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Intervention de Sandrine Mazetier

Réunion du 10 mai 2011 à 15h00
Immigration intégration et nationalité — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandrine Mazetier :

Vous serez, monsieur le ministre, censuré par le Conseil constitutionnel.

Ce texte est aussi caduc du fait d'un récent arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne qui remet en cause la pénalisation et la carcéralisation du séjour irrégulier. Monsieur le ministre, vous prétendez que cet arrêt ne concerne que l'Italie, en aucun cas la France. Pourtant, l'article 73 du projet de loi prévoit bien une peine de trois ans d'emprisonnement pour toute personne qui se soustrairait à l'exécution d'une obligation de quitter le territoire français. Trois ans de prison pour cela… Il faut dire que vous n'en êtes pas à une contrevérité près. Il est vrai que sur un sujet qui est tout de même obsessionnel et compulsif pour cette majorité, et dont le Gouvernement prétend s'occuper avec beaucoup de sérieux, se sont succédé pas moins de trois ministres : M. Besson, M. Hortefeux et vous-même ; un exemple parmi d'autres de l'instabilité, de la fébrilité et de l'amateurisme de ce gouvernement, dans cette matière comme dans d'autres, et qui ne trompent personne. Le ministère de l'immigration a d'ailleurs lui-même disparu.

Depuis un an, on nous a expliqué tout et son contraire sur ce texte. Son adoption était impérative parce qu'il fallait transposer trois directives européennes, dont la directive « Retour », mais, fait exceptionnel dans cette législature, vous n'avez pas déclaré l'urgence. Si bien que, depuis décembre dernier, ce sont les dispositions de la directive « Retour » qui s'appliquent. Celles-ci prévoient un délai de départ volontaire de sept jours à trente jours avant l'éloignement forcé et, de ce fait, de très nombreuses procédures d'éloignement ont été invalidées par les tribunaux. Or plutôt que d'organiser le retour au droit, le respect de l'État de droit, vous organisez le désordre et la confusion dans le contentieux de l'éloignement. Les tribunaux administratifs seront, on le sait d'avance, complètement encombrés par ce contentieux de masse. Et c'est vous qui aurez provoqué une telle situation.

Vous prétendez lutter avec détermination contre l'immigration clandestine, mais la majorité, à l'Assemblée d'abord, puis encore en CMP, a établi l'impunité des employeurs de travailleurs sans titre. Là encore, les sénateurs ont résisté jusqu'en seconde lecture, avant de céder le 4 mai dernier.

Dans des temps ordinaires, votre politique ne règle rien en termes d'immigration parce que vous refusez d'examiner avec sérieux et objectivité le sujet à sa bonne échelle, et de résoudre les problèmes là où ils se posent. L'exemple de l'accord de gestion concertée des flux migratoires avec la Tunisie le démontre : il prévoyait l'arrivée, parfaitement légale, de 9 000 Tunisiens l'an dernier alors que le ministère de l'intérieur n'en a autorisé que 2 000. Or nous avons beaucoup de Tunisiens en situation irrégulière –l'actualité ne me dément pas, loin de là. Non, en temps ordinaire, ce texte et votre politique ne règlent rien en matière d'intégration. Mais ce n'était de toute façon pas le propos de ce projet que de traiter d'intégration et que d'agir en ce sens. Les Français ne s'y trompent pas : un récent sondage a montré qu'une majorité de nos concitoyens considèrent que, depuis dix ans, l'intégration s'est dégradée, c'est-à-dire depuis que Nicolas Sarkozy s'est emparé du sujet.

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