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Intervention de Dominique Souchet

Réunion du 29 septembre 2011 à 9h30
Protection des consommateurs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Souchet :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ce projet de loi est le sixième dédié aux questions relatives à la consommation et aux droits des consommateurs depuis 2005. Certains pourraient y voir le signe d'une inflation législative préoccupante. J'y vois au contraire la preuve que la majorité accorde une importance capitale à cette dimension essentielle de notre économie. La consommation est traditionnellement un secteur clé pour l'économie française. Il est donc essentiel de la soutenir pour conserver cet atout et le renforcer.

Les ajustements législatifs et réglementaires sont d'autant plus nécessaires que les modes de consommation des Français évoluent sans cesse, en raison notamment du développement de nouveaux modes de vie et de nouvelles technologies. Les consommateurs attendent que le législateur soit réactif face aux nouvelles difficultés qu'ils sont amenés à rencontrer. Il est donc de notre responsabilité de poursuivre l'adaptation de notre droit de la consommation dans tous les domaines.

De ce point de vue, le texte qui nous est proposé comporte un certain nombre de mesures positives.

Plusieurs d'entre elles, et c'est important de le souligner, vont bénéficier très directement aux personnes les plus modestes. Je pense en particulier au tarif social pour l'accès à l'internet haut débit ou au renforcement des garanties pour les locataires.

Dans le domaine de l'énergie également, l'offre de conseils tarifaires personnalisés par les fournisseurs et la possibilité de suspendre le paiement de l'abonnement en cas de litige vont jouer un rôle de bouclier protecteur face au risque d'érosion du pouvoir d'achat.

C'est aussi un projet de loi qui va répondre à des attentes très concrètes de la vie quotidienne, à travers notamment la possibilité plus largement offerte au consommateur de vérifier l'état des produits livrés, ou encore le renforcement de la protection des données personnelles.

Nous devons accorder une attention toute particulière au secteur de la vente à distance, afin de tenir compte de la progression très importante du commerce en ligne au cours de ces dernières années. Son chiffre d'affaires global a atteint 31 milliards d'euros en 2010 et 58 % des Français ont passé au moins une commande en ligne l'année dernière.

Pourtant, une étude du CREDOC montre que 40 % des sites de vente en ligne présentent des dysfonctionnements. Il reste donc beaucoup à faire dans ce domaine. Nous comptons sur votre vigilance, monsieur le secrétaire d'État, pour renforcer encore davantage les contrôles engagés par les services de la répression des fraudes et débusquer les tromperies sur les prix de référence, les majorations artificielles des taux de promotion et les soldes déguisés.

Enfin la mise en place d'un label de type AOC pour les produits manufacturés me semble tout à fait innovante. Dans le contexte de concurrence mondiale acharnée que nous connaissons, comment ne pas souhaiter que cette initiative trouve un écho au niveau européen pour contribuer à protéger, légitimement, les produits fabriqués au sein de notre marché commun ?

Le fait de mentionner une indication géographique de provenance des produits industriels, afin de lutter notamment contre la contrefaçon et de protéger les savoir-faire est un premier pas extrêmement positif. Les appellations protégées contribuent aussi à relever le défi permanent de la qualité et à développer des emplois non délocalisables.

Si le projet de loi vise juste, certains éléments méritent cependant d'être complétés.

Je pense, en premier lieu, à un renforcement de l'Observatoire des prix et des marges qui, pour l'instant, a peut-être évité une flambée du prix de certains produits, mais n'a pas, jusqu'ici, permis d'aboutir à une réelle baisse des prix à la consommation dans leur ensemble, contrairement à son objectif initial.

En ce qui concerne les abonnements téléphoniques, ensuite, pourquoi ne pas aller plus loin et prévoir un plafonnement à douze mois des engagements d'abonnement ? Il s'agit là d'une durée raisonnable, qui donnerait plus de liberté au consommateur sans mettre en péril la viabilité de l'activité des fournisseurs. J'espère que nous aurons une discussion sur ce point lorsque nous débattrons des amendements que j'ai déposés avec plusieurs de mes collègues et qui prévoient notamment de donner la possibilité au consommateur de faire évoluer le contrat en fonction de ses besoins pendant la durée de son engagement.

De même, il me semble important de garantir la liberté du consommateur quant à l'usage de certains services pris en charge par les assurances. De nombreux professionnels nous ont fait part de l'inquiétude que suscite le fait que la souscription d'une assurance peut dessaisir le consommateur de toute possibilité de choix concernant par exemple son carrossier ou son prothésiste dentaire, ou encore son opticien. Si l'assureur peut proposer des réparateurs, il ne doit en aucun cas être en mesure d'imposer un choix au consommateur. C'est pourquoi il me semble important de garantir la liberté du consommateur de choisir le professionnel avec lequel il souhaite s'engager, quel que soit le domaine. Il s'agit non seulement de faire jouer la concurrence des prix pour protéger le pouvoir d'achat, mais aussi de respecter la relation de confiance qu'ont bien souvent les consommateurs avec tel artisan, tel commerçant, tel réparateur.

S'agissant enfin des produits de consommation courante et de première nécessité, j'ai apporté mon soutien à plusieurs amendements déposés par notre collègue Christian Estrosi, et je souhaite que nous puissions les adopter. Je pense en particulier au triple affichage pour les produits de première nécessité, qui comprendrait le prix d'achat au producteur, le prix de vente du distributeur, ainsi que le prix de vente au consommateur. C'est une mesure qui pourrait contribuer à enrayer la hausse des prix et qui rapprocherait les producteurs des consommateurs. De même, je soutiens totalement l'amendement qui vise à mentionner le pays de production et de transformation pour les produits alimentaires frais, en conserves et transformés, afin d'améliorer la transparence vis-à-vis des consommateurs et de valoriser nos territoires.

À travers l'ensemble de ces mesures concrètes, pragmatiques, renforçant la protection des consommateurs et de leur pouvoir d'achat, nous moderniserons notre économie et nous répondrons aux préoccupations quotidiennes de millions de Français. Ce projet de loi est donc tout à fait nécessaire.

Mais il ne doit pas nous faire perdre de vue l'essentiel : je pense à la réindustrialisation urgente de notre pays et au rééquilibrage indispensable de notre commerce extérieur.

Nous ne pourrons pas indéfiniment nous borner, sur ces chapitres, à répéter mécaniquement et paresseusement les formules idéologiques convenues de l'antiprotectionnisme. Notre effort pour protéger le pouvoir d'achat des consommateurs français restera vain s'il ne se double pas d'un effort parallèle, à l'échelle européenne, pour lutter contre les concurrences déloyales. Si nous laissons l'hémorragie des délocalisations se poursuivre, il n'y aura plus de pouvoir d'achat à protéger, parce qu'il n'y aura tout simplement plus de salaire. Mais si l'on s'attache à casser ce cercle vicieux, alors il sera beaucoup plus facile de mener à bien les réformes structurelles dont nous avons besoin et l'optimisme pourra revenir avec la croissance.

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