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Intervention de André Chassaigne

Réunion du 29 septembre 2011 à 9h30
Protection des consommateurs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ma première interrogation en découvrant ce projet de loi dédié aux consommateurs a porté sur son intérêt, sur son apport palpable dans le contexte actuel, dans le quotidien du peuple de France. Quelle est son utilité réelle, alors même que l'actualité est à l'envolée du chômage et de la pauvreté, au surendettement des ménages, au renforcement de la grande précarité ?

Qu'apporte-t-il concrètement pour les Françaises et les Français, alors même que la politique du Gouvernement a conduit à un véritable gel des bas salaires et à une diminution programmée des retraites, pourtant déjà inférieures au seuil de pauvreté pour plus d'un million de nos aînés ?

Ce projet de loi aborde-t-il sur le fond la question du droit à l'énergie, alors que la facture énergétique de nos concitoyens a connu une hausse de 12 % en un an, alors que les loyers des plus modestes ont bondi de 40 % en dix ans, et que les prix des produits alimentaires connaissent des augmentations à deux chiffres ?

Bien sûr, on peut répondre en se disant qu'il n'y a pas d'efforts inutiles et qu'à l'image de Sisyphe, vous vous faites les muscles, monsieur le ministre ! Mais n'y a-t-il pas quelque indécence à vouloir apporter, en réponse à ces phénomènes d'une ampleur inégalée, des mesures si dérisoires au regard des attentes des Français ? Car, il faut bien le dire, les besoins des populations sont énormes, et les décisions à prendre doivent être à la hauteur !

Certes, prendre l'angle du seul consommateur pour légiférer est une astuce bien pratique pour les gouvernements : au lieu d'augmenter les revenus et les salaires, on prétend faciliter la consommation en favorisant une « meilleure information » ou en rationalisant les prix.

Vous me permettrez, monsieur le ministre, de démonter cette mécanique.

D'une part, le consommateur considéré comme un « homo economicus » est, la plupart du temps, captif. La rationalisation des prix et une bonne information ne modifient qu'à la marge la consommation, tant les consommateurs sont dépendants d'un certain nombre de biens de consommation courante. C'est le miroir aux alouettes de la société marchande, cette société qui fabrique les goûts, les envies, les désirs, de façon à ce que les consommateurs « courent vers leur servitude comme s'il s'agissait de leur salut », pour reprendre une formule de Spinoza.

D'autre part, en refusant toute augmentation des revenus et en ne s'attaquant pas aux mécanismes de fabrication des prix, on laisse intacts les marges et les profits des grands groupes, particulièrement ceux de la grande distribution ou de l'industrie agroalimentaire.

Légiférer pour les seuls consommateurs, c'est nier l'existence de rapports de force au sein du processus de production, et faire comme si chaque acteur économique, atomisé, en était réduit à faire de petits calculs coûts-avantages ! Nous avons bien là, malheureusement, la confirmation de ce cri de Philippe Kourilsky : « La définition d'homo economicus est scandaleuse : "parfaitement rationnel, parfaitement informé et ne suit que son propre intérêt" .»

Nous ne saurions trouver notre compte dans cette vision libérale de l'économie, qui ne tend qu'à préserver le système actuel plutôt qu'à le remettre en cause. Pourtant, au vu des turbulences et des destructions qu'il génère, comme la situation présente le démontre, il serait temps de changer de paradigme ! Faut-il rappeler – j'en prends à témoin mon collègue Marc Dolez – que c'est ce que propose le Front de gauche ?

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