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Intervention de Nora Berra

Réunion du 3 mars 2011 à 15h00
Débat sur le fonctionnement de l'hôpital — Reprise de la discussion

Nora Berra, secrétaire d'état chargée de la santé :

Messieurs les coprésidents, mesdames et messieurs les députés, je voudrais, en premier lieu, remercier les coprésidents et l'ensemble des membres de la mission pour la qualité et la portée des travaux menés sur le fonctionnement de l'hôpital.

Je partage avec Xavier Bertrand votre souci d'améliorer la qualité du service médical rendu aux usagers et l'efficience des établissements de santé. C'est également notre ambition. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a souhaité apporter des réponses détaillées aux quarante-six propositions formulées.

Avant d'entrer dans les détails, je voudrais apporter une précision à M. Préel qui évoquait la proposition de loi portée par le sénateur Fourcade et parlait d'un texte portant sur l'hôpital. Cette proposition couvre en fait un champ beaucoup plus large que l'hôpital et vise à titre principal à favoriser la coordination des soins dans le secteur ambulatoire. Cela méritait d'être précisé.

S'agissant à présent de la qualité des soins, je rappelle qu'elle est la première attente des usagers et du grand public à l'égard du système de santé : elle doit être notre première exigence. Je veillerai plus particulièrement à conforter la confiance de nos concitoyens dans l'offre de soins. En effet, si notre pays est régulièrement bien classé sur la qualité des soins, des études françaises et internationales récentes montrent que des progrès peuvent encore être réalisés. Ainsi, l'amélioration des organisations et celle de la communication entre les professionnels pourront contribuer à une réduction des événements indésirables graves et évitables à l'hôpital comme en ville.

À cet égard, la loi HPST a renouvelé l'approche de la réglementation et de l'évaluation de la qualité des soins. Une logique de résultat fondée sur le respect d'exigences clairement identifiées est désormais développée. En faisant obligation aux établissements de produire une liste commune d'indicateurs et de les mettre à la disposition du public, la loi a posé les fondements d'une transparence accrue sur la performance des établissements. Le tableau de bord annuel de la lutte contre les infections nosocomiales s'est révélé un excellent levier de mobilisation des professionnels ; en 2011, seront rendus publics les résultats de chaque établissement notamment sur la tenue du dossier « patients », la prévention des troubles nutritionnels, la lutte contre la douleur, et ce sont au total douze indicateurs qui seront publiés. Vous le voyez, monsieur Mallot, l'évaluation de la qualité fait bien partie de nos priorités.

Sera également généralisé en 2011, « année des patients et de leurs droits », un indicateur de satisfaction des usagers hospitalisés en médecine, en chirurgie et en obstétrique. Cet indicateur devra être affiché dans les locaux des établissements de santé, sous peine de sanctions, à partir de 2012.

Une plus grande implication des usagers tout au long du parcours de soins est en effet un facteur d'amélioration de la qualité de l'offre de soins. Si les lois des 4 mars 2002, 9 août 2004 et 21 juillet 2009 ont consacré la reconnaissance des droits des patients ainsi que la place de leurs représentants dans l'élaboration des politiques de santé, l'enjeu des prochaines années sera de les faire vivre !

L'information des patients est un sujet crucial, au centre du programme « 2011, année des patients et de leurs droits », que j'ai lancé le 24 février dernier. Il faut en effet, comme vous le préconisez, madame Lemorton, mieux informer les patients sur l'organisation et sur les coûts des soins. Des propositions m'ont été faites et des rapports m'ont été remis. Tout cela sera débattu dans le cadre d'un colloque qui se tiendra demain. Je compte bien ensuite prendre des décisions, afin que ces propositions ne restent pas lettre morte.

L'amélioration de la qualité des soins suppose également d'éviter la multiplication des actes inutiles. Je partage totalement la vision d'Yves Bur et de Jean Mallot sur ce sujet. Veiller à la pertinence des actes tarifés pour éviter des volumes injustifiés est une nécessité si l'on veut s'assurer de la pertinence de la dépense, mais il y va surtout de la santé des patients. Il n'est pas acceptable en effet que des patients subissent des actes qui peuvent être invasifs sans être pour autant indispensables.

