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Intervention de Patrick Ollier

Réunion du 24 mai 2011 à 15h00
Éloge funèbre de patrick roy

Patrick Ollier, ministre chargé des relations avec le Parlement :

Chère Geneviève, monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, le 3 mai dernier, Patrick Roy nous quittait. C'était un mardi, jour de séance des questions au Gouvernement, ces séances qu'il appréciait tout particulièrement et qui lui permettait de questionner le Gouvernement avec force, au point qu'il s'est fait connaître comme « le député à la veste rouge ». Derrière cet emblème, traduction de colère parfois et d'humour souvent, se cachait un homme d'une grande délicatesse dans son rapport aux autres, d'une sincérité profonde dans son engagement politique et d'une générosité sans faille.

Contrôleur de gestion, en 1977, d'une entreprise près de Cambrai, il préfère très vite se mettre au service des autres. Diplômé de l'éducation nationale, il devient instituteur à partir de 1983 et le restera près de vingt ans. Un goût affirmé pour la chose publique, un coeur bien ancré à gauche le poussent vers la politique. Il s'implique au sein du parti socialiste et devient secrétaire de section à Denain, en 1995. Mais Patrick Roy veut s'investir plus avant au service de ses concitoyens, au service de sa ville de Denain durement touchée par la désindustrialisation. Il aspire à participer à sa gestion et devient adjoint au maire en 2001 puis conseiller général. Sa carrière politique commence alors et prend rapidement de l'ampleur. Le 16 juin 2002, il est élu député de la dix-neuvième circonscription du Nord ; il est réélu à l'Assemblée nationale le 17 juin 2007. En mars 2008, il devient maire de sa chère ville de Denain. Il s'identifie à son territoire et se fait l'ambassadeur de Denain à Paris. Il se bat pour la survie de cette région sinistrée. Il répétait souvent – combien de fois l'avons-nous pas entendu ici ! – que ses dossiers prioritaires étaient le chômage, l'emploi, les petits retraités, le logement. Nous le sentions fiers de représenter ses concitoyens du Nord.

Mais sa préoccupation des autres le portait au-delà de sa région, vers l'ensemble des Français. À l'Assemblée nationale, il présidait le groupe d'études sur les conséquences de l'exposition à l'amiante. Il intervenait régulièrement sur ce délicat dossier. Cette question lui tenait à coeur et il faisait assidûment en sorte, comme sur d'autres sujets, d'être au quotidien le porte-parole des sans-voix.

Patrick Roy est également connu pour un autre de ses combats, comme vient de le rappeler le président de l'Assemblée nationale, un combat particulier qui peut paraître décalé dans cette enceinte, une cause qui lui était chère, le rock métal : une musique, disait-il, très injustement mal connue, extrêmement créative mais au mieux ignorée, au pire diffamée. Permettez-moi de m'attarder sur ce point, car lui rendre hommage, c'est aussi évoquer la diversité de l'offre musicale dans le service public, qui semble ignorer le rock métal. « Le rock métal est injustement méprisé par les médias », disait Patrick Roy le 15 mars dernier, lors de cette séance qui restera gravée dans nos mémoires, ce jour où un homme politique, un député est venu dans l'hémicycle délivrer un message d'amour, pour reprendre ses propres termes.

Nous le savions malade, nous le croyions perdu en cette fin d'année 2010. Puis un nouveau traitement lui a donné une exceptionnelle et nouvelle force de vie. Nous avons cru avec lui, avec ses amis, avec Geneviève, nous avons voulu réellement y croire, tant son enthousiasme était communicatif.

Ce laps de temps, tombé du ciel alors que tout semblait perdu, il l'a mis à profit pour dire son amour des gens, de la vie, pour dire au revoir aux siens, à ses amis, à ses adversaires, à tous ceux qui le faisaient se sentir vivant. Jusqu'à la fin, il est resté debout, tourné vers les autres.

Dans son message du 15 mars, au-delà de son cas personnel, il parlait pour toutes les personnes qui se battent contre la maladie. Il déclarait : « Face à la mort redoutée, il y a la vie espérée. Ce souffle, vous me l'avez tous donné. Il faut aussi le donner aux millions de victimes qui, comme moi, luttent pour la vie. La vie est tellement belle. Ces victimes, aimez-les, aimons-les, entourons-les : le coeur accomplit des miracles. »

En tant que ministre chargé des relations avec le Parlement, je tiens à saluer la mémoire du parlementaire assidu qu'il était, investi jusqu'au bout dans sa mission avec une énergie et un courage exceptionnels. Homme de convictions, Patrick Roy était un adversaire pugnace pour nous, sans concessions, mais constructif. Je salue le militant sincère et dévoué au socialisme qui avait une haute idée de la politique, les différences n'empêchant ni l'estime ni le respect ni même l'amitié.

C'est avec dignité et optimisme – un optimisme à toute épreuve – qu'il a fait face à la maladie qui l'a emporté. Patrick Roy n'a jamais abdiqué, il était un exemple de courage – courage partagé par sa famille, son épouse Geneviève et son fils Kevin. C'est dans le coeur de chacun des hommes et des femmes dont Patrick a marqué le destin qu'il laissera pour toujours son empreinte.

En 1903, à Albi, dans son discours à la jeunesse, Jean Jaurès affirmait : « Le courage, c'est d'aimer la vie et de regarder la mort d'un regard tranquille. » Patrick Roy a eu ce courage.

À ses collègues du groupe socialiste, à ceux de la commission des affaires sociales, à vous, Geneviève et à vous, Kevin, à toute votre famille je présente, au nom du Gouvernement, mes plus sincères condoléances.

(Mmes et MM. les députés, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, observent une minute de silence.)

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