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Intervention de Patrick Bloche

Réunion du 9 février 2011 à 21h30
Bioéthique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche :

Il y a un demi-siècle, on imposait aux futurs parents la naissance d'enfants non désirés ; aujourd'hui, on veut continuer à interdire à des parents la naissance d'enfants désirés au prétexte que la procréation devrait rester pour l'éternité le fruit de la rencontre d'un homme et d'une femme.

Comment ne pas constater, à l'heure de la mondialisation et des sociétés ouvertes, que des pays proches culturellement ou géographiquement de la France font preuve d'une grande capacité d'innovation dans leur droit de la famille et d'une attention à la lutte contre les discriminations, sans que les fondements de la société s'en trouvent pour autant ébranlés ? Comment justifier, en ce domaine, une sorte d'exception française ?

Comment ne pas prendre la pleine mesure des évolutions des modes de vie familiaux provoquées par l'explosion du nombre des naissances hors mariage, désormais majoritaires, par la multiplication des recompositions familiales, par le choix d'élever un enfant seul ou avec un compagnon ou une compagne du même sexe, par le succès du pacte civil de solidarité, lequel a déjà répondu à l'attente d'un million de nos concitoyens ?

Comment continuer à privilégier de manière disproportionnée la dimension biologique de la filiation en la considérant comme une garantie de sécurité pour l'enfant ? L'existence de liens biologiques entre l'enfant et les adultes qui l'élèvent n'a pourtant jamais été l'assurance d'une bonne éducation.

Comment ne pas regretter, d'ailleurs, que notre conception de la protection de l'enfance repose encore aujourd'hui sur une idéologie du lien familial, et ne pas préconiser, dans l'intérêt de l'enfant, un recours plus fréquent à une famille d'accueil ?

Fonder la famille sur le lien biologique, c'est faire peu de cas de la souffrance des couples touchés par l'infertilité et avoir peu de considération pour leurs capacités à élever un enfant. C'est oublier trop rapidement toute une dimension de notre droit civil qui, par la possession d'état et la présomption de paternité, permet d'ancrer la filiation en dehors de liens biologiques, en confiant l'enfant à la personne qui l'élève et pas nécessairement à celle qui l'a conçu.

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