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Intervention de Marc Goua

Réunion du 6 septembre 2011 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2011 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Goua :

La position allemande, reprise par la France, ne fait que retarder ce processus, et continue de mettre en danger la monnaie européenne.

La mise en place de ce système pourrait permettre de dégager des économies grâce aux taux d'intérêt faibles et de favoriser la relance.

M. Leonetti, pour justifier le refus français sur cette question, argue qu'« en mutualisant les dettes de pays qui n'ont pas les mêmes politiques économiques et budgétaires, les eurobonds sanctionneraient les États vertueux en renchérissant le coût de leurs emprunts et favoriseraient ceux qui n'ont pas encore mené à terme les efforts de redressement de leurs comptes publics ». Il oublie de préciser que les pays les plus vertueux, notamment l'Allemagne, paieraient un tribut beaucoup plus important en cas d'explosion de la zone euro.

J'en viens à la deuxième partie du texte, introduite par la lettre rectificative. Vous tentez de nous faire croire que la crise est la seule raison du dérapage de nos comptes publics. Or, chaque année, la Cour des comptes éclaire la situation et remet en perspective le poids de vos responsabilités.

Depuis de nombreux mois, nous vous mettons en garde sur l'optimisme de vos prévisions de croissance, sur lesquelles était basé votre projet de loi de finances 2011. Tous les analystes sérieux jugeaient votre hypothèse fantaisiste, et ils n'avaient pas tort : vous êtes partis de 2,25 % pour descendre à 2 %, et la réalité se situera sans doute en deçà de 1,75 %. La crise des dettes souveraines ne concerne plus seulement la Grèce et l'Irlande, mais bien l'ensemble de la zone euro.

Vous soulignez l'importance de conserver notre notation AAA et nous partageons cette préoccupation. Mais si cette notation est en péril aujourd'hui, vous en êtes grandement responsables ! Vos marges de manoeuvre sont devenues inexistantes en raison des nombreuses niches fiscales que vous avez créées au fil du temps sans cohérence globale, sans pilotage sérieux, en somme sans vision !

Année après année, débat après débat, niche après niche, nos déficits se creusent et notre dette s'amplifie. Sur ce point, les rapports de la cour des Comptes et de l'IGF se suffisent à eux-mêmes. Votre manque d'anticipation et votre imprudence sont confrontés à la réalité, et la crise des dettes souveraines de cet été, comme la crise actuelle, vous contraignent à présenter dans la précipitation un catalogue de recettes picorées çà et là.

L'improvisation est telle que votre majorité se cabre et qu'une à une, les mesures annoncées sont abandonnées ou différées : TVA sur les parcs à thème, modification des cotisations sur l'aide à domicile, et peut-être d'autres en cours de débat – je pense notamment à la TVA sur les plus-values. De plus, à la veille d'une échéance électorale, vous tentez de vous refaire une virginité en prétendant faire payer « les riches » grâce à la création d'une taxe exceptionnelle sur les hauts revenus, une hausse de 1,20 % sur les prélèvements sociaux des revenus du capital, une hausse des taxes sur les plus-values immobilières, ainsi qu'un plafonnement du report du déficit des entreprises.

Nous sommes dans la caricature : les recettes prévues par ce prélèvement exceptionnel n'excèdent pas 200 millions d'euros, alors que les cadeaux consentis en juillet aux contribuables les plus aisés assujettis à l'ISF représentaient 1,8 milliard d'euros !

M. le ministre a indiqué en commission des finances qu'il nous proposait « une réponse adaptée et cohérente tant au niveau de l'Europe, à travers la création d'une véritable force de frappe financière, qu'au niveau de notre pays pour respecter nos engagements », ajoutant : « nos propositions représentent une répartition équitable des efforts nécessaires et ce que nous proposons privilégie l'emploi ».

Si ces déclarations ne manquent pas de souffle, elles sont en totale contradiction avec vos propositions, et je vais vous en donner quelques exemples. Vous envisagez une hausse des prix du tabac, de l'alcool et des sodas. Ces produits ne sont pas bons pour la santé, personne ne le nie. Mais le symbole est fort : vous faites les fonds de tiroir et, une fois de plus, ce sont les consommateurs qui payeront l'addition au final. Votre projet – avorté – de hausse du montant de la TVA pour les parcs à thème est tout aussi révélateur.

Il est sans doute plus difficile pour vous de revenir sur la baisse de la TVA dans la restauration, qui aurait pourtant dégagé des marges budgétaires plus conséquentes et dont l'effet sur la consommation, sur les prix et sur les conditions de travail des salariés n'est pas évident.

Parallèlement, vous vous attaquez de façon violente aux contrats solidaires et responsables des complémentaires santé en doublant la taxe qui leur est appliquée, la portant de 3,5 % à 7 %. Or cette hausse, qui sera immédiatement et irrémédiablement répercutée, représente un treizième mois de cotisation. Au moment où nombre de nos concitoyens, notamment les jeunes, ne souscrivent plus à des complémentaires santé car ils n'en ont plus les moyens – ce qui a pour effet de lézarder toute la solidarité intergénérationnelle – d'autres pistes étaient envisageables.

Par exemple, en s'appuyant sur nos propositions confirmées par le travail réalisé par l'IGF, il est temps de remettre en cause la défiscalisation des heures supplémentaires, véritable non-sens en termes de politique de l'emploi en période de chômage massif. Nous n'avons cessé de vous demander la suppression de ce dispositif inefficace, destructeur d'emplois, et représentant un coût pour l'État de l'ordre de 4,5 milliards d'euros pour 2011.

Évidemment, nous sommes en complet désaccord avec les mesures que vous nous proposez pour tenter de redresser la situation, car elles ne correspondent pas à notre vision de la solidarité et de l'équité et, de plus, seront inefficaces et dangereuses pour la croissance.

Nous considérons qu'il y a des marges de manoeuvre, mais que les mesures à prendre doivent s'inscrire dans un plan cohérent de réduction des déficits et de relance de la croissance. Car, sans mesures qui permettraient cette relance, le redressement des finances publiques ne peut se réaliser – on le voit bien en Grèce – et l'austérité et le tour de vis que vous nous proposez au détriment des plus faibles et des classes moyennes en appelleront de nouveaux très prochainement. Ce sera l'ajustement revolving, avec des plans d'austérité qui se succéderont au fil des mois !

Nous vous avons fait, au cours des derniers mois, des propositions qui permettraient à la fois de nouvelles recettes à hauteur de 10 milliards d'euros et une relance sélective de l'économie. Nous regrettons de ne pas avoir été entendus. Évidemment, nous nous opposerons fermement à votre plan d'austérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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