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Intervention de Michel Havard

Réunion du 10 mai 2011 à 15h00
Interdiction de la fracturation hydraulique — Discussion d'une proposition de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Havard, co-rapporteur de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire :

Pour certains, cette formule est limpide et ne souffre pas la contestation. Le seul problème, si vous me permettez, est qu'elle n'est pas applicable en l'état actuel de notre droit. En effet il n'existe pas de permis exclusifs de recherches de mines d'hydrocarbures non conventionnels, le droit français n'opérant pas de distinction entre le conventionnel et le non conventionnel.

Est-il utile de rappeler que le Conseil constitutionnel a consacré à de multiples reprises « l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi », qui impose au législateur « d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques ». La rédaction issue des travaux en commission va dans ce sens.

Au sein des services ministériels, le bureau exploration-production des hydrocarbures a dressé une liste de permis comportant des projets pour des hydrocarbures non conventionnels. Celle-ci n'est pas satisfaisante, dans le sens où elle inclut, par exemple, des permis détenus par des entreprises qui exploitent le gaz de mine dans le bassin houiller du Nord-Pas-de-Calais par simple pompage, et exclut, par contre, d'autres permis, comme celui de Pontarlier, dont le titulaire mentionne un projet de recherche de gaz de schiste.

Comment établir une liste satisfaisante ? Comment ne pas oublier des permis ? Comment ne pas inclure des permis non concernés ? Toutes ces questions nous ont interpellés au cours des dernières semaines.

Il nous est apparu ainsi que la solution initiale ou celle d'une liste n'étaient pas pertinentes. Elles auraient à coup sûr été une faiblesse juridique et auraient favorisé les recours devant le juge administratif, ou devant le juge constitutionnel, par le biais d'une question prioritaire de constitutionnalité. L'objectif aurait ainsi été manqué.

Au terme de notre travail, nous sommes d'avis qu'il faut nous concentrer sur 1'interdiction de la fracturation hydraulique et obtenir des titulaires de permis des garanties quant aux techniques qu'ils emploient dans le cadre de leurs activités de recherche. Si l'usage de la fracturation hydraulique a été effectif, ou s'il est essentiel aux travaux d'exploration, nous souhaitons que les permis concernés soient abrogés. Les arrêtés délivrant les permis visés ne contiennent aucune information sur le type d'hydrocarbure recherché ou sur la technique employée. Il est donc nécessaire d'obtenir des données complémentaires, que seuls les industriels ont en main. Il ne s'agit pas d'un dispositif parfait ou idéal, nous en sommes conscients, mais c'est le meilleur que nous ayons trouvé.

Les débats qui ont surgi depuis le début de l'année 2011 sur la question des gaz et huiles de schiste ont souligné plusieurs écueils : d'abord, le Parlement ne dispose pas d'informations satisfaisantes sur la mise en valeur de notre sous-sol ; ensuite, notre cadre législatif et réglementaire doit être adapté.

Sur le premier point, il est dommage que le Parlement ne soit pas plus amplement associé à la mise en valeur du sous-sol national. Certes, une mission d'information relative à la question des huiles et gaz de schistes a été créée le 1er mars dernier par la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale. Les rapporteurs François-Michel Gonnot et Philippe Martin doivent rendre leurs conclusions le 8 juin prochain. Au-delà, cependant, il est nécessaire de prévoir la remise d'un rapport annuel au Parlement sur l'évolution des techniques d'exploration et d'exploitation, et sur la connaissance du sous-sol français, européen et international.

La France a la chance de compter dans le domaine minier des acteurs de performance mondiale, qu'il s'agisse d'entreprises privées ou d'organismes publics. Par ailleurs, des recherches sont en cours dans nos universités. De plus, des initiatives existent au niveau européen, comme au niveau mondial.

Sur le second point, il est nécessaire de procéder à une réforme de notre législation minière. Le code minier doit faire l'objet d'une profonde réforme, car il ne répond pas à la nécessité d'associer le public à la prise de décisions susceptibles d'affecter l'environnement, tel que le prévoient la Charte de l'environnement et la Convention dite d'Aarhus. Il est donc dans notre intérêt de procéder à une réforme d'ampleur du code minier. En ce domaine aussi, les conclusions des missions parlementaires, comme celles du conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies et du conseil général de l'environnement et du développement durable, contiendront sans nul doute des propositions.

Avec Jean-Paul Chanteguet, avec les commissaires de la commission du développement durable, et avec tous les collègues d'autres commissions venus nous rejoindre pour l'occasion, nous avons travaillé, au-delà de nos sensibilités politiques, afin de vous proposer aujourd'hui un texte qui nous semble respecter les règles en vigueur dans un État de droit, satisfaire l'émotion légitime qui anime nos territoires, prévoir les conditions d'une politique énergétique stratégique, et permettre la recherche scientifique.

C'est un texte d'équilibre. J'espère qu'il fera consensus. Et je m'attacherai, tout au long de cette soirée, à vous en convaincre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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