Je sais pouvoir faire confiance à l'engagement de tous les professionnels autour de cet objectif simple qui devrait nous réunir naturellement. Mais ils doivent être aidés dans cette démarche. Il appartient à la Haute Autorité de santé de mettre à leur disposition des référentiels de prise en charge en plus grand nombre et portant sur des natures de séjour plus représentatives qu'aujourd'hui sur un plan statistique. S'agissant du bilan national comparatif par région de la prévalence des actes, sa publication me paraît aller dans le bon sens. Je propose donc d'oeuvrer en ce sens.

Par ailleurs, il est de la responsabilité du ministère de la santé de favoriser la qualité de la prise en charge à travers la fixation de normes et de référentiels adaptés. Une réflexion est d'ailleurs en cours, en vue de refondre la réglementation relative au contrôle. Elle donnera lieu à un nouveau décret et une nouvelle instruction. L'objectif du Gouvernement est à la fois d'obtenir une plus grande proportionnalité entre les indus et les sanctions, ainsi qu'une plus grande harmonisation des pratiques des contrôleurs et des ARS. Je souhaite avancer rapidement sur ce sujet.

Le modèle de financement doit aussi y contribuer. La mission de l'État doit être d'inciter à élever le niveau moyen, en faisant en sorte que chaque établissement s'inscrive dans un processus d'amélioration continue de la qualité. Certaines expériences étrangères montrent qu'il est possible de créer un lien entre financement et qualité.

La prise en compte de cette dimension est aujourd'hui insuffisante, mais je souhaite vous faire part de perspectives prochaines. Une réflexion prospective a été engagée il y a plusieurs mois par mes services, réflexion à laquelle les différentes fédérations hospitalières sont associées. Il y a quelques jours a été arrêtée une méthodologie de travail, au terme de laquelle seront retenus les indicateurs sur lesquels sera assise la prise en compte de la qualité dans le modèle de financement.

Il s'agit à la fois de mécanismes incitatifs pour encourager les pratiques et les initiatives innovantes, mais ce sont aussi des sanctions en cas de non respect des standards de qualité. J'insiste sur ce point : la qualité ne se négocie pas, elle est un devoir pour les établissements de santé, et les tarifs de base des prestations hospitalières sont réputés permettre une prise en charge de haute qualité. Vous le voyez, ce dossier évolue favorablement depuis la remise de votre rapport.

De plus, pour atteindre cet objectif et pour accompagner les professionnels de santé dans leur démarche d'amélioration continue de la qualité, l'informatisation des processus de soins doit être accélérée, notamment dans les établissements de santé. Tout le potentiel des technologies de l'information n'a en effet pas encore été exploité, malgré les investissements importants engagés dans ce domaine. Le ministère de la santé s'est engagé à déterminer les axes prioritaires du développement des systèmes d'information hospitaliers. Ces systèmes devront répondre à deux objectifs essentiels : servir davantage la qualité et la sécurité des soins ; répondre aux enjeux de coordination et de partage d'informations au sein du système de santé.

Dans cette perspective, je souhaite porter avec Xavier Bertrand une stratégie nationale d'amélioration des échanges d'informations entre la ville et l'hôpital, notamment autour du déploiement du dossier médical personnel et de l'équipement des acteurs en systèmes d'information performants et articulés au service, notamment, du déploiement de la télémédecine.

Dans ces conditions, la progression constante des services rendus aux patients et, dans le même temps, l'amélioration des conditions de travail des personnels sont tout à fait conciliables avec une meilleure maîtrise des dépenses.

J'en arrive à présent à la performance des établissements de santé. Améliorer l'efficience des établissements de santé, c'est d'abord promouvoir des organisations rationnelles, tirant le meilleur parti des innovations technologiques et des moyens mis à disposition.

Je compte sur la mise en place d'une gouvernance rénovée et resserrée, et j'en appelle pour ce faire à une responsabilisation accrue de l'ensemble des acteurs : directeurs, présidents de commission médicale d'établissement, membres du directoire ou encore chefs de pôles, car le management est un levier essentiel de la performance.

