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Intervention de Philippe Vitel

Réunion du 12 avril 2011 à 15h00
Contrôle des importations et des exportations de matériels de guerre — Discussion d'un projet de loi adopté par le sénat

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Vitel, vice-président de la commission de la défense nationale et des forces :

…– rapport publié en 2006 –, le Gouvernement a eu la sagesse d'améliorer le dispositif. La construction européenne avance aussi dans le domaine de la défense, ce qui est à l'origine de la directive que nous allons transposer dans notre droit.

Ce projet de loi me semble bon. Il vise à faciliter l'application du principe d'interdiction d'exportation de la base de notre législation. Il hiérarchise les contrôles en fonction du matériel et des destinations ; cette approche par le risque me semble être une excellente politique. Il globalise le processus d'autorisation en incluant les opérations commerciales préalables, alors que, auparavant, les industriels devaient demander une autorisation à chaque stade du processus de vente, avec les risques d'incohérence et de contradictions que cela présentait. Enfin, il vise à responsabiliser les acteurs en renforçant les contrôles a posteriori, notamment par la création de registres et la désignation d'un responsable du respect de la réglementation au sein de l'entreprise, responsable qui doit être membre de ses instances de direction.

Le projet de loi prend en compte les progrès de la construction européenne, et cela me semble être un aspect essentiel. En effet, en matière de défense, la construction européenne s'est traduite par la multiplication des coopérations sur des programmes d'armement et par le développement d'entreprises multinationales européennes. Il nous faut donc impérativement faciliter les transferts de composants et sous-systèmes nécessaires à la fabrication des systèmes d'armes modernes.

Je suis convaincu que ce projet de loi renforcera à la fois la compétitivité de nos industriels et la capacité de l'État à s'assurer du respect de la législation par les différents acteurs concernés. Le projet de loi apporte des assouplissements aux règles applicables aux transferts de produits liés à la défense dans l'Union européenne chaque fois que cela est nécessaire par la création d'un système moderne de licence générale et de licence globale. Des assouplissements sont prévus, notamment lorsque les destinataires des équipements sont une force armée ou une institution publique, lorsque les équipements sont acquis par une organisation internationale, lorsqu'ils sont nécessaires à l'exécution d'un programme en coopération ou à une opération d'aide humanitaire. Enfin, un assouplissement a été apporté pour les exportations d'équipements nécessaires aux réparations et à l'entretien des matériels déjà vendus, ou pour être déployés dans des expositions internationales ou encore pour réaliser des démonstrations.

Les garanties ont été renforcées par les procédures d'évaluation de la fiabilité des entreprises.

Je constate que les sanctions sont suffisamment lourdes pour être dissuasives et que le régime d'autorisation préalable est maintenu dans le domaine spatial, extrêmement sensible, puisque les lanceurs spatiaux à capacité militaire sont un élément essentiel de la dissuasion.

J'en viens maintenant à la partie « marchés publics » du projet de loi. Comme nous le savons, la directive européenne de 2004 s'applique aux marchés publics passés en matière de défense, sous réserve de l'article 296 du traité, article visant à permettre aux États de protéger leurs intérêts essentiels de sécurité.

L'ouverture des marchés publics en matière de défense est certes une contrainte supplémentaire pour nos armées et pour nos industriels. Toutefois, il n'y a pas d'industrie compétitive sans concurrence. C'est pourquoi un refus d'ouverture de nos marchés de défense me semblerait incompatible avec nos engagements européens. Nos armées pourront acquérir leurs équipements à des prix plus compétitifs, ce qui, à une époque où il nous faut impérativement maîtriser les déficits publics, me semble particulièrement souhaitable. Par ailleurs, les défis technologiques liés à des besoins opérationnels de plus en plus complexes rendent plus que souhaitable une ouverture à la concurrence, laquelle est un véritable stimulant de l'innovation.

Nous sommes cependant d'accord, en Europe, pour que les États puissent limiter l'ouverture à la concurrence dès lors qu'il s'agit d'équipements de défense hautement sensibles par leur caractère stratégique. Je pense bien sûr à la dissuasion, mais aussi à la cryptologie. Naturellement, la question de savoir comment se définit un « équipement sensible » se posera et il me semble qu'un dialogue politique entre États européens et avec les institutions européennes doit être lancé le plus rapidement possible pour homogénéiser cette définition.

On estime que les deux tiers, voire les trois-quarts, de nos marchés de défense sont susceptibles d'être ouverts à la concurrence. Toutefois, il existe encore une part importante de nos marchés pour lesquels le ministère de la défense pourra refuser l'ouverture à la concurrence, ce qui devrait nous rassurer.

L'ouverture dans laquelle nous nous engageons comporte des garde-fous suffisamment sérieux. D'une part, les marchés dont la publicité conduirait à la publication d'informations intéressant la sécurité de l'État seront exclus de l'obligation de publication. D'autre part, les pouvoirs adjudicateurs pourront toujours écarter des candidats non membres de l'Union européenne. Cet enrichissement du projet de loi par nos collègues du Sénat me semble particulièrement bienvenu, en ce qu'il crée un embryon d'outil pour une préférence communautaire. En effet, si la préférence communautaire est souvent présente dans les discours politiques, il ne faut pas oublier qu'il n'existe actuellement aucune base juridique pouvant fonder une préférence communautaire.

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