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Intervention de Gaëtan Gorce

Réunion du 10 février 2011 à 15h00
Bioéthique — Article 14, amendements 69 96

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGaëtan Gorce, M :

Non, ce n'est pas suspect. Je connais Xavier Bertrand depuis des années et je suis sincère quand je parle des qualités dont je viens de l'affubler, même si, venant de quelqu'un de l'opposition, cela ne peut pas l'aider.

Cela étant, je regrette que le ministre fasse preuve d'une telle simplicité dans l'expression, pour ne pas dire de simplisme. En effet, le choix n'est pas entre le biologique et le social ou l'affectif, pour la raison que nous avons donnée tout à l'heure. On ne peut prétendre que permettre à l'enfant de connaître ses origines génétiques c'est faire le choix d'une parenté biologique puisque même le droit nous dit le contraire : cela ne changera rien. Et ce n'est pas parce que l'enfant connaîtra ses origines génétiques que cela changera quoi que ce soit dans les rapports qu'il entretient avec sa famille, dans la personnalité qu'il s'est lui-même constituée à travers cette histoire familiale, culturelle et sociale.

Considérer que le choix est entre le génétique et le social ou le culturel, c'est même renforcer l'idée que l'origine, la famille, la parenté, serait génétique ; c'est avoir peur de l'une au détriment de l'autre, donc penser que l'une serait plus forte que l'autre. Or, si un enfant devenu adulte demande à connaître ses origines, on peut considérer que les dix-huit ans minimum qu'il aura passés dans sa famille l'auront constitué de telle sorte que la révélation de son origine génétique ne viendra pas perturber ses rapports. Et si tel était le cas, pourquoi est-ce nous qui devrions décider qu'il n'a pas le droit de se placer dans cette situation ?

Quant à la question du donneur, là encore je ne saisis pas bien les arguments qui me sont opposés.

Lever l'anonymat sur les dons de gamètes, c'est permettre au donneur d'aller jusqu'au bout de son geste. Il ne s'agit pas de révéler des informations concernant un matériau génétique ou biologique qu'il faudrait qualifier et dont le statut poserait problème. L'acte de don n'est pas, n'est jamais neutre ; il l'est même moins que tout autre puisque le donneur sait qu'il va aider à concevoir et à produire la vie. C'est donc lui permettre d'aller jusqu'au bout de son don que de lui demander s'il souhaite faire la lumière, s'il autorise l'accès aux informations sur son identité figurant dans le dossier. D'une certaine manière, c'est valoriser, c'est anoblir son geste, c'est lui permettre d'aller au bout du cheminement qui a été le sien. Je ne pense pas que l'on fasse un don de gamètes en ignorant ou sans anticiper les conséquences de son geste. Raison de plus pour respecter la volonté du donneur, qui peut à tout moment, dès le don ou plus tard, s'opposer à ce que l'information soit communiquée.

Je trouverais extrêmement regrettable que, par son vote, l'Assemblée puisse laisser penser qu'elle a tranché dans une concurrence des identités. Il n'y a pas de concurrence des identités. Personne ne peut croire qu'une personne qui aurait demandé à connaître son origine génétique et qui aurait obtenu satisfaction verrait son identité personnelle remise en question. Cela ne se traduira pas dans le droit, qui, au contraire, nous protège. Refuser cette ouverture, c'est montrer que nous redoutons cette concurrence ; c'est, d'une certaine manière, prendre le risque de la valider.

Je me suis exprimé sur ce sujet pour faire vivre le débat, et au nom de deux de mes collègues, Patricia Adam et Aurélie Filippetti, qui n'ont pas souhaité intervenir à cet instant afin de nous conserver un peu de temps de parole pour d'autres questions importantes.

Je conçois parfaitement que l'on puisse arriver à des conclusions différentes des nôtres, mais il était utile que tous ces éléments soient produits et nous permettent de prolonger la discussion, car je ne crois pas que, en refusant la levée de l'anonymat, nous ayons réglé la question : elle sera sans cesse remise à l'ordre du jour, puisque nous avons la responsabilité d'encadrer les choses et de fixer le droit. Plus tôt nous le ferons et mieux ce sera.

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