Je mise également sur le déploiement de plusieurs outils de gestion budgétaires et comptables : la généralisation de la facturation individuelle, appelée de vos voeux de longue date et qui deviendra réalité en 2013 ; la préparation de la certification des comptes ; la refonte de la comptabilité analytique, comme vous le souhaitiez, monsieur Morange ; enfin, la définition d'une gestion patrimoniale rénovée avec un référentiel commun.

Sur le terrain, cet effort d'adaptation et de transformation est soutenu par l'Agence nationale d'appui à la Performance, l'ANAP. Celle-ci est chargée d'accompagner les établissements dans la mobilisation de l'ensemble des leviers du changement, notamment par la voie des « projets performance ». Il s'agit d'identifier les processus de soins – qu'il s'agisse d'urgences, de blocs opératoires ou de biologie – ou de gestion, comme les procédures d'achats ou de facturation, susceptibles d'être optimisés puis de contractualiser les résultats attendus et les modalités d'accompagnement entre l'ARS, l'ANAP et l'établissement.

L'ANAP est désormais positionnée comme le principal organisme d'appui à la performance. Je rappelle que dans un souci d'efficience et de lisibilité, elle a regroupé trois agences qui lui préexistaient : la MAINH, la MEAH et le GMSIH. Son premier programme annuel de travail en 2010 a comporté onze projets dont les « projets performance » dans cinquante établissements de santé.

Ce programme intègre également le déploiement d'organisations performantes en chirurgie, qui répond concrètement à l'une de vos propositions ; l'appui à la mobilité des professionnels et le développement de la gestion des ressources humaines ; le soutien des établissements dans la réussite de leurs projets de systèmes d'information.

Dans ce domaine, l'enjeu est également de renforcer la veille sur la performance des établissements. Il s'agit non seulement de mettre en place un suivi plus serré sur les recettes et les charges des établissements de santé, mais aussi de généraliser des indicateurs synthétiques à l'instar de ceux développés pour HospiDiag. Il s'agit de soixante-quatre indicateurs balayant le radar de la performance sur la productivité, les ressources humaines, la qualité et la sécurité des soins, les fondamentaux budgétaires et financiers. L'objectif est de créer les conditions d'un diagnostic partagé sur les résultats de chaque établissement et de susciter l'émulation grâce à une comparaison assise sur des définitions et des méthodes transparentes.

Conduire ces transformations au sein des établissements et entre les établissements est la seule voie pour atteindre l'objectif fixé par le Président de la République d'un retour à l'équilibre budgétaire en 2012, tout en garantissant le maintien d'un haut niveau de qualité des soins. L'accumulation des déficits constitue en effet un frein à l'investissement et à l'innovation au sein de l'offre de soins. C'est la raison pour laquelle les contrats d'objectifs et de moyens conclus avec chaque directeur général d'agence régionale de santé fixent pour 2011 un objectif de réduction des déficits des établissements publics mais comportent également des objectifs d'organisation des soins.

Le Gouvernement entend précisément favoriser les organisations de nature à améliorer l'efficience de l'offre de soins, tout en garantissant au patient qualité et sécurité. Le recours à l'hôpital doit être justifié, et les modalités de prises en charge doivent être adaptées aux besoins de chaque patient. Vous avez vous-mêmes souligné les progrès qui restent à accomplir pour promouvoir la chirurgie ambulatoire et l'hospitalisation à domicile.

Je souhaite revenir sur ces deux points.

Il est indispensable de mieux réguler l'activité des urgences hospitalières. Cela nécessite, en corollaire, de mieux organiser et de mieux garantir la permanence des soins ambulatoires. À cet effet, leur organisation a été confiée aux agences régionales de santé afin de donner plus de cohérence au dispositif. Je leur demande de parvenir à une meilleure adaptation à la diversité des territoires, et de diversifier, quand c'est possible, les réponses apportées aux demandes des patients, en associant l'ensemble des professionnels de santé.

Grâce à la coordination et à la coopération entre services d'urgences hospitalières et médecins libéraux, grâce aux maisons médicales de garde au sein, ou à l'immédiate proximité, des établissements de santé et, enfin, grâce à la prise en charge des transports vers les points fixes de garde, les ARS devront veiller à mieux répartir la prise en charge des demandes de soins non programmées.

