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Intervention de Jacques Le Guen

Réunion du 9 février 2011 à 15h00
Bioéthique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Le Guen :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je dois reconnaître que j'ai été très déçu en lisant le projet de loi. Je l'ai trouvé vraiment en retrait par rapport aux débats que nous avons eus lors des colloques et réunions auxquels j'ai pu participer au cours des deux dernières années.

Je regrette que l'attention de l'opinion publique se soit concentrée sur la levée ou non de l'anonymat du don de gamètes.

Je tiens à féliciter la commission spéciale pour son apport essentiel à ce texte.

Cependant, je regrette que la question de la gestation pour autrui n'ait pas trouvé de solution. Selon une enquête publiée par l'Agence de biomédecine, 53 % des Français considèrent que les mères porteuses devraient être autorisées en France ; 44 % croient même que c'est déjà le cas.

Certains pays ont légiféré sur la pratique de la gestation pour autrui en proposant des dispositifs d'encadrement. En Europe, l'Angleterre, la Grèce, la Roumanie, la Belgique, le Danemark et les Pays-Bas ne l'interdisent pas.

Il faudra, un jour, avoir le courage d'encadrer cette pratique. La France ne peut pas se contenter de prendre des mesures ponctuelles pour les enfants nés à l'étranger de mères porteuses.

Concernant les transplantations, en France, 14 000 malades sont aujourd'hui en attente d'une greffe d'organe, dont plus de 10 000 pour un rein. Sur 3 100 greffes de rein réalisées, seules 223 le sont à partir d'une greffe de donneur vivant. L'essentiel des reins prélevés proviennent donc de donneurs décédés. Je soutiens, bien évidemment, la mise en place du « don croisé », qui devrait permettre d'augmenter sensiblement le nombre de greffons.

Il ne faut pas éluder la question des greffons post mortem. Près d'un tiers des prélèvements possibles sont actuellement refusés par les familles. Il faudrait, dans tous les cas, réfléchir à un nouveau dispositif. Ne peut-on pas envisager de demander, de manière simple, à tous les Français majeurs d'indiquer, à l'occasion de la mise à jour de la carte Vitale, s'ils acceptent qu'on leur prélève un organe après leur mort ? Je soutiendrai les amendements qui iront dans ce sens.

Concernant la recherche sur l'embryon, je ferai deux observations.

D'abord, je constate que le moratoire de février 2006 accordant les dérogations à l'interdiction de la recherche sur l'embryon a pris fin il y a quelques jours. Aucune nouvelle autorisation ne peut donc être délivrée tant que le nouveau dispositif législatif sur lequel nous sommes en train de débattre ne sera applicable.

Plusieurs chercheurs se sont émus de cette situation. Il faut que l'Agence de la biomédecine retrouve rapidement ses prérogatives. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir nous rassurer sur ce point.

Ma seconde observation concerne le principe d'interdiction de la recherche sur l'embryon. Nous savons que la mise en oeuvre de la thérapie avec les cellules souches embryonnaires sera longue. Cependant, en retenant des critères restrictifs et en autorisant cette recherche pour une durée limitée, nous n'avions pas donné, en 2004, un bon signal à la communauté scientifique. Il me semble très important – et pas seulement pour éviter la fuite des cerveaux – de lui faire clairement passer le message que, même si des limites doivent être posées, nous sommes favorables à la recherche sur l'embryon.

La grande majorité des Français – 79 % d'entre eux – reste attachée à l'anonymat des dons de sperme ou d'ovocytes et à leur gratuité. Ce qui pose problème, ce n'est pas uniquement la question de l'anonymat du don de gamètes ; c'est le fonctionnement du dispositif actuel de ce don, notamment d'ovocytes, qui aboutit à une absence de donneuses en France.

La suppression de l'une des conditions actuellement imposées à ce type de dons, à savoir d'avoir déjà eu au moins un enfant, est un vrai progrès. Mais la réponse que nous apportons reste incomplète.

Depuis des années, de nombreux Français se tournent vers l'étranger. Des officines très lucratives se sont installées dans des pays où la loi est plus souple, voire inexistante, en ce domaine : la Grèce, l'Espagne, la République tchèque et la Roumanie font partie des pays les plus visités pour le don d'ovocytes. Nous savons que les procédures y sont moins contraignantes, moins exigeantes et plus rapides puisque les ovocytes ne manquent pas.

Il apparaît donc urgent de promouvoir l'information à ce sujet en France pour que la pratique du don d'ovocytes se développe dans notre pays.

Malgré les diverses critiques émises, je voterai ce texte car il comporte de réelles avancées pour la recherche et la santé de nos concitoyens. Je reste persuadé que nous serons capables d'apporter des solutions à toutes les difficultés.

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