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Intervention de Charles édelstenne

Réunion du 2 février 2011 à 10h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Charles édelstenne, président–directeur général de Dassault aviation :

Je commencerai par faire le point sur la situation que nous connaissons depuis deux ans. La crise que nous avons vécue et que nous vivons encore a lourdement touché notre société, dont l'aéronautique civile représente 75 % du chiffre d'affaires. Nous avons dû affronter des résiliations massives de commandes d'avions Falcon – 163 en 2009 et quelques-unes encore en 2010 –, ce qui ne nous était pas arrivé lors des crises précédentes.

Pour y faire face, nous avons eu recours au chômage technique dans plusieurs de nos usines. Ces mesures ont pris fin l'été dernier. Par comparaison, nos concurrents ont licencié 30 000 personnes, aux États-Unis principalement.

Aujourd'hui, les ventes ont légèrement repris, comme le montre le marché des avions d'occasion qui est précurseur de celui des avions neufs. Dans ce marché mature, en effet, beaucoup de clients revendent des avions qu'ils possèdent déjà pour acheter un nouvel appareil. Pour autant, la croissance observée dans les pays émergents ne suffit pas encore pour atteindre le poids des marchés américain et européen qui restent moins dynamiques.

Les prévisionnistes estiment que le marché devrait revenir, à terme, aux alentours de ce qu'il était avant la crise et qu'il s'élèvera dans les dix prochaines années à environ 10 000 avions. On peut accorder une certaine crédibilité à ces chiffres et on peut considérer que 60 à 70 % de ces 10 000 appareils viendront remplacer les avions existants.

En matière militaire, notre cadence de livraison à l'État français est d'un avion Rafale par mois, ce qui est le minimum du point de vue industriel. Cette production, déjà anecdotique pour nous, l'est encore plus pour tous nos partenaires sous-traitants équipementiers.

Je voudrais également lever une ambiguïté au sujet des 800 millions d'euros apportés au programme, que la presse a présentés comme une « aide supplémentaire » accordée par l'État à Dassault – entreprise que l'on met toujours en avant lorsqu'il s'agit du Rafale, alors qu'une large part de l'avion est fabriquée soit par nos partenaires soit par nos sous-traitants. Il faut rappeler que le ministère de la défense et les industriels avaient convenu de ne pas descendre au-dessous d'une cadence d'un avion par mois. De plus, compte tenu des perspectives d'exportation et des contraintes budgétaires, il avait été prévu que la moitié de la cadence de production des avions exportés serait déduite de la cadence de production pour la France. La prévision budgétaire était fondée sur l'anticipation d'exportations qui ne se sont pas encore réalisées, si bien qu'il a fallu avancer le calendrier de livraison inscrit en programmation pour soutenir la production d'un avion par mois. Cela explique ce complément budgétaire de 800 millions d'euros auquel la presse a donné un large écho.

Pour ce qui est des perspectives d'exportations, la situation actuelle pourrait se résumer en une phrase : nous n'avons rien perdu, nous n'avons rien gagné. L'exportation d'un avion de combat, je le répète depuis longtemps, est un acte politique. Notre société est un instrument industriel dont la mission est de produire des matériels aussi bons que possible à des prix aussi compétitifs que possible. Mais la vente n'a jamais été, et est de moins en moins, un acte commercial pur : c'est un acte hautement politique qui traduit les relations entre les pays concernés.

Il y a trois ans, après la perte du marché du Maroc, nous n'avions plus aucun prospect. Aujourd'hui, nous en avons environ huit, et cela ne tient pas seulement à la qualité de nos vendeurs mais aussi à la volonté politique d'exporter des matériels militaires – pas exclusivement aéronautiques d'ailleurs. L'année 2010 a été très active avec de nombreuses campagnes de promotion et d'évaluation. Les équipes export de la société ont été très sollicitées, nous avons noué de nombreux accords de coopération industrielle et technologique, qui s'avèrent indispensables pour réussir l'export. Les chances de succès sont réelles, mais les négociations sont longues et restent soumises à des aléas politiques que nous ne maîtrisons pas.

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