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Intervention de Michel Lucas

Réunion du 14 juin 2011 à 17h15
Commission des affaires économiques

Michel Lucas, président du Crédit mutuel :

Le Crédit mutuel est une organisation relativement récente sur le marché français, même si son expansion a commencé en 1995. Nous avons ensuite racheté le Crédit industriel et commercial (CIC). Comme toujours, dans le cas d'installations récentes, les parts de marché sont fort différentes d'une région à l'autre.

Selon les ratios globaux, nos crédits aux TPE ont augmenté de 5,7 % en 2010. Mais la progression fut de 18, 7 % en Ariège, de 11 % en Loire-Atlantique, de 8,8 % dans les Côtes d'Armor, de 4,2 % dans l'Isère … Encore faudrait-il distinguer la part du Crédit mutuel de celle du CIC, leurs implantations étant très différentes. Le financement des TPE s'effectue sur le terrain et non depuis Paris. Or nous disposons de nombreuses agences dans certaines zones, de très peu dans d'autres.

Je partage l'analyse de mes collègues quant aux problèmes que nous rencontrons vis-à-vis de l'évolution réglementaire. Toutefois, nos fonds propres ne se présentent pas de la même façon, puisque nous ne distribuons pas de dividendes. Nos réserves étant ainsi indivisibles, nous ne sommes pas gênés par les nouvelles contraintes. En revanche, nous nous heurtons aussi à la question de la liquidité puisque nous ne pouvons distribuer de crédits qu'à partir de nos ressources. Or la Caisse des dépôts et consignations prend 16 % des crédits des régions et les ramène à Paris, nous privant ainsi d'une ressource à réinvestir localement. Pendant longtemps nous y avons cependant eu accès par le moyen du livret bleu. Nous ne remontions alors que 50 % des encours à la Caisse des dépôts, le reste étant prêté dans les régions mais à partir de consignes gouvernementales.

L'avenir du financement d'une PME-PMI se joue au plan local. Un hiatus important peut se creuser entre l'innovation, considérée au plan global, et la réalité économique de terrain. Le précédent de l'explosion de la bulle internet devrait nous conduire à y réfléchir.

La médiation du crédit a connu deux phases. Au cours de la première, immédiatement après 2008, il fallait, coûte que coûte, trouver des réponses à la crise. On publiait alors des communiqués de victoire pour signaler le nombre d'emplois sauvés ici et là. Mais bien des dossiers qui nous parvenaient n'étaient guère solides et les arguments en leur faveur, souvent fondés sur la méthode Coué, contredisaient nos bonnes règles de gestion. Puis, du fait des adaptations opérées, la médiation a pris une toute autre allure ; elle est ainsi devenue beaucoup plus sérieuse, et donc plus saine, qu'au départ.

Il faut bien comprendre que la personne travaillant dans une agence, à qui on indique la nécessité de financer tel ou tel projet pour telle ou telle raison, mais qui considère l'opération comme déraisonnable, finit par faire remonter les dossiers à sa hiérarchie. Dès lors, les directeurs d'agence, refusant de s'engager en fonction de décisions politiques plutôt qu'économiques, transmettent tout au siège central. Nous avions, en France, déjà connu de telles situations dans le passé mais il revenait au juge, il y a encore une quinzaine d'années, de décider si la caution était ou non valable. Il a fallu modifier le système car plus personne dans les agences ne voulait accorder de prêt.

Le financement des entreprises s'effectuant sur une certaine durée, il faut éviter de réduire la responsabilité des dirigeants d'agence par des interventions à très court terme et en dehors de la logique économique.

S'agissant des nouveaux ratios, on parle beaucoup de Bâle III et trop peu de l'Europe. Or une nouvelle directive sur les fonds propres des banques, la CRD IV, se profile à l'horizon, alors que les situations sont très différentes selon les pays européens. Ainsi, dans le Bade-Wurtemberg, où le taux de chômage n'est que de 2 ou 3 %, il est très difficile d'ouvrir une agence faute de personnel disponible quand, en Alsace, berceau du Crédit mutuel, un taux de chômage bien plus élevé pose les problèmes que l'on connaît. Il faut donc à la fois tenir compte de notre économie nationale, de celle de l'espace européen et, enfin, du niveau international où se fixent les ratios dont nous avons parlé.

Le Crédit mutuel, plus particulièrement orienté vers le marché français, se trouve donc davantage tributaire de l'économie nationale que d'autres établissements bancaires qui travaillent davantage avec l'étranger. Je ne connais pas deux banques identiques en France. Il faut s'en souvenir quand on parle de réglementation commune.

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