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Intervention de Christiane Taubira

Réunion du 7 avril 2011 à 9h30
Accord france-brésil dans le domaine de la lutte contre l'exploitation aurifère illégale — Discussion d'un projet de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristiane Taubira, rapporteure de la commission des affaires étrangères :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nos travaux en commission des affaires étrangères furent extrêmement fructueux. Les députés présents étaient nombreux, les échanges denses. Il sera donc instructif de s'y référer. Par conséquent, je consacrerai ces dix petites minutes de prise de parole en séance plénière aux points qui méritent des éclaircissements et des précisions, après avoir fourni quelques repères qui donnent la mesure des enjeux de cet accord conclu par la France et la République fédérative du Brésil.

Signé le 23 décembre 2008, il comporte neuf articles, dont trois méritent quelques précisions de la part du Gouvernement.

Tout d'abord, l'article 1er définit les zones concernées. Le champ de l'accord est en effet limité aux « zones protégées ou d'intérêt patrimonial ». Elles comprennent « les territoires classés en parc national » dans chacun de ces deux pays. Le parc amazonien de Guyane couvrant une superficie de 3,4 millions d'hectares et le parc amazonien du Brésil, appelé Tumucumaque, une superficie de plus de 3,7 millions d'hectares, les surfaces concernées ne sont donc pas négligeables. S'y ajoute « une bande de 150 kilomètres », mais cela manque de précision : il ne nous est pas indiqué s'il s'agit de 150 kilomètres en longueur, sur un fleuve qui mesure, lui, plus de 370 kilomètres, ou de 150 kilomètres en profondeur des territoires respectifs des deux pays.

Cela dit, il importe de noter qu'il existe sur ces territoires qui ne sont pas négligeables, notamment en Guyane, tout un réseau d'espaces protégés, sous des statuts extrêmement différents, qu'il s'agisse des ZNIEFF, les zones naturelles d'intérêt écologique, de type I ou de type II, des arrêtés de protection de biotope, des zones humides, des espaces protégés, des réserves naturelles. Il y a donc toute une série d'espaces qui, a priori, ne sont pas inclus dans le champ de cet accord. Est-ce à dire que l'activité aurifère illégale serait finalement autorisée dans ces autres zones protégées ?

L'article 3 engage les deux parties à définir un régime interne complet, sur les conditions tant matérielles et financières que professionnelles d'accès aux titres miniers, sur les obligations de déclaration, de tenue de registre et de mise à disposition des registres auprès des autorités. Ces obligations pèsent sur les entreprises qui sont fournisseurs de matériel d'équipement ou de mercure. Il faut savoir que, depuis le mois de janvier 2006, le mercure est interdit en France. Au Brésil, il n'est pas interdit mais il est soumis à une stricte réglementation et son commerce est encadré dans le cadre du Global Mercury Project du programme des Nations unies pour le développement.

L'article 4 énumère les infractions à réprimer, les destructions n'étant considérées qu'en dernière instance.

L'article 5 appelle également des précisions de la part du Gouvernement. Il prévoit effectivement des formations communes pour les entreprises françaises et brésiliennes impliquées dans l'exploitation aurifère dans les zones protégées ou d'intérêt patrimonial. Il n'existe pas dans la législation française de disposition qui interdise cette activité dans ces zones, mais il serait très étonnant – cela tombe sous le sens – que le gouvernement français forme des entreprises pour qu'elles pussent se livrer à une telle exploitation dans ces zones. Je vous prie donc de nous apporter des précisions sur ce point. Même s'il n'est pas nécessaire de modifier le code minier, il faut probablement préciser des orientations en matière de politique minière.

Cet accord s'inscrit dans un cadre juridique général que je ne vais pas définir ; comme nous y avons travaillé en commission des affaires étrangères, il suffit de se reporter au compte rendu de nos travaux. Figure parmi les deux textes visés par l'accord la convention d'entraide judiciaire signée en 1996, qui a été élaborée sur le modèle de la convention européenne d'entraide judiciaire de 1959. Elle comporte donc les mêmes stipulations, avec les mêmes types d'exceptions, à ceci près que le délai de comparution immédiate n'est pas de cinquante jours mais de trois mois. L'autre texte est un accord de partenariat et de coopération signé en 1997.

Il faut savoir que cet accord est le pendant de celui conclu avec le Surinam. Cependant, le texte signé avec le Surinam est plus précis et prévoit des dispositifs opérationnels.

Retenons surtout que les gouvernements ont bien compris que c'est tout le plateau des Guyane qui est concerné que c'est à cette échelle que le travail doit être mené. Ainsi s'est tenu, au mois de mars 2010, un séminaire intergouvernemental regroupant la France, le Brésil, le Surinam et le Guyana. C'est donc bien à ce niveau que doit se coordonner la politique de lutte contre l'activité aurifère illégale, même si, à ce jour, il n'en est rien sorti de particulièrement remarquable.

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