Lorsque le patient requiert une prise en charge hospitalière, nous souhaitons résolument promouvoir les prises en charge ambulatoires

Ce défi est à portée de main dans le champ de la chirurgie ambulatoire. Il se traduira par un bénéfice qualitatif pour le patient, par une amélioration des rythmes de travail pour les médecins et pour tous les soignants, et par des coûts moindres pour la collectivité. Avec M. Xavier Bertrand, nous entendons donc lever tous les freins au développement de ce mode de prise en charge.

Le taux de chirurgie ambulatoire, qui s'élève actuellement à 36 %, doit augmenter significativement en se substituant à la chirurgie en hospitalisation complète, sans toutefois qu'il y ait création d'un effet d'aubaine et multiplication d'actes non médicalement justifiés. Ce développement sera soutenu par une politique d'incitation tarifaire volontariste qui fera l'objet d'une communication explicite auprès des différents acteurs.

Nous souhaitons aussi structurer, en région, une offre de soins de chirurgie ambulatoire efficiente, c'est-à-dire fondée sur une masse critique d'activité et sur une amélioration de l'organisation de l'amont et de l'aval de la chirurgie ambulatoire, en lien avec les soins de ville.

Le développement de la chirurgie ambulatoire a également pour objectif d'améliorer la qualité et la sécurité des soins au bénéfice des patients. En fait, il s'agit même son objectif principal. Nous veillerons donc à développer l'évaluation des pratiques et celle de la satisfaction des patients à partir d'indicateurs spécifiques. Une sensibilisation des patients et un accompagnement des établissements sont prévus, notamment grâce à la formation des professionnels.

En parallèle, il nous faut poursuivre l'essor de l'hospitalisation à domicile avec toute la détermination et l'exigence nécessaires.

Cette nécessité est dictée par les perspectives de vieillissement de la population et l'intérêt de centrer davantage les parcours de soins sur le domicile des patients, en particulier pour les pathologies chroniques.

En votant la loi HPST, vous avez contribué à une juste reconnaissance de l'activité spécifique d'hospitalisation à domicile, notamment en protégeant l'appellation « HAD ». Par ailleurs, plusieurs mesures récentes, comme l'accueil des internes ou la clarification des dispositions relatives à la gestion du médicament, permettent d'améliorer le service rendu par les structures d'HAD. Nous veillerons à l'aboutissement des études en cours sur l'évolution de son mode de financement, sur les groupes homogènes de tarifs, et sur les liens avec les types de prise en charge en chimiothérapie.

Une démarche plus globale reste cependant nécessaire pour une meilleure définition des indications du recours à l'HAD. En liaison avec les autres acteurs sanitaires et sociaux, l'objectif consiste à consolider la prise en charge continue des patients à leur domicile.

J'en viens maintenant à la dimension territoriale.

Les axes majeurs de l'organisation territoriale hospitalière seront déclinés dans les projets régionaux de santé des ARS, et tout particulièrement dans les schémas régionaux d'organisation sanitaire.

Ils nécessitent un diagnostic partagé sur le maillage territorial et, par conséquence, sur la formalisation d'un projet médical de territoire qui doit inclure les coopérations entre établissements de santé au sein de chaque territoire.

Au cours des années écoulées, certaines régions se sont attachées à définir et à faire vivre au sein de leur territoire une offre cible permettant à chaque établissement de mieux asseoir son propre projet médical. Les directeurs généraux d'ARS sont désormais invités à généraliser cette démarche. L'exercice est concret : il s'agit de prendre en compte le recours aux soins hospitaliers de la population domiciliée sur un territoire de santé, de s'assurer de la couverture de ses besoins par les établissements du territoire, ou des territoires voisins, et de veiller à une répartition équilibrée de l'offre de soins en évitant les doublons et la dispersion d'activités requérant des plateaux techniques.

Monsieur Morange, vous avez évoqué la situation du centre hospitalier de Poissy Saint-Germain. Jamais la DASS n'a relevé dans son rapport de fraude concernant les marchés publics. En revanche, elle a bien dénoncé une mauvaise gestion de l'établissement. Il n'y avait ni fraude avérée ni enrichissement personnel. Si tel avait été le cas, le procureur aurait été saisi…

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