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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 9 février 2011 à 15h00
Bioéthique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

Être médecin, c'est un compliment, surtout quand le médecin est bon ! Pour le reste, je vous laisse apprécier… On peut avoir des opinions différentes sur le sujet !

C'est l'humanité même de l'homme que les progrès de la science et de la technique questionnent. Il est urgent de déterminer si ces bouleversements scientifiques accroîtront la servitude des hommes ou, au contraire, garantiront leur liberté, c'est-à-dire leur « puissance d'agir ». C'est pour cela qu'il nous faut continuer, avec Diderot, à chercher « dans le mouvement des connaissances des raisons d'émancipation pour les êtres humains » et poser, avec Marx – ce ne sera pas un scoop si je vous dis que j'appartiens à la tradition marxiste – l'épanouissement de l'humanitas des hommes comme « seule fin de l'histoire ».

La révolution biomédicale bouleverse nos horizons car, comme le dit Lucien Sève, « le gain de liberté qu'elle nous promet accroît en proportion notre responsabilité ». Les avancées de la recherche et la volonté illimitée de puissance de certains hommes nous imposent de revenir, une fois de plus, sur les valeurs communes universelles qui fondent les règles de notre vie en société. Il nous faut réaffirmer solennellement les droits et libertés de l'homme et du citoyen – car, si j'ose dire, nous avons « de l'ancienneté » en la matière – consacrés par la Déclaration universelle des droits de 1789 et les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République. Il nous faut également rappeler le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 qui affirme « que tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés. ».

L'annonce, en 2002, par la secte Raël, de la naissance d'un premier bébé cloné, qui, heureusement, s'est révélée n'être qu'une supercherie commerciale, nous met en garde contre la démesure de nouveaux docteurs Frankenstein. En entendant hier certains propos, je me disais que certains, au nom de la liberté individuelle et du souhait de satisfaire des fantasmes personnels, étaient prêts à renoncer à ce qui fait le socle commun de notre vivre ensemble sur la base d'un héritage vieux de plus de deux siècles, qui fait certainement l'originalité de la société française et continue de favoriser son rayonnement aux quatre coins de la planète. Pour ce qui nous concerne, nous ne sommes pas prêts à y renoncer pour satisfaire les aspirations individualistes de quelques-uns.

Nous, élus de la nation, législateurs, devons, au-delà des clivages partisans, promouvoir les règles de fonctionnement qui permettent d'imposer et de pérenniser l'alliance subtile de la raison et du progrès. Nous devons réfléchir aux enjeux nouveaux de la recherche biologique et médicale afin, comme le dit Lucien Sève, « qu'en ses progrès soit respecté tout homme et tout l'homme ».

Les perspectives économiques ouvertes par les évolutions de la connaissance, la financiarisation de la biomédecine – 29,3 milliards d'euros de chiffres d'affaire pour Sanofi-Aventis et 1 300 postes supprimés dans la recherche et développement en 2009 – et la soumission idéologique de nos sociétés aux lois du capitalisme qui encouragent la marchandisation du corps humain, rendent notre mission essentielle et urgente.

Pour nous, c'est une grande satisfaction d'entendre des collègues, sur différents bancs, s'opposer à la marchandisation du corps humain. C'est formidable, me direz-vous, ils commencent à emprunter les chemins de la révolution idéologique ! Certes, certains de nos collègues doivent vivre avec des contradictions. Mais les contradictions sont un moteur, tout marxiste le sait, et ceux qui ne le sont pas peuvent le comprendre.

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