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Intervention de Stéphane Demilly

Réunion du 18 janvier 2011 à 17h15
Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Demilly :

Le volet du Grenelle de l'environnement consacré au renouveau du transport fluvial considère comme prioritaire et structurant le projet de canal à grand gabarit Seine-Nord Europe. Je m'en réjouis, car ce dossier, que je suis depuis longtemps, est non seulement une avancée majeure dans le domaine du transport durable, mais aussi un « accélérateur » pour le développement économique des régions concernées.

J'appelle cependant votre attention sur l'urgence qu'il y a désormais à lancer la procédure de dialogue compétitif pour ce projet. Le président de Voies navigables de France (VNF), Alain Gest, ici présent, ne peut que s'associer à mes propos. Le 20 septembre 2010, votre prédécesseur Jean-Louis Borloo déclarait au journal Les Echos : « nous allons lancer dans les prochains jours (…) le canal Seine-Nord Europe. » Auditionné le 5 octobre par notre commission sur les décrets d'application de la loi Grenelle II, son directeur de cabinet Jean-François Carenco envisageait lui aussi le commencement prochain du dialogue compétitif, après d'ultimes échanges avec les collectivités contributrices. L'association Seine-Nord Europe a pour sa part souligné il y a quelques semaines les risques qu'il y aurait à différer cette phase au motif que le bouclage financier ne serait pas totalement finalisé.

Prolonger le statu quo porterait un coup fatal à la crédibilité du projet, d'autant plus que les conseils régionaux de Picardie et du Nord-Pas-de-Calais ont voté le 17 décembre leur participation au financement du projet, et que les modalités de gouvernance et de financement des plateformes multimodales ont fait l'objet d'un accord entre toutes les parties.

Je m'inquiète donc de ne pas avoir vu figurer le canal Seine-Nord dans la dépêche AFP du 16 janvier reprenant les annonces de Mme Lagarde sur les 60 milliards d'investissements prévus d'ici 2020 sur des projets en partenariat public-privé. Pouvez-vous nous indiquer précisément quand la procédure de dialogue compétitif sera lancée ?

Ma deuxième question concerne la filière photovoltaïque française. Après avoir décidé cet été de diminuer les tarifs d'achat de l'électricité solaire, puis, en septembre, de réduire de moitié le crédit d'impôt pour l'installation d'équipements photovoltaïques, le Gouvernement a suspendu pour trois mois, le 10 décembre dernier, la possibilité de conclure un contrat d'achat d'électricité photovoltaïque pour les projets supérieurs à 3 kilowatts. Ces trois décisions ont fait l'effet d'une douche froide chez les professionnels du solaire et chez tous ceux qui nourrissaient des projets dans ce domaine. Certes, le secteur est victime de son succès, et il convenait d'éviter les effets d'aubaine. Mais comme toute filière industrielle – je pense aussi à celle des biocarburants – elle a besoin d'un cadre réglementaire et fiscal clair et stable. Ces changements sont déstabilisants, d'autant qu'elle est loin d'être saturée dans notre pays.

De nombreux agriculteurs voient leurs projets en ce domaine, parfois très avancés, bloqués par ces décisions. Je vous ai d'ailleurs écrit récemment pour vous exposer un cas de ma circonscription dont la situation économique met en péril jusqu'à la pérennité de l'exploitation : l'agriculteur a obtenu ses prêts bancaires et passé ses commandes juste avant le 10 décembre. Je vous le dis sans détours, ces brusques revirements sont inacceptables.

J'en viens à la chasse. Dans l'esprit du Grenelle, le Gouvernement a lancé une table ronde réunissant les représentants des chasseurs et des associations de protection de la nature. Les chasseurs ont placé de grands espoirs dans cette démarche, qui aurait pu permettre de mettre fin à des années de guérilla anti-chasse. Ils sont hélas très déçus et mécontents. Qu'il s'agisse de la question symbolique des dates de chasse aux oiseaux migrateurs ou des autres dossiers, ils ont le sentiment d'avoir été dupés et victimes d'arbitrages défavorables. Je crains que la confiance ne soit brisée, et je le regrette : la cause de la protection de la nature ne sortira pas renforcée d'un affaiblissement organisé des chasseurs. Quels messages souhaitez-vous leur adresser aujourd'hui ?

Enfin, j'aimerais vous parler de ce qui m'apparaît comme un pied-de-nez : la décision de la Fédération internationale de football (FIFA) du 2 décembre d'attribuer au Qatar l'organisation de la coupe du monde 2022. En-dehors de toute considération sportive, cette décision me semble irresponsable d'un point de vue écologique. Au moment même où les pays du monde entier étaient réunis à Cancún sous l'égide de l'ONU pour essayer de trouver des solutions collectives au réchauffement climatique, la FIFA a donné son feu vert à ce qui sera sans nul doute le plus grand gaspillage énergétique de l'histoire du sport !

La coupe du monde a lieu en juin, période où la température peut dépasser les 50 degrés dans le Golfe persique. Cela n'a visiblement pas troublé la FIFA, qui s'est satisfaite du souhait des organisateurs de climatiser les stades et les terrains d'entraînement. En clair, il faut imaginer douze stades – dont neuf construits pour l'occasion – climatisés artificiellement à une vingtaine de degrés alors qu'il en fait près de trente de plus à l'extérieur. Nul besoin d'être ingénieur en génie climatique pour mesurer la consommation énergétique que cela représente, quand bien même les organisateurs nous assurent qu'ils n'utiliseront que des sources renouvelables. Au train où vont les choses, on organisera bientôt les Jeux olympiques d'hiver au Sahara !

Derrière ce cri du coeur, il y a une question simple : comment faire pour que les décisions quotidiennes concernant notre planète soient conformes aux engagements pris dans les sommets mondiaux ?

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