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Intervention de Marietta Karamanli

Réunion du 29 septembre 2011 à 9h30
Protection des consommateurs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarietta Karamanli :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, une fois encore, notre assemblée débat des droits du consommateur et de leur protection puisque, sous cette législature, c'est la cinquième loi qui traite, à titre principal, de ce sujet.

Nous nous trouvons face à un projet de loi qui pèche d'abord par ce qu'il évite soigneusement de traiter. Je prendrai quatre exemples.

Premier exemple : nous constatons, comme le soulignait Annick Le Loch, l'absence de toute disposition concernant l'action de groupe, procédure civile qui permet à des personnes victimes de dommages nés du fait ou de la faute de professionnels de se regrouper en vue d'être indemnisées. De nombreux pays européens ont d'ores et déjà adopté de telles procédures collectives. En juillet 2007, le Président de la République lui-même écrivait à sa ministre de l'économie que devait être créée « une action de groupe à la française ». Ce projet de loi était certainement la dernière opportunité de la créer d'ici à la fin de la législature. Dans la tragique affaire du Mediator, une telle action aurait été de nature à faciliter les demandes des victimes. Il s'agit bien là de la disparition d'une ambition présidentielle !

Deuxième exemple : le projet de loi entend protéger ponctuellement les patients mais ne prévoit rien pour améliorer l'information sur l'alimentation. On aurait pu attendre du Gouvernement qu'il prenne plusieurs mesures visant à une meilleure information des consommateurs, notamment dans le domaine de l'alimentation.

Je me contenterai de citer un cas où l'information des consommateurs vaut protection de la santé publique. Plusieurs centaines de produits alimentaires vendus portent la mention « light », « allégé » ou encore « à faible teneur en ». Ces mentions correspondent en fait à des produits de l'industrie agroalimentaire dont l'apport en calories est réduit d'environ 25 % par rapport aux produits habituels ou de référence. En fait, ils ne sont souvent pas moins caloriques que ne le sont les préparations ou aliments conventionnels, du fait de l'ajout d'ingrédients supplémentaires. Ceux-ci vont, par exemple, diminuer l'apport en lipides conformément à l'annonce faite du caractère allégé mais augmenter la teneur en glucides. Par ailleurs, ces produits sont souvent plus chers. Une information claire et loyale des consommateurs est donc nécessaire. Ainsi, ce projet de loi qui vise à améliorer l'information des consommateurs aurait dû avoir l'ambition de mieux les protéger.

Troisième exemple : le texte élude la question essentielle du pouvoir d'achat des consommateurs. Aucune mesure ne concerne l'encadrement des loyers dans les zones où il y a de la spéculation. Aucun dispositif ne vise à limiter l'augmentation des prix des produits alimentaires. Or, on le sait, les prix des produits bruts ou peu transformés vendus dans la grande distribution sont fixés sans lien avec le revenu des producteurs et les coûts de la distribution.

Une mesure simple consistant à calculer un prix de vente maximal en multipliant le prix d'achat par un coefficient défini conjointement avec les professionnels, sur la base de l'historique hors période de crise, serait de nature à contenir une inflation qui n'a pour origine, pour certains produits, que la spéculation des vendeurs.

Dans le même ordre d'idées, ce projet ne traite pas au fond de la dépense contrainte que constituent aujourd'hui pour les familles les contrats de téléphonie mobile avec des engagements d'une durée excessive de vingt-quatre mois. Il ne prévoit rien contre l'obscurité des règles d'usage imposées par les opérateurs.

Quatrième exemple – et j'en termine, madame la présidente – : quand le projet réalise une avancée, elle reste marginale.

Je prendrai le cas du durcissement des règles applicables aux ventes à distance. À l'article 8, qui modifie l'article L. 121-19 du code de la consommation, est notamment rendue obligatoire une information complémentaire sur les limites du droit de rétractation. Sur ce seul point, le projet aurait pu aller plus loin.

L'Union européenne– j'ai eu l'occasion de le montrer dans un rapport que j'ai fait au nom de la commission des affaires européennes – s'apprête à renforcer l'information du consommateur sur le droit de rétraction dans toutes les situations, à savoir sur la faculté d'en faire usage lorsqu'il s'applique comme sur l'absence de ce droit lorsqu'il ne s'applique pas ; à rendre obligatoire un avis d'information standardisé accompagnant le droit de rétractation pour éclairer le mieux possible le consommateur dans ses choix ; à proposer un formulaire type de rétractation de manière à aider le consommateur ; à instaurer un délai unique et harmonisé de quatorze jours et non plus de sept jours comme la loi française le maintient.

Ce projet apparaît donc en retrait par rapport aux ambitions affichées au début de la législature, en décalage avec certaines grandes priorités de la protection des consommateurs, en apesanteur par rapport à la question centrale du pouvoir d'achat et en repli face à certaines propositions en préparation dans l'Union européenne.

Je conclurai en disant qu'il s'agit d'un projet qui est à côté des enjeux de la protection du consommateur. Les députés socialistes, radicaux et citoyens ne peuvent que le regretter. Nous espérons toutefois pouvoir contribuer à son amélioration dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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