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Intervention de Patrick Bloche

Réunion du 9 juin 2011 à 9h30
Ouverture du mariage aux couples de même sexe — Discussion d'une proposition de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Cette reconnaissance par certains États européens a, du fait de la libre circulation des personnes au sein de l'Union, des implications dans les autres pays, notamment en France.

En l'état actuel de la jurisprudence, les juridictions européennes comme nationales se refusent à déclarer les dispositions actuelles du code civil contraires aux normes supérieures, laissant au législateur national, c'est-à-dire à nous, le soin de trancher la question. De ce fait, une évidence s'impose, la reconnaissance du mariage des couples de même sexe ne peut être que législative.

Votre rapporteur tient de fait à rappeler l'effet incontestablement déclencheur qu'a eu l'initiative prise par notre collègue Noël Mamère lorsqu'il a célébré, en tant que maire de Bègles, le 5 juin 2004, un mariage entre deux hommes. En effet, cela a permis aux tribunaux français de préciser la portée des articles du code civil relatifs au mariage.

Ce mariage a certes été annulé sur décision du tribunal de grande instance de Bordeaux du 27 juillet 2004, l'annulation étant confirmée en appel en avril 2005 et en cassation en mars 2007. Or, lors de l'audience de la première chambre civile de la Cour de cassation, l'avocat général avait déclaré que, compte tenu des enjeux de société importants et de la dimension politique des réponses pouvant être apportées à la question, « abandonner à la seule autorité judiciaire le soin de se prononcer » paraissait « exiger du juge qu'il accomplisse une tâche excédant les limites permises de son action ».

Cette jurisprudence de la Cour de cassation comme celle du Conseil constitutionnel déjà évoquée par votre rapporteur ou celle de la Cour européenne des droits de l'homme nous invitent, chers collègues, à un choix politique : il revient en effet aujourd'hui au législateur de déterminer sa conception du mariage en 2011.

Prenant la mesure des attentes fortes de nos concitoyens, qui y sont, faut-il le rappeler, majoritairement favorables, et des enjeux que soulève cette question, la présente proposition de loi entend ouvrir le mariage aux couples de même sexe, sans modifier les règles actuelles régissant le mariage hétérosexuel. Il est ici question seulement d'ajouter un droit nouveau, non de réduire les droits des couples mariés hétérosexuels.

Le texte se compose de quatre articles, répartis en trois chapitres.

L'article 1er, qui constitue le coeur de la proposition de loi, rétablit au sein du code civil un article 143 précisant désormais que « le mariage peut être contracté par deux personnes de sexes différents ou de même sexe ». Les articles suivants tirent les conséquences de cette reconnaissance en matière d'interdiction de mariage au sein des familles – article 2 –, et procèdent à un toilettage des termes utilisés dans différents articles du code civil pour tenir compte de ces évolutions – article 4.

Afin de ne remettre en cause aucun droit des couples hétérosexuels mariés, l'article 3 précise que les dispositions relatives à la filiation biologique sont maintenues en l'état dans tous les cas, le principe de la présomption de paternité figurant à l'article 312 du code civil étant désormais explicitement réservé aux seuls couples mariés composés d'un homme et d'une femme.

À l'issue de cette présentation, il revient malheureusement à votre rapporteur de vous informer que la commission des lois a rejeté cette proposition de loi. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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