commission des lois, pour l'administration pénitentiaire et la protection judicaire de la jeunesse :

Je vous prie d'excuser l'absence du président de la Commission des lois, qui ne peut être présent.

Je ne peux que me féliciter de l'évolution des crédits ouverts pour l'administration pénitentiaire et la protection judiciaire de la jeunesse dans le projet de loi de finances pour 2012. L'évolution des crédits amorcée depuis le début de la législature prouve que l'exécution des décisions de justice pénale est une priorité du Gouvernement et de la majorité parlementaire.

Les crédits de l'administration pénitentiaire augmentent de 44 % en autorisations d'engagement et de 7,4 % en crédits de paiement, afin de poursuivre l'agrandissement et la rénovation du parc immobilier, ainsi que la mise en oeuvre de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009. De même, les crédits de la protection judiciaire de la jeunesse augmentent de 4,6 % en autorisations d'engagement et de 2 % en crédits de paiement, ce qui permettra non seulement d'achever la reconcentration des moyens de la PJJ sur la prise en charge des mineurs faisant l'objet d'une mesure pénale, mais aussi d'ouvrir vingt centres éducatifs, afin d'appliquer la loi du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs.

Le Gouvernement a déposé un amendement visant à réduire les crédits de la mission « Justice » de 20 millions d'euros, imputés à parts égales entre les programmes « Justice judiciaire » et « Administration pénitentiaire ». La mesure s'inscrit dans le plan d'économies de 1 milliard annoncé fin août par le Premier ministre et dicté par la situation de nos finances publiques.

Pour ce qui concerne l'administration pénitentiaire, la baisse de 10 millions d'euros représente une diminution globale des crédits de 0,2 %. Si l'amendement est voté, la hausse des crédits passera de 44,1 % à 43,8 % en autorisations d'engagement et de 7,4 % à 7 % en crédits de paiement. La hausse restant importante, je ne suis pas défavorable à l'amendement.

J'émets cependant une réserve sur l'imputation de la réduction des crédits au sein du programme « Administration pénitentiaire ». La baisse s'imputerait à hauteur de 9,5 millions pour le programme immobilier et de 0,5 million pour l'École nationale d'administration pénitentiaire (ENAP). Il serait problématique que celle-ci voie diminuer de 1,8 % les crédits prévus pour 2012, alors que la formation tant initiale que continue revêt une importance particulière. Peut-on répartir la réduction des crédits d'une manière moins défavorable à l'ENAP ?

À cette réserve près, les crédits de l'administration pénitentiaire et de la PJJ prévus dans le PLF pour 2012 ne pouvant qu'être pleinement approuvés, je me contenterai de poser cinq questions sur les évolutions liées au fonctionnement et aux missions de ces deux acteurs essentiels du service public de la justice.

Commençons par l'administration pénitentiaire.

Depuis la fin de l'année 2010, un nouveau programme immobilier a été engagé pour prendre la suite du programme « 13 200 », dont les derniers établissements doivent être livrés en 2014 ou en 2015. L'objectif du nouveau programme, qui prévoit l'ouverture de vingt-sept établissements et la fermeture de trente-six autres devenus inadaptés, est de porter la capacité d'hébergement de nos établissements pénitentiaires à 70 000 places en 2017. Depuis, le chef de l'État a annoncé que le projet de loi de programmation pour l'exécution des peines, que nous examinerons sous peu, porterait la capacité du parc pénitentiaire à 80 000 places. Comment ce nouvel objectif se traduira-t-il sur le plan budgétaire ? Quel est le calendrier prévu ?

Fin 2010, il a été décidé de transférer progressivement la compétence des extractions judiciaires à l'administration pénitentiaire, ce qui doit s'accompagner du transfert de 800 emplois en trois ans de la mission « Sécurité » vers la mission « Justice ». Depuis le 1erseptembre, c'est-à-dire depuis presque deux mois, l'administration pénitentiaire assure les extractions judiciaires dans deux régions, l'Auvergne et la Lorraine. Pouvez-vous dresser un premier bilan ? Comment se passent sur le terrain les relations avec les forces de police et de gendarmerie lorsque l'administration pénitentiaire ne peut assurer des extractions par manque de moyens ou en raison du profil du détenu ? Enfin, le nombre de 800 emplois devant être transférés de l'administration pénitentiaire vers la mission « Sécurité », fixé par un arbitrage interministériel fin 2010, suffira-t-il pour que l'administration pénitentiaire assume sa charge dans de bonnes conditions sur l'ensemble du territoire ?

Troisièmement, début 2011, l'affaire de Pornic a révélé des difficultés concernant la continuité du suivi des personnes placées sous main de justice, notamment lors de la transition entre milieu fermé et milieu ouvert. Les travaux et déplacements que j'ai effectués pour préparer la discussion budgétaire m'ont permis de constater que, si des efforts réels ont été accomplis dans ce domaine, il faut encore résoudre des difficultés, notamment de communication entre les services de l'application des peines des tribunaux et les services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP). Quelles orientations le ministère a-t-il retenues pour améliorer la continuité du suivi des personnes placées sous main de justice ?

Les effectifs des SPIP, qui ont pourtant augmenté de 75 % depuis 2002, sont fréquemment invoqués pour expliquer qu'ils peinent à assurer le suivi des condamnés. Récemment, un rapport conjoint de l'Inspection générale des finances et de l'Inspection générale des services judiciaires vous a été remis sur leur organisation et leurs éventuels besoins en personnels. Quelles en sont les conclusions et quelles suites envisagez-vous de lui donner ?

J'en viens à la protection judiciaire de la jeunesse. La loi du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et la justice des mineurs a élargi les cas de placement sous contrôle judiciaire, donc les possibilités de placement en centre éducatif fermé (CEF) pour les mineurs de treize à seize ans. Afin de mettre ces dispositions en application, le Gouvernement prévoit de créer vingt CEF. Quel est l'impact budgétaire de cette mesure et quel est l'état d'avancement des travaux ?

Si tout le monde ou presque reconnaît le bien-fondé des principes qui fondent l'action éducative dans les CEF, on manque de données objectives sur leur efficacité en termes de prévention de la récidive et de réinsertion. Le ministère va-t-il effectuer un suivi régulier du devenir des jeunes qui sont passés par ces centres, ce qui permettrait de mesurer leur efficacité ?

Les personnels des CEF que j'ai rencontrés posent la question de l'« après-CEF ». Souvent, les professionnels de la PJJ, qui peinent à trouver pour les mineurs une solution adaptée, formulent des propositions dans l'urgence et par défaut. Pour remédier à cette difficulté, il serait souhaitable de construire pour les mineurs délinquants un parcours de prise en charge par la justice, fondé sur la progressivité, et élaboré conjointement par le juge des enfants et par les services de la PJJ. Dès l'audience, un mineur placé en CEF sous contrôle judiciaire serait informé par le magistrat que, si le placement se passe bien, on envisagera une mesure éducative comme un placement en foyer, suivi d'un retour dans la famille accompagné d'une mesure d'activité de jour. Un tel parcours – qui nécessiterait, non une mesure législative, mais seulement une volonté commune des magistrats et des services de la PJJ – améliorerait la lisibilité des mesures et anticiperait les transitions, souvent difficiles et insuffisamment préparées, entre les différentes structures. Que pensez-vous de cette proposition ?

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