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Intervention de Michel Vaxès

Réunion du 19 janvier 2011 à 15h00
Garde à vue — Article 1er, amendements 136 137 149 84

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Vaxès :

Tout le monde en convient, il faut impérativement réduire le nombre de gardes à vue. C'est ce que prescrivait le Conseil constitutionnel dans sa décision du 30 juillet 2010 : « Considérant que ces évolutions ont contribué à banaliser le recours à la garde à vue, y compris pour des infractions mineures ; qu'elles ont renforcé l'importance de la phase d'enquête policière dans la constitution des éléments sur le fondement desquels une personne mise en cause est jugée ; que plus de 790 000 mesures de garde à vue ont été décidées en 2009 ; que ces modifications des circonstances de droit et de fait justifient un réexamen de la constitutionnalité des dispositions contestées ;… ».

La limitation du champ de la garde à vue aux crimes et délits sanctionnés de peines de prison est illusoire. Comme le soulignent aussi bien la Commission nationale consultative des droits de l'homme que le vice-bâtonnier du barreau de Paris, Jean-Yves Le Borgne, très rares sont les délits non punissables d'une peine d'emprisonnement. Par conséquent, si le texte reste en l'état, le chiffre de 800 000 gardes à vue annuelles risque d'être au mieux maintenu, sinon dépassé. Les syndicats de policiers eux-mêmes ont souligné qu'il était aujourd'hui extrêmement rare de placer un suspect en garde à vue lorsque celui-ci n'encourt aucune peine d'emprisonnement, et que la nouvelle formulation ne changerait donc rien à la pratique actuelle.

Comment expliquer l'explosion du nombre des gardes à vue alors que M. