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Intervention de Frédéric Lefèbvre

Réunion du 29 septembre 2011 à 9h30
Protection des consommateurs — Discussion d'un projet de loi

Frédéric Lefèbvre, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation :

L'information des consommateurs dans ce domaine est trop souvent incomplète ou trop floue. C'est pourquoi le projet de loi prévoit d'obliger les opérateurs à dispenser des conseils tarifaires personnalisés gratuits lors de la souscription d'un contrat et en cas d'évolution substantielle de la consommation.

Le projet de loi a également pour objectif de mettre en place des procédures de vérification et de suspension des factures anormales. Lorsqu'un consommateur jugera sa facture aberrante, celle-ci sera suspendue le temps que le fournisseur d'énergie et le gestionnaire procèdent aux vérifications nécessaires et motivent le niveau. C'est une petite révolution en la matière.

Permettez-moi maintenant d'aborder un sujet qui touche à l'avenir de l'économie française et des pratiques de consommation des Français, le commerce électronique.

Vous le savez, le commerce électronique connaît une croissance spectaculaire : notre pays compte désormais 27 millions de cyberacheteurs et le secteur a réalisé un chiffre d'affaires de 31 milliards d'euros en 2010, contre 26 milliards en 2009, soit une augmentation de plus de 19 %. Je l'ai souvent dit depuis ma nomination au Gouvernement, il est nécessaire de mener une action cohérente et continue pour accompagner le formidable développement du e-commerce et garantir la confiance dans ce secteur.

Le e-commerce est une opportunité dont tout le monde peut et doit profiter : il peut en effet faciliter la vie de nos concitoyens – une récente étude montrait que les consommateurs voulaient plus de rapidité – mais également pérenniser et relancer l'activité de nombreux commerçants. Loin d'être seulement un nouveau concurrent pour le commerce traditionnel, il en est un complément, il est même, je crois, une chance car l'avenir du commerce, en France, c'est le commerce multi-canal. Encore faut-il que certaines dérives ou menaces ne découragent pas les cyberacheteurs.

Dans ce contexte, et pour être à la hauteur des attentes et craintes que peut susciter le e-commerce, nous devons nous assurer que son développement ne s'accompagne pas de pratiques trompeuses pour le consommateur, ou déloyales pour le commerce traditionnel. La DGCCRF a reçu près de 11 000 réclamations à ce sujet en 2010, soit 12 % du total des réclamations.

Je le disais, c'est en restaurant la confiance entre consommateurs et professionnels que nous soutiendrons durablement la croissance, et donc l'emploi, dans notre pays. Restaurer la confiance, c'est d'abord assurer les consommateurs qu'ils seront toujours protégés, même sur internet, et dédommagés en cas de préjudice.

Le projet de loi prévoit donc de mieux protéger les cyberacheteurs. Les pénalités versées au consommateur pour non-respect du délai légal de remboursement en cas de rétractation seront ainsi doublées.

À ce sujet, le texte a été enrichi en commission par un amendement du groupe socialiste que je tiens à saluer, qui prévoit de réduire de trente à quinze jours le délai de remboursement des sommes versées par le consommateur qui annule sa commande en cas d'indisponibilité du bien.

Je tiens aussi à aborder un sujet qui touche aux nuisances que nous subissons toutes et tous, le spam. Pour lutter efficacement contre ce fléau, le projet de loi prévoit de doter la DGCCRF du pouvoir de prononcer des amendes administratives contre ceux qui répandent des spams sans le consentement des personnes.

Par ailleurs, la semaine passée nous avons lancé avec les fédérations professionnelles, j'y ai fait allusion tout à l'heure, une liste d'opposition au démarchage téléphonique, la liste PACITEL, sur laquelle pourront s'inscrire les consommateurs qui souhaitent ne plus être démarchés téléphoniquement. Dans un premier temps, cette liste sera consultée par les entreprises volontaires.

Cette initiative est déjà plébiscitée par les Français, avec plus de 300 000 inscrits en quelques jours. Elle correspond à leurs attentes et à une demande légitime d'un droit à la tranquillité. À ce stade, seules les entreprises adhérentes des organisations professionnelles se sont engagées à participer au dispositif. Néanmoins, grâce au projet de loi et en particulier à un amendement du rapporteur qui a été adopté en commission, la consultation de cette liste sera rendue obligatoire pour toutes les entreprises sous peine d'amendes financières.

Trop souvent, le législateur a une longueur de retard sur les évolutions technologiques. Ce projet de loi vise, quant à lui, à redonner aux pouvoirs publics comme aux Français une longueur d'avance. Mais, je le disais tout à l'heure, nous devrons évidemment nous montrer réactifs et légiférer à nouveau. Ce texte n'est qu'un début en la matière.

Le marquage de l'origine des produits est un sujet qui vous préoccupe sur tous les bancs de cette assemblée ; André Chassaigne a eu l'occasion de me saisir à plusieurs reprises de la question et d'autres parlementaires ont également agi dans leur circonscription. C'est une mesure pour laquelle les artisans et les agriculteurs se battent depuis très longtemps.

J'ai souhaité que ce projet de loi accorde une large place à la richesse de nos savoir-faire et de nos productions artisanales. Celles-ci constituent une force pour notre économie et pour notre pays. Elles participent au rayonnement international de la France, mais également, et c'est la raison pour laquelle elles ont toute leur place dans ce texte, à la promotion de la qualité au quotidien. J'ai parlé des consommateurs qui recherchent la rapidité. Quand on les interroge aujourd'hui, on constate qu'ils recherchent aussi la qualité et l'authenticité. C'est d'ailleurs l'une des explications du retour des consommateurs vers le commerce traditionnel, vers le commerce de proximité.

Relever le défi de la qualité, c'est favoriser la prise de conscience par les consommateurs de l'importance du mieux consommer, du choix d'une consommation plus respectueuse, plus durable et plus équilibrée.

Le projet de loi permet d'avancer pour le marquage de l'origine des produits à la suite du rapport d'Yves Jego, en étendant la notion d'« indication géographique protégée » aux produits artisanaux. En clair, il s'agit de promouvoir une consommation de qualité en protégeant l'origine géographique des produits industriels et artisanaux. Ce nouveau dispositif permettra aux produits français d'obtenir une protection sur le territoire national.

Il n'était en revanche pas question d'exclure, au travers de ces indications géographiques, tel ou tel acteur, l'objectif étant bien évidemment que tous se rassemblent pour être plus forts.

Un mot sur la modernisation des pouvoirs de la DGCCRF. C'est un sujet ô combien essentiel et structurant dans la bataille qui est menée pour protéger le consommateur.

Toutes ces réponses que nous tâchons d'apporter ensemble aux problèmes quotidiens des Français n'auraient que peu d'efficacité sans un dispositif de contrôle et de sanction refondé. La protection des consommateurs est un principe fondamental de notre droit de la consommation. Et nos règlements sont parmi les plus protecteurs en la matière : nous avons d'ailleurs mené récemment une action très forte au niveau européen pour que la spécificité du droit de la consommation de notre pays soit préservée et que nous ne soyons pas tirés vers le bas. Mais, trop souvent, leurs délais d'application sont trop longs.

C'est pourquoi j'ai souhaité la modernisation et le renforcement en profondeur des moyens donnés à la DGCCRF. Le projet de loi prévoit ainsi d'étendre la compétence de la DGCCRF dans différents secteurs de la consommation.

Le champ des sanctions administratives est élargi et les agents de la DGCCRF disposeront de pouvoirs d'injonction dont le non-respect sera désormais sanctionné.

De plus, le projet de loi permet de mieux protéger les consommateurs contre les clauses abusives. L'action des juges, des associations de consommateurs et de la DGCCRF en la matière sera renforcée. Surtout, dès lors qu'une clause sera jugée abusive et supprimée d'un contrat, elle le sera également de tous les contrats identiques conclus par des consommateurs avec le professionnel concerné. C'est une avancée décisive, qui répond à une demande unanime des associations de défense des consommateurs.

En outre, je me réjouis que la commission des affaires économiques ait aussi souhaité moderniser les pouvoirs de la DGCCRF, en donnant notamment à ses agents, quand les moyens de l'enquête l'exigent, la possibilité de se faire passer pour de faux consommateurs, ou encore en les autorisant à relever l'identité des personnes contrôlées, par exemple en matière de commerce ambulant.

Au travers de ces quelques exemples, j'ai voulu témoigner de la richesse de ce projet de loi, encore accrue par les dispositifs que votre commission a décidé d'y adjoindre et qui répondent eux aussi aux attentes des consommateurs. C'est le sens des amendements que vous avez adoptés et qui visent à apporter des réponses nouvelles aux plaintes répertoriées par la DGCCRF.

Je ne doute pas que la sérénité, le bon sens, et l'esprit de consensus nous animeront ces prochains jours pour continuer d'enrichir et d'améliorer ce texte, ici et au Sénat, dans sa nouvelle configuration. Encore une fois, les Français et les consommateurs attendent de nous, au-delà de nos attaches partisanes, que nous soyons réactifs et que nous répondions à leurs difficultés quotidiennes.

Parmi les améliorations attendues figurent entre autres l'obligation de partager de manière égale, à 50-50, tous les frais initiaux d'agence entre bailleur et locataire, la possibilité de changer d'auto-école et l'introduction de la notion de clause abusive concernant les frais de transfert de dossier entre auto-écoles, autant de sujets dont traitent les amendements déposés. Enfin, je citerai un combat cher à M. le député Mallié, à savoir l'amélioration de la loyauté et de la transparence de la tarification des services à valeur ajoutée délivrés par SMS. Voilà quelques pistes de réflexion pour alimenter nos débats.

Ce texte s'inscrit dans le prolongement de l'action du Gouvernement ; il ne doit pas être l'occasion de remettre en cause les textes déjà votés, car les acteurs économiques ont besoin de stabilité juridique, comme l'a compris votre commission.

Je n'ai pas non plus voulu introduire dans notre droit les actions de groupe. Il y a eu débat en commission sur cette question légitime, et j'ai moi-même beaucoup réfléchi au sujet. Ma position est connue ; je l'ai exposée dans mon livre Le mieux est l'ami du bien, écrit avant mon entrée au Gouvernement. Les dérives des class actions observées aux États-Unis, alliées au contexte de crise actuel, conduisent le Gouvernement à privilégier des solutions plus adaptées pour réparer les préjudices subis par les consommateurs.

Ces solutions reposent, d'une part, sur le développement et la généralisation de la médiation. Nous faisions, hier, avec des responsables de toutes appartenances politiques parmi lesquels Robert Rochefort, ancien directeur du CREDOC et aujourd'hui député européen du MODEM, le bilan, au bout d'un an, de ce dispositif essentiel qui mérite d'être étendu et renforcé. Nous misons d'autre part sur la modernisation des pouvoirs de la DGCCRF que je viens d'évoquer, pour faire cesser rapidement les préjudices subis par les consommateurs.

Je vous propose l'efficacité et la rapidité, choisissant résolument de me placer du coté du consommateur. Vous l'aurez compris, ce projet de loi n'est pas un projet idéologique, à l'approche des futures échéances électorales. Mon action repose sur le pragmatisme, pas sur le dogmatisme. Ce projet de loi concrétise un travail de dialogue, d'écoute et de recherche de solutions efficaces. Ce sont des méthodes auxquelles nous sommes, je crois, tous attachés. Quand il s'agit de protéger les consommateurs et de défendre le mieux-être des Français, il est de notre devoir de dépasser les querelles partisanes pour répondre rapidement et avec un esprit de modernité à leurs attentes et à leurs aspirations.

Je vous serais très obligé de bien vouloir poursuivre notre discussion dans l'esprit constructif qui a prévalu tout au long de l'examen en commission et qui fait du texte que nous sommes amenés à examiner un texte équilibré et largement consensuel. Pour ma part, je me montrerai ouvert à toutes les propositions, d'où qu'elles viennent.

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