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Intervention de André Chassaigne

Réunion du 30 mars 2011 à 10h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Les cosignataires de la proposition de loi ont à mes yeux un défaut rédhibitoire : ils sont libéraux. Le ministre de l'agriculture les a lui-même trouvés plus libéraux que lui, ce qui n'est pas peu dire !

Le texte s'inspire du moins-disant social que la droite entend imposer partout en Europe. Il attribue en effet la baisse de la production française et les difficultés de nos producteurs au seul coût du travail, c'est-à-dire aux cotisations sociales et patronales qui seraient trop élevées par rapport aux autres pays européens, faisant du dumping social une solution pour améliorer la compétitivité de nos produits agricoles. Les comparaisons en termes de protection sociale et de cotisations ne portent, dans l'exposé des motifs, que sur les pays de l'Union européenne, ce qui permet d'évacuer les causes réelles des difficultés de l'agriculture française, notamment l'augmentation sans précédent des importations de légumes et de fruits en provenance des pays extra-communautaires, les pays de l'Asie du Sud-est notamment, dans lesquels la protection sociale et les salaires sont encore plus faibles que dans l'Union européenne. En dix ans, les importations de carottes ont augmenté de 277 % et celles des légumes d'industrie, qui proviennent en majeure partie des pays extra-communautaires, de 66 %.

En se contentant de mesures d'exonération des cotisations sociales patronales pour tous les salariés du secteur agricole et forestier pour lutter contre les prix trop bas et contrecarrer les diktats des distributeurs industriels, le texte écarte toutes mesures contraignantes, du type coefficient multiplicateur, qui permettraient de garantir aux producteurs les prix d'achat.

La proposition de loi, c'est tout bénéfice pour la grande distribution ! Elle s'inscrit dans un transfert des cotisations du capital et du travail sur la consommation, l'article 2 prévoyant une contribution assise sur la grande et moyenne distribution, qui la répercutera automatiquement à la hausse sur les prix de vente ou à la baisse sur les prix d'achat aux producteurs. Une mini-TVA sociale s'imposera sur les produits de première nécessité, pénalisant les foyers les plus modestes.

Le texte, en ne prévoyant aucune contribution sur les résultats nets, exclut, de fait, le capital de la distribution et des industriels, ainsi que le secteur bancaire et assuranciel, de toute participation au financement de la protection sociale agricole. C'est un nouveau signal adressé aux géants de l'agroalimentaire, visant à valider leur stratégie de dumping social, d'accroissement de marge et de pression à la baisse des prix par l'ajustement des volumes d'importation.

Nul ne l'ignore : le bilan en termes d'emplois des abaissements de cotisations sociales dans tous les secteurs de l'économie est nul, alors même qu'ils assèchent une partie des ressources indispensables à la protection sociale. La gauche démocrate et républicaine ne votera donc pas une proposition de loi d'inspiration libérale, qui ne permet pas de résoudre les problèmes, comme l'a fort justement remarqué le ministre lui-même.

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