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Intervention de Marie-Lou Marcel

Réunion du 10 mai 2011 à 21h30
Interdiction de la fracturation hydraulique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Lou Marcel :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en 2010, le ministère de l'environnement délivrait, sans aucune information préalable, pas même celle des populations et des élus directement concernés, trois permis exclusifs d'exploration de gaz de schiste. On apprenait également qu'outre les permis de Nant, de Montélimar et de Villeneuve-de-Berg, d'autres étaient en cours d'instruction, comme celui de Cahors couvrant plusieurs départements de la région Midi-Pyrénées.

L'attribution de ces permis a suscité une vive inquiétude parmi nos concitoyens et particulièrement ceux des territoires concernés. J'en veux pour preuve la formidable mobilisation sur le plateau du Larzac, touché par le permis de Nant, et celle de l'Ouest aveyronnais, touché par la demande de permis de Cahors. La sortie, au même moment, du film Gasland, qui rend compte de l'exploitation sauvage des sous-sols américains, a avivé cette émotion. L'accent est mis, dans ce reportage, sur les conséquences désastreuses pour l'environnement de la technique d'exploitation des gaz et huiles de schiste par la fracturation hydraulique. Utilisant des dizaines de milliers de litres d'eau enrichie en sable et en produits chimiques cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques, ce mode d'exploitation de nos sous-sols constitue un danger évident pour les populations, la flore et la faune.

C'est la raison pour laquelle, dans l'ensemble des départements et des régions concernés par les permis délivrés, ou en passe de l'être, territoires sur lesquels se trouvent des parcs naturels régionaux, comme celui des Grands Causses, de formidables mobilisations populaires ont eu lieu et ne faiblissent pas. Elles sont formées de comités, de simples citoyens, de militants associatifs et d'élus locaux.

Le groupe SRC avait déposé une proposition de loi demandant l'abrogation de l'ensemble des permis délivrés ou en cours d'examen et, par voie de conséquence, une réforme du code minier. Face à cette mobilisation populaire et politique, le Gouvernement a pratiqué successivement la confusion, la temporisation et, finalement, le rétropédalage.

Dans un premier temps, il nous a dit que l'exploration n'était pas l'exploitation. Au même moment, alors que vous exprimiez votre réprobation de toute forme d'exploitation, madame la ministre, votre homologue chargé de l'industrie ne cachait pas qu'il y était, lui, favorable.

Dans un deuxième temps, toujours par votre voix, le Gouvernement, a encouragé la création d'une mission parlementaire puis a prononcé un moratoire – que nous avions demandé – sur l'exploration des gaz de schiste, avant même que ne soient rendues les conclusions de cette mission.

Enfin, rétropédalage complet : le Gouvernement décide finalement qu'une proposition de loi sera déposée par le groupe UMP et par son président. On sait que le sous-sol de la Seine-et-Marne, département où ledit président est élu, suscite depuis de nombreuses années la convoitise des groupes pétroliers.

Ce texte qui, au passage, était censé couper l'herbe sous le pied des élus du groupe SRC, devait en particulier permettre d'abroger les permis délivrés par l'ancien ministre de l'environnement et de réformer le code minier.

Or, après examen par la commission du développement durable, nous nous trouvons à examiner une proposition de loi qui n'abroge plus les permis délivrés et ne dit rien de la nécessaire réforme du code minier. Sans mauvais jeu de mots, ce texte est une usine à gaz. Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement, ce qui n'est vraiment pas le cas, en particulier, de l'article 2. Nous voilà bien loin des exigences initiales, pourtant extrêmement simples : l'abrogation des permis délivrés et l'interdiction de l'exploration et de l'exploitation des gaz et huiles de schiste.

M. Havard a souligné que la nouvelle rédaction de cet article offrait une sécurité juridique. Il s'agirait plutôt, en vérité, d'une insécurité politique et de nouvelles insécurités environnementales.

On nous explique que c'est pour se prémunir contre tout recours à la fracturation hydraulique, quelles que soient les matières premières exploitées, schisteuses ou non, que l'on a modifié le texte initial. Mais la priorité de ce texte, c'était d'interdire l'exploration et l'exploitation des gaz de schiste ! Or on sait aujourd'hui qu'elles ne peuvent se faire autrement que par la technique de la fracturation !

En tout état de cause, il me semble nécessaire que nos concitoyens engagés dans la mobilisation contre l'exploitation des sous-sols par des procédés polluants reçoivent de notre assemblée un message très clair et très ferme : « Non à toute exploration et exploitation des huiles et gaz de schiste ! Abrogation immédiate de tous les permis délivrés ou en cours d'examen ! »

Pour ce qui concerne l'article 3 et la nécessaire réforme du code minier, rappelons que celui-ci date de Napoléon III et n'a pas été modifié fondamentalement depuis. Or le code minier, en son article L. 122-3, permet de délivrer un permis exclusif de recherches sans étude d'impact. Il entre ainsi en contradiction avec l'article 3 de la Charte de l'environnement. En outre, cette évaluation préalable du risque environnemental est obligatoire, non seulement parce qu'il s'agit d'une exigence constitutionnelle, mais encore parce qu'il s'agit d'une exigence communautaire.

Par ailleurs, l'article 3 introduisait initialement l'obligation de faire appel à la participation du public avant la délivrance d'un permis. C'est pourquoi l'articulation entre ce texte de loi et la réforme du code minier aurait dû être maintenue.

Pour conclure,…

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