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Intervention de Jean-Jacques Candelier

Réunion du 6 avril 2011 à 15h00
Garde à vue — Article 7, amendement 62

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Candelier :

En l'état du projet de loi, l'assistance de l'avocat est réduite à la portion congrue. L'alinéa 10 en offre une nouvelle preuve. Après avoir permis de différer de plusieurs heures l'arrivée de l'avocat, après avoir prévu de le remplacer au cas où celui-ci ne conviendrait pas à l'OPJ, l'alinéa 10 prévoit de reléguer ses interventions orales à l'issue des auditions et des confrontations. Quelle est l'utilité de l'avocat s'il ne peut intervenir pour défendre son client ?

En obligeant l'avocat à attendre la fin de l'interrogatoire, le texte rend sa présence quasi inutile. Durant l'audition, la personne mise en cause aura en effet eu tout le temps de s'incriminer elle-même sous la pression des enquêteurs. L'avocat ne pourra intervenir ni avant ni pendant l'audition pour préparer la défense de son client ou pour lui éviter de répondre aux questions biaisées et de contribuer à sa propre incrimination.

Il serait plus juste de permettre à l'avocat d'intervenir durant les auditions, d'autant que, dans bien des cas, le non-respect du délai de carence de deux heures en début de garde à vue aura empêché l'entretien préalable d'une demi-heure. Je rappelle que le paragraphe 32 de l'arrêt Dayanan contre Turquie de la Cour européenne des droits de l'homme établit que « la discussion de l'affaire, l'organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l'accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l'accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention sont des éléments fondamentaux de la défense que l'avocat doit librement exercer ». Vous le constatez, il ne s'agit pas uniquement de pouvoir poser deux ou trois questions à la fin de l'interrogatoire, quand les jeux sont déjà faits et que rien ne va plus.

En cette matière, on peut donc valablement s'interroger sur la conformité du présent texte avec la jurisprudence de la CEDH. Une nouvelle condamnation de la France est probable et d'autant plus vraisemblable que les questions posées par l'avocat pourront être refusées sans recours par l'OPJ, s'il estime qu'elles nuisent au bon déroulement de l'enquête. Ce critère est suffisamment large et vague pour englober à peu près toutes les interventions de l'avocat. En l'état du projet de loi, l'assistance de l'avocat est donc extrêmement ténue.

Le seul réel changement par rapport au dispositif actuel, déclaré inconstitutionnel, est la présence physique d'un conseil, toutefois privé d'accès au dossier, privé de possibilité de s'exprimer ou d'organiser réellement la défense de son client. Le progrès est bien mince !

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