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Intervention de Anny Poursinoff

Réunion du 15 juin 2011 à 15h00
Déclaration du gouvernement préalable au conseil européen et débat sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnny Poursinoff :

Sur le plan des prélèvements, il faut aussi mieux coordonner la fiscalité des entreprises, harmoniser par le haut la taxation des revenus du patrimoine et mettre en oeuvre une réelle fiscalité écologique.

Au sein de l'Europe, on constate une forme de dumping, qui nuit au développement de l'Union et au bien-être de ses citoyennes et de ses citoyens.

Évoquons aussi la menace qui pèse sur le programme d'aide aux plus démunis, suite à l'arrêt de la Cour de justice européenne du 11 avril dernier. Il nous faut réfléchir, et il y a urgence, à des moyens pour nourrir les populations les plus fragiles lorsqu'il n'y a pas d'excédents agricoles, une situation qui risque de se reproduire cette année.

Car la réponse aux crises, y compris la sécheresse, ce n'est pas le chacun pour soi. C'est la solidarité. Une solidarité qui devrait s'exercer aussi dans les relations avec les pays hors de l'Union.

Alors que, ces derniers mois, la démocratie a fleuri de l'autre côté de la Méditerranée, quelle a été la réponse de notre gouvernement pour accompagner la transition politique ? Le rejet des réfugiés ! Il est plus facile de soutenir des dictatures que d'accueillir des jeunes qui ont besoin de souffler !

De même, lorsque la France envoie des avions de chasse en Libye, elle se doit aussi d'ouvrir les portes aux personnes qui fuient les combats. L'Union européenne peut mettre en oeuvre, de manière exceptionnelle, une protection temporaire pour accueillir les réfugiés. Quel est aujourd'hui le plus important ? Empêcher des personnes d'arriver sur nos côtes ou sauver des vies ?

Un jeune Tunisien, venu témoigner la semaine dernière au Parlement européen, disait : « J'aimerais bien que les ministres qui viennent faire une croisière en Tunisie essaient de se mettre à notre place. Dans ma région, au sud de la Tunisie, les femmes sont nombreuses à travailler dans le maraîchage pour des entreprises européennes ou des multinationales. Elles gagnent à peine 60 euros par mois pour nourrir toute une famille. Je ne parle même pas des pesticides et de leurs problèmes de santé… Comment voulez-vous que, nous, leurs fils, nous ne quittions pas notre pays dans ces conditions ? » Ceci est un témoignage parmi d'autres.

Au lieu de remettre en cause le principe de la libre circulation dans l'espace Schengen, au lieu de nous enfermer dans l'Europe forteresse, soyons à la hauteur des événements historiques en Tunisie et en Libye. Entamons de nouvelles relations entre pays européens et méditerranéens, fondées sur des rapports économiques justes et équilibrés, et une nouvelle politique de circulation entre les deux rives.

Voilà ce qui serait à la hauteur des valeurs de la République française, des valeurs qui sont, il ne faudrait pas l'oublier, des valeurs humanistes, des valeurs de fraternité et d'égalité, des valeurs à l'opposé des politiques stigmatisantes et des propos discriminatoires.

C'est la raison pour laquelle je souhaite faire valoir ici notre devoir de solidarité à l'égard des douze millions de citoyens européens qui sont Roms.

Après avoir subi un génocide durant la Seconde guerre mondiale, génocide dont certains d'entre nous demandent toujours la reconnaissance officielle par l'État français, ces populations se heurtent à de très fortes discriminations.

À l'échelle de l'Europe, la stratégie d'inclusion de ces populations se heurte à la mauvaise volonté des États membres, notamment de la France – souvenons-nous des expulsions honteuses de l'été 2010. Qu'il s'agisse du logement, de la création d'aires d'accueil, de l'accès à l'éducation, c'est à l'État français d'agir pour améliorer la situation sur son territoire.

En ce qui concerne l'emploi, pointons l'hypocrisie du Gouvernement qui limite l'accès au marché du travail de ces citoyens venus de Bulgarie et de Roumanie aux métiers dits en tension. Ces restrictions devraient être levées sans attendre. Pourquoi ces citoyennes et ces citoyens européens seraient-ils traités comme des ressortissants non communautaires ? La France, pays des droits humains, devrait mettre ses principes en application.

Je conclus. En ce qui concerne la lutte contre les discriminations, le soutien aux services publics, le partage de la dette, la lutte contre la spéculation financière, l'organisation de la solidarité, l'adaptation au changement climatique, la France doit faire entendre une voix forte au Conseil européen.

Malheureusement, le Gouvernement stigmatise les pauvres, allège les taxes sur le capital, oublie d'imposer aux banques le plafonnement des rémunérations variables de leurs dirigeants, organise le démantèlement des services publics et des retraites, s'obstine à promouvoir le nucléaire alors qu'il faudrait une prise de position européenne forte pour sortir de cette énergie coûteuse, obsolète et dangereuse.

Pour résister aux crises systémiques que nous traversons, pour nous adapter au changement climatique et à ses conséquences économiques, pour construire un destin commun plus équitable, les vieilles recettes ne fonctionnent pas. Hier, nous avons enfin voté la taxation des transactions financières. Il est plus que temps de la mettre en oeuvre, de combattre efficacement la fraude et les paradis fiscaux, de créer une véritable fiscalité écologique.

Il est plus que temps aussi de tisser des coopérations plus justes avec les pays qui entourent l'Union. L'Europe, comme la France, doit se construire avec plus de solidarité, plus de justice sociale et environnementale, à l'égard de ses membres, comme à l'égard des pays moins favorisés. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

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