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Intervention de Jean-Marc Nesme

Réunion du 24 mai 2011 à 21h30
Bioéthique — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marc Nesme :

Le président de la commission spéciale a tenu, cet après-midi, des propos assez durs à l'endroit d'une initiative que nous avons prise, avec soixante-deux de nos collègues, tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conflits d'intérêts potentiels en matière de recherche biotechnologique. Vous avez dit, monsieur le président, que c'était « un acte grave », et qu'il créait le « soupçon ».

Cette initiative se fonde sur des éléments factuels, pas sur des soupçons. Je voudrais simplement en citer quelques-uns, que vous connaissez d'ailleurs comme moi.

Dans le domaine de la médecine prénatale, vous savez très bien qu'il s'est créé une coordination, le Comité pour sauver la médecine prénatale, composé de 800 gynécologues et professionnels de santé. Son coordinateur a écrit ceci dans Le Quotidien du Médecin : « Allons-nous devenir les agents d'un nouvel eugénisme d'Etat ? 800 000 femmes enceintes équivaudraient à 800 000 tests sériques maternels par an, en France. Ce serait une véritable manne pour les firmes de génie génétique. Juteux marché. D'autres tests de dépistage suivront celui de la trisomie 21. »

S'agissant de la recherche sur l'embryon humain, Jacques Testart, directeur honoraire de recherche à l'INSERM, que nous avons auditionné le 12 janvier dernier, nous a dit ceci : « L'important ne me paraît pas de trancher entre interdiction des recherches sur l'embryon humain assortie de dérogations ou autorisations de ces recherches sous conditions, puisque les recherches seront possibles dans les deux cas, avec destruction des embryons humains. Ce débat me paraît vain. On devrait défendre l'idée d'une expertise indépendante des promesses médicales et des conflits d'intérêts qui y sont assortis. Il peut y avoir confusion entre des intérêts médico-scientifiques et des intérêts commerciaux. »

Alain Privat, ancien directeur d'unité à l'INSERM, et Monique Adolphe, ancienne présidente de l'Académie de pharmacie écrivaient, dans Le Quotidien du Médecin du 5 avril 2011 : « Ce lobbying est incompréhensible sur le plan médical et scientifique, sauf à y voir la nécessité pour certains organismes de justifier auprès de leurs généreux contributeurs les investissements très importants réalisés dans la recherche sur l'embryon humain, recherche qui n'a, en fait, conduit à aucune thérapeutique efficace jusqu'à présent, nulle part dans le monde. L'industrie du médicament et celle de la procréation assistée ne sont sans doute pas étrangères à cette véritable "chasse" aux cellules souches embryonnaires humaines. »

À la fin du mois d'avril, le LEEM, Les entreprises du médicament, ont adressé un courrier à Mme Valérie Pécresse, la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, et à M. Éric Besson, ministre de l'industrie. Je ne sais pas si vous l'avez reçu également, madame la secrétaire d'État. J'ai la copie des courriers dont les deux ministres que je viens de citer ont été destinataires, et qui visent, fin avril, à exercer encore une fois sur le Gouvernement une pression en faveur de l'autorisation de la recherche sur les cellules souches embryonnaires.

Je pourrais citer d'autres exemples, mais je ne veux pas être plus long, madame la présidente.

Vous comprenez pour quelles raisons, avec soixante-deux de mes collègues, UMP et Nouveau Centre – et je sais que certains collègues de l'opposition s'interrogent de la même manière que nous –, nous avons pris cette initiative tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conflits d'intérêts potentiels – nous ne faisons de procès d'intention à personne – en matière de recherche biotechnologique. Je vous demande, madame la secrétaire d'État, monsieur le président de la commission spéciale, monsieur le rapporteur, ce que vous pensez de cette initiative, sachant – mais vous vous en doutez bien – que, s'il y a un refus, c'est ce refus qui créera un soupçon. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

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