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Intervention de Nora Berra

Réunion du 9 février 2011 à 21h30
Bioéthique — Discussion générale

Nora Berra, secrétaire d'état chargée de la santé :

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je me réjouis de constater une adhésion d'ensemble aux principes auxquels je me référais hier : respect de la dignité humaine, refus de la marchandisation, droit à l'autonomie. Ces principes constituent le socle de nos valeurs républicaines, dont notre législation n'entend pas s'écarter, quelles que soient les pratiques qui se développent dans certains pays. Je pense en particulier à la rémunération des donneurs d'organes, de cellules ou de gamètes. L'affirmation de ces principes ne suffit évidemment pas à tout résoudre. De plus, tout le monde ne s'en fait pas la même idée ni n'est d'accord sur la meilleure façon de les concilier, mais c'est l'essence même de la démocratie.

Les débats sur ce projet de loi montrent, comme vous l'avez souligné, monsieur le rapporteur, à quel point les bons équilibres sont difficiles à trouver d'emblée, et combien l'écoute attentive et respectueuse des positions de chacun est absolument nécessaire pour cheminer vers les plus justes solutions. J'ai été très à l'écoute, mesdames, messieurs les députés, de vos contributions à cette discussion générale. Certaines évolutions présentes dans ce texte, d'autres qui n'y sont plus, font l'objet d'attentes indéniables au sein de la société civile : l'extension du don d'ovocytes et la levée de l'anonymat en particulier, ainsi que l'assouplissement des conditions d'accès à l'assistance médicale à la procréation. Nul ne peut prétexter que l'on ne répond pas favorablement à certaines aspirations concrétisées dans d'autres pays pour dire que ce projet de loi refléterait l'immobilisme et l'absence d'ambition. C'est en effet la méthode qui importe : la prise en considération de l'ensemble des points de vue, la pesée des risques, l'anticipation des différents impacts des évolutions considérées.

La méthode employée pour aboutir à ce projet de loi ne souffre aucune critique à cet égard : la multiplicité des instances consultées, les états généraux de la bioéthique, le travail exemplaire réalisé par votre commission spéciale en témoignent suffisamment. Le changement n'est pas une valeur en soi, surtout dans ce domaine si sensible de la bioéthique, qui concerne les débuts de la vie et l'intimité de chacun. Gardons-nous de céder aux injonctions hâtives de modernité. Nous avons besoin d'une évolution et non pas d'une révolution.

Je commencerai par la révision de la loi. Vous avez préconisé, monsieur Domergue, que l'on restaure une clause de révision. De même, vous avez souhaité, monsieur Jardé, garantir la continuité du débat public pour garantir la révision du texte en cas de nécessité. Votre préoccupation commune est de mieux garantir une réactivité adéquate du législateur en cas d'émergence de nouveaux risques en matière biomédicale. Surtout, vous craignez que ni le Parlement ni les citoyens ne soient suffisamment associés à la continuité de la réflexion sur ces risques et sur les adaptations qui en découleront nécessairement. Il est indispensable, j'en conviens, d'organiser la gouvernance de la vigilance bioéthique pour mieux garantir son efficacité. La démarche doit être précisée, et ses étapes jalonnées. Toutefois, il n'est pas nécessaire de rétablir une clause de révision périodique, pour les raisons que j'ai expliquées hier. Certes, l'édifice législatif, bientôt stabilisé, continuera de nécessiter des ajustements, et je suis en revanche tout à fait d'accord pour mettre en place un dispositif de transparence et de vigilance qui permette aux parlementaires et aux citoyens de conduire les réflexions nécessaires et de proposer des ajustements.

Concernant l'accès à l'assistance médicale à la procréation, le principe posé dans la loi me semble essentiel : l'AMP est d'abord une réponse médicale à un problème médical. Par ailleurs, s'agissant des techniques d'AMP, les intervenants ont presque tous exprimé leur attachement aux nouvelles techniques de congélation des embryons, qui devraient permettre de diminuer le nombre de surnuméraires, conviction que je partage évidemment. Nous aurons largement l'occasion d'aborder ce sujet lors de l'examen des amendements.

Par ailleurs, faut-il rétablir la possibilité de levée de l'anonymat qui figurait dans le projet de loi initial ? Cette question est certainement l'une des plus délicates. De nombreux intervenants, comme Michel Vaxès, Jean-Yves Le Déaut et Hervé Mariton, se sont exprimés contre la levée de l'anonymat, alors que d'autres, comme Patricia Adam etGaëtan Gorce, la souhaitent pour des raisons qu'ils ont parfaitement expliquées. Le Gouvernement ne souhaite pas revenir à la disposition initiale. L'intérêt de l'enfant n'est pas aisé à déterminer : d'un côté, la grande majorité des personnes issues de l'AMP ne demandent pas à accéder à leurs origines ; de l'autre, certains enfants devenus adultes sont confrontés à une souffrance persistante parce qu'ils ont besoin d'une transparence complète sur leur histoire.

Vous avez été nombreux à souligner les risques de dérives du diagnostic prénatal et l'impérieuse nécessité de renforcer l'information de la femme et sa bonne prise en charge lors du diagnostic initial, et c'est précisément à cet objectif qu'entend répondre l'article 9. Les craintes que se multiplient les interruptions volontaires de grossesse, soulignées par Hervé Mariton et Jean Dionis du Séjour, devraient donc être levées. Cet article encadre et organise la procédure de diagnostic prénatal, avec la préoccupation de donner à la femme une information claire et complète sur cette démarche et sur ses différentes étapes.

Il a par ailleurs été souligné, à juste titre, notamment par Bernard Perrut et par Véronique Besse, qu'il fallait encourager et rendre plus performante la recherche sur la trisomie 21. Il appartient à présent à chacun d'entre vous de vous prononcer sur les choix qui vous sont présentés.

Concernant le développement des tests génétiques réalisés dans des laboratoires non agréés ou à l'extérieur de la France, je partage pleinement le point de vue de M. Le Déaut, qui a insisté sur le danger que cela représentait.

S'agissant du don post mortem, Martine Aurillac a soutenu l'intérêt d'une telle possibilité, mais, j'y reste personnellement opposée et je pense ne pas être isolée dans cette attitude.

Sur le don d'organes, il existe un large consensus en faveur des dons croisés, et je m'en félicite. Il faut aussi, Bernard Perrut l'a évoqué, développer l'information des Français pour promouvoir le don d'organes de personnes décédées. Bien entendu, j'ai écouté les arguments développés par bon nombre d'entre vous sur cette question.

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