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Intervention de Martine Faure

Réunion du 2 novembre 2011 à 9h30
Cessation de mandat et remplacement d'un député — Recherche et enseignement supérieur

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Faure, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l'éducation pour l'enseignement supérieur et la vie étudiante :

Monsieur le président, monsieur le ministre, ce budget serait, nous dit-on, la priorité budgétaire de l'État. La promesse d'augmenter d'un milliard par an les moyens de ce secteur n'est cependant pas tenue. Je ne m'engagerai pas dans la bataille des chiffres, mais le tableau comparatif figurant dans mon rapport est clair, d'autant plus clair, qu'il est issu de sources ministérielles et indique une baisse constante : 995 millions d'euros en 2010, 706 millions en 2011, 524 millions en 2012. Ce budget est donc moins généreux que ce qui est annoncé. J'ajouterai qu'il est n'est pas toujours très lisible, truffé qu'il est de tours de passe-passe. Quoi que vous en pensiez, je ne m'en tiens pas aux seuls crédits de fonctionnement.

Je rappelle que ce budget ne comporte pas que des crédits de paiement immédiatement consommables. Il repose aussi sur des autorisations d'engagement étalées sur plusieurs années et sur des montages complexes, comme les partenariats public-privé.

Vous insistez beaucoup sur les cinq milliards du plan « Campus » et les milliards du grand emprunt, mais il faut savoir que ces milliards restent souvent virtuels. Pour un site que je connais bien, celui de Bordeaux, lauréat aux initiatives d'excellences, ce sont moins de 30 millions par an qui seront versés ; ce n'est pas négligeable, mais il est bon de signaler que la région Aquitaine, quant à elle, verse tous les ans 32 millions.

Onze milliards vont aux investissements d'avenir et vous dites que nous devons faire émerger dix pôles d'excellence. Mais la France compte plus de quatre-vingts universités, réparties sur vingt-sept régions. Dans ces conditions, est-il légitime de sélectionner une poignée de ces universités pour leur donner moyens et notoriété, aux dépens des autres établissements de même nature ?

Au nom de l'« excellence » – tout est désormais « d'excellence », les pôles, les initiatives, les laboratoires –, bref, au nom de l'excellence, ce budget privilégie les uns et semble sacrifier les autres. Une telle concentration d'excellence marginalise de nombreuses universités qui se débattent dans d'énormes difficultés. La loi LRU, qui a donné aux universités une autonomie salariale et financière, en est l'une des causes.

Pour accéder à l'autonomie salariale, il a fallu stabiliser les directions des ressources humaines et les directions des affaires financières. Trop souvent, les universités ont dû faire des sacrifices, au point que certaines ont beaucoup de peine à boucler leur budget et sont obligées de geler des postes, y compris d'enseignants.

Un mot encore sur l'une de vos priorités : les « campus de demain ». Vous parlez de salles de réunions interactives, de centre e-learning, de bibliothèques de haut niveau. Or, à la ligne investissement pédagogique, on lit simplement : 150 millions d'euros. On pourrait s'en réjouir, mais une lecture attentive des détails montre qu'il pourrait s'agir de 50 millions seulement la première année, puis de 100 millions répartis sur huit ans, selon la direction générale de l'enseignement supérieur elle-même.

J'en viens au plan pluriannuel pour la réussite en licence. Je rappellerai que le cursus de licence a, en 2010, accueilli 750 000 étudiants, hors IUT. Couvrant les années 2008-2012, ce plan appuie les initiatives des universités autour de cinq axes, dont l'orientation des nouveaux étudiants et le renforcement de l'encadrement pédagogique.

Mais quel bilan peut-on tirer de toutes ces grandes déclarations ? Si le plan a eu, incontestablement, un effet « déclencheur », la mobilisation, loin d'être totale, est en réalité disparate et souvent décevante. Dans certains établissements, elle s'est traduite par la simple réactivation de mesures déjà mises en oeuvre, dans d'autres on constate une extrême dispersion faute de vision globale de la stratégie à mener. Trop souvent, les mesures adoptées ne sont ni suivies, ni évaluées.

Par ailleurs, le plan n'a pas permis d'enclencher la révolution pédagogique attendue. La pédagogie de projet, la plus susceptible de motiver les étudiants, occupe, contrairement à ce qui se pratique au lycée, une place qui reste marginale. Si l'effort financier que représente le plan est de 730 millions sur cinq ans, il doit être relativisé, la progression des moyens dans l'enseignement supérieur restant concentrée sur les autres filières, en particulier celle du master. Or le développement des volumes horaires d'enseignement, la réduction de la taille des groupes et le recours aux enseignants référents ont un coût qui rend problématique le « modèle économique » du plan pour la réussite en licence.

À ce contexte budgétaire défavorable s'ajoutent des contraintes techniques. En effet, les crédits du plan sont fléchés tandis que le budget des établissements ayant accédé aux compétences élargies de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, lui, est global.

Pour faire du plan une réussite, il faudrait donc changer d'échelle et agir sur plusieurs leviers tout en écartant les fausses bonnes idées. Mais je crois, monsieur le président, que je ne dispose plus de suffisamment de temps pour développer cet aspect.

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