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Intervention de Jean-Yves Le Déaut

Réunion du 9 février 2011 à 21h30
Bioéthique — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Yves Le Déaut :

Par mon propos sur l'article 1er, je souhaite illustrer ce que j'ai brièvement évoqué hier dans la discussion générale : si nous avons abordé cette question en 2004, des problèmes continuent de se poser, sans que le texte soit de nature à les résoudre.

En effet, l'article 1er traite du diagnostic d'une anomalie génétique grave et de la manière d'informer la famille via le médecin, l'article 2 des règles de bonne pratique en matière d'analyses médicales, l'article 3 des laboratoires autorisés, l'article 4 de la dénomination « empreintes génétiques ».

N'est donc pas traitée, monsieur le ministre, la question des tests génétiques par internet, qui se développent actuellement. L'article 16-11 du code civil fixe les conditions d'identification d'une personne par empreintes génétiques, que ce soit en matière judiciaire, médicale ou de recherche scientifique. Mais rien n'est dit, rien n'est fait à propos des tests sur internet.

J'ai fait une recherche très simple, en tapant « tests génétiques » sur un moteur de recherche. La toute première page obtenue indique : « Pour être absolument sûr, ne doutez plus ! Paternité, maternité, fratrie, autres tests ADN. Utilisez des échantillons discrets : salive, mégots, cheveux avec racine, sperme, sang, autre échantillon. Une seule qualité 99,9999 % pour un seul prix : 325 euros. Tests informatifs caractère privé. » Le site donne un numéro de téléphone français. C'est la négation de notre loi, qui encadre ces tests de conditions très strictes !

Tout à l'heure, à onze heures du soir, j'ai téléphoné au numéro indiqué. Ce laboratoire doit gagner beaucoup l'argent, car à cette heure tardive quelqu'un m'a répondu. J'ai demandé un test pour vérifier, de manière confidentielle, si une personne était bien de ma famille. Mon interlocuteur m'a répondu : « Pas de problème, monsieur. Envoyez-nous un échantillon et vous aurez les résultats dans les quatre jours, ou dans les deux jours si vous payez un peu plus cher. Ce résultat vous sera donné de manière confidentielle et privée. »

Ce site, vous l'avez, monsieur le ministre, sous les yeux. C'est tout de même incroyable, surtout quand on pense que nous allons discuter tout à l'heure de l'élargissement de ces tests !

J'ai demandé à mon interlocuteur où étaient réalisées les analyses. Il m'a répondu : en Allemagne ou en Espagne. Je lui ai fait remarquer que le numéro de téléphone était en France. Il me l'a confirmé, tout en me rétorquant qu'on avait le droit de téléphoner en France... Il a ajouté qu'un kit de prélèvement était d'abord envoyé au demandeur, puis les résultats.

Il semble donc que, dans ce projet de loi relatif à la bioéthique, l'on n'ait pas pris la mesure du phénomène.

Les conditions d'utilisation des tests ADN n'ont pas non plus été abordées. Un de nos collègues, aujourd'hui membre du Gouvernement, avait proposé que de tels tests puissent être effectués pour vérifier la réalité d'un regroupement familial, ce qui avait provoqué un tollé. Mais l'utilisation du fichier national des empreintes génétiques n'est pas davantage évoquée.

Réviser les lois relatives à la bioéthique sans aborder des questions aussi fondamentales, c'est passer à côté, je vous l'ai dit hier, monsieur le ministre, de pans importants de la réalité.

En citant cet exemple, j'ai voulu, de manière positive, démontrer la nécessité de travailler sur ces questions majeures d'ici à la seconde lecture. Je suis prêt à le faire avec le président de la commission spéciale et le rapporteur.

Il est impensable, alors qu'Internet mondialise notre société, que nous édictions des lois très strictes pour constater finalement que nous ne pouvons les faire respecter. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)

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