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Intervention de Xavier Bertrand

Réunion du 27 septembre 2011 à 15h00
Renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé — Discussion après engagement de la procédure accélérée d'un projet de loi

Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé :

Cela veut dire que, en matière d'emploi, les entreprises pharmaceutiques joueront leur rôle. La décrue du nombre de visiteurs médicaux ne date d'ailleurs pas d'aujourd'hui : elle est liée aux fusions de grands groupes pharmaceutiques et aux effets de ce qui a été entrepris depuis 2004.

Si l'on veut aller plus loin, comme je le pense nécessaire, nous aurons à traiter de la question de l'emploi, mais, à cette tribune, je parle en tant que ministre de la santé. Et, en tant que ministre de l'emploi, je serais attentif à ce que les laboratoires assument complètement leurs obligations à l'égard de leurs salariés qui seraient reclassés.

Avec ce texte, nous lançons une expérience pilote de visite médicale collective à l'hôpital. J'avais le sentiment que nous étions en retrait par rapport aux préconisations de l'IGAS, qui, il faut le dire, n'avaient pas manqué de surprendre un certain nombre d'acteurs. Seule la Suède aurait complètement supprimé la visite médicale, mais, à bien y regarder, les choses n'y sont pas aussi simples.

J'avais donc le sentiment d'être en retrait : or on me dit maintenant que je vais trop loin. Si nous commençons par l'hôpital, c'est parce que c'est bien souvent lui qui donne la tendance de la prescription. Tant qu'il n'existe pas davantage de maisons de santé pluridisciplinaires, il est plus simple de se situer dans le cadre collectif de l'hôpital, plutôt qu'au sein d'un cabinet médical. Cela justifie en tout cas l'expérience pilote. Je sais aussi qu'il sera plus facile de le faire dans un CHU que dans un hôpital local de proximité. Il me semble néanmoins que cette voie est celle de l'équilibre, et j'assume ce choix.

Je souhaite enfin aborder un point qui n'est pas le moins important : le pilotage de la politique du médicament. Lorsqu'un ministre déclare qu'il n'était pas au courant, soit on ne le croit pas, soit on le juge inefficace. Je me souviens des propos tenus, notamment, par Bernard Debré, et je partage ce point de vue. En vérité, après l'affaire du sang contaminé, nous avons tous eu fortement tendance à considérer que, puisque les responsabilités étaient si proches du politique, puisque l'on remontait si haut dans la sphère politique, il fallait en confier davantage aux experts. Je pense toutefois que la responsabilité politique ne se délègue pas et ne se partage pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

C'est pourquoi la création d'un comité stratégique de la politique des produits de santé et de la sécurité sanitaire s'impose. Il se réunira chaque semaine en comité opérationnel avec un représentant du ministre – et non du ministère –, et, tous les trimestres, en comité stratégique sous la présidence du ministre lui-même. Toutes les agences et directions de l'administration centrale concernées seront parties prenantes, tous les sujets d'actualité seront traités. La liste des médicaments sous surveillance devra être étudiée en détail. Ainsi, nul ne pourra prétendre qu'il ignorait que tel ou tel médicament était sous surveillance. Il reviendra ensuite à chacun de prendre ses responsabilités, mais nous sommes à une époque où, lorsqu'on en exerce, on ne peut pas ne pas vouloir les assumer à mille pour cent.

Il s'agit d'une réforme d'ampleur, et nous serons particulièrement attentifs, Nora Berra et moi-même, à sa mise en oeuvre effective. Mais, comme j'ai également un peu d'expérience et comme il n'y a pas qu'un domaine législatif, je vais vous faire une proposition qui, j'en ai conscience, est un peu iconoclaste. Je voudrais que, d'ici à deux ou trois ans – nous fixerons ces modalités ensemble –, soit d'ores et déjà prévue une évaluation profonde et complète de la réforme. Ce terrain est nouveau et nous mettons en place des bases totalement nouvelles : il nous faudra voir si nous avons atteint nos objectifs, s'il existe des difficultés de fonctionnement, si l'Agence du médicament dispose vraiment de tous les moyens nécessaires, grâce à une bonne gestion. Ce texte n'est pas comme les autres. Il concerne avant tout la santé de nos concitoyens dans un contexte particulier : le drame du Mediator.

Certes, le gouvernement qui présente ce projet de loi a des convictions et même une image politique, mais je ne suis pas sûr que le texte lui-même ait une coloration politique. Si l'on me dit qu'il convient d'aller plus loin sur certains points et de faire encore des efforts, je veux bien les faire, quels que soient les bancs sur lesquels siègent ceux qui le demandent. Mme Lemorton l'a dit, Arnaud Robinet demande également que des avancées soient réalisées sur ce texte, MM. Jean-Pierre Door, Guy Lefrand ou Bernard Debré aussi qui ont toujours été très en avance sur ces questions-là. Je suis prêt à ce que l'on ait un vrai débat à l'Assemblée nationale. Il ne s'agit pas d'un texte fermé.

J'ai entendu les remarques. Certains parlementaires ont peur qu'on ne les associe pas à la rédaction d'un décret qui doit apporter bien des précisions et dans lequel il risque d'en manquer beaucoup. Ils craignent que ce décret comporte des interstices dans lesquelles tel ou tel acteur risquerait de s'engouffrer. Je suis prêt à apporter des garanties supplémentaires à cet égard.

J'ignore quelle sera la teneur des interventions, je ne sais pas si les textes ont été préparés à l'avance, mais je vous demande d'intégrer ce que je viens de dire et de bien voir que nous voulons faire le mieux possible, tout simplement parce que nous le devons aux Français qui exigent la sécurité de produits qu'ils consomment tous les jours, mais aussi parce que, en France, nous nous situons dans un contexte particulier, parce que nous considérons qu'il doit y avoir un avant et un après Mediator.

J'ai conscience des efforts que l'on demande à l'industrie pharmaceutique. Ils sont certes importants, mais aussi réalistes et indispensables pour garantir à la fois la sécurité de tous les patients et permettre l'indispensable accès à l'innovation thérapeutique.

À la fin de mon intervention, je voudrais, au-delà des nombreux parlementaires que j'ai évoqués, citer trois médecins à qui nous devons des révélations sur ce sujet. Le premier, le Dr Chiche, a d'abord parlé dans le désert. Ce n'était pas sa faute, loin s'en faut ! Je pense également au Dr Gérard Bapt, qui a fait preuve de beaucoup d'engagement, et au Dr Irène Frachon. Je pense aussi aux victimes du Mediator et à tous les Français qui, en prenant leurs médicaments, se demandent s'ils peuvent avoir ou non confiance. Je veux que la réponse à leur question soit positive. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

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