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Intervention de Axel Poniatowski

Réunion du 15 juin 2011 à 15h00
Déclaration du gouvernement préalable au conseil européen et débat sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAxel Poniatowski, président de la commission des affaires étrangères :

L'aide annoncée au G 8 devrait permettre aux autorités tunisiennes de rétablir les équilibres financiers en attendant que des réformes structurelles engendrent une nouvelle croissance, soutenue par le partenariat euroméditerranéen.

Vis-à-vis de la Libye, nous sommes confrontés à une situation inédite : le régime de Kadhafi, aux abois, se sert de l'immigration comme d'une arme, l'armée et la police libyennes organisant des départs d'émigrants terrorisés par les combats. Selon les témoignages recueillis, les militaires libyens vont jusqu'à s'assurer que les migrants n'ont aucun papier avant de les faire embarquer dans des bateaux dont la résistance à la mer est souvent plus que douteuse.

Ces difficultés apparaissent à un moment particulier, celui du formidable mouvement de révolte populaire dans les pays arabes, que l'Union européenne appuie par des moyens qu'elle est en train de réorienter ou de construire. La nouvelle stratégie méditerranéenne de l'Union européenne consiste à créer un partenariat pour la démocratie et une prospérité partagée avec le sud de la Méditerranée. Le moteur d'un tel partenariat est une relation franche, sur un pied d'égalité, pour construire ensemble un espace partagé bénéfique à tous.

Notre message doit être sans ambiguïté. Les pays de l'Union européenne traversent une crise économique et financière hors du commun et ne sont pas en situation d'absorber des flux d'immigrants massifs. Cela n'exclut pas, en revanche, une politique de migration bien ciblée, strictement encadrée, en complément des investissements et des avancées dans l'intégration économique.

Ce discours de vérité, nous devons aussi le tenir afin de dissiper les inquiétudes parmi les Européens, face à des vagues d'immigration qui seraient incontrôlées. Il serait désolant que la révolution arabe soit perçue comme une menace alors qu'elle constitue une chance et une opportunité pour tous. Il s'agit, pour les Européens, de contrôler les frontières extérieures de l'Union, mais aussi de disposer d'une gouvernance qui garantisse la libre circulation. Or, pour le moment, la communication de la Commission en date du 4 mai est certes utile, mais le moins que l'on puisse dire est qu'elle manque de précision.

Maîtriser les frontières extérieures, c'est d'abord les fixer. L'intégration dans l'espace Schengen de nouveaux États est souhaitable, à condition que leur gestion des frontières soit opérationnelle. La proposition des Pays-Bas d'une période de probation avant la suppression des contrôles aux frontières intérieures avec la Roumanie et la Bulgarie me paraît, à cet égard, de bon sens. Il conviendrait aussi qu'un accord de réadmission avec la Turquie soit conclu afin de soulager la Grèce, qui connaît bien d'autres difficultés.

D'un point de vue opérationnel, une augmentation des moyens et des capacités de Frontex et la création d'un corps européen d'inspecteurs sont bien évidemment requis.

Le second volet sur lequel des décisions fortes sont attendues est celui de la réforme de la gouvernance de Schengen. La plupart des mesures envisagées par la Commission européenne ne souffrent aucune critique. Il s'agit d'améliorer la transparence des informations entre les États, afin qu'il soit rapidement possible de vérifier qu'ils agissent conformément à l'esprit et à la lettre des règles.

Les procédures de délivrance des titres doivent être rigoureusement encadrées et harmonisées. Il est heureux, à cet égard, qu'un régime commun d'asile européen puisse être défini à l'horizon 2012. Toutefois, il conviendra d'examiner avec une extrême vigilance toute dérogation au principe selon lequel un migrant doit voir sa demande traitée par l'État dans lequel il est arrivé.

En revanche, la position de la Commission européenne à propos de la clause de sauvegarde est encore beaucoup trop timide. Certes, la Commission a admis le principe qu'une telle clause soit introduite afin que les États puissent temporairement rétablir les contrôles à leurs frontières intérieures en cas de situation exceptionnelle ou de déficience à un point des frontières extérieures. Une définition très précise des conditions d'activation de la clause et du niveau de décision requis est impérative, mais demeure pour l'instant en suspens.

Pour ma part, je tiens à féliciter le Gouvernement pour les décisions qu'il a prises lorsque l'Italie a commencé de délivrer des laissez-passer pour l'espace Schengen, mais je l'invite à ne pas reculer d'un pouce. En cas de crise aux frontières extérieures, si la gouvernance ne fonctionne pas, il est normal que les États, et la France en l'occurrence, puissent décider de faire respecter ni plus ni moins les règles d'admission sur leur sol.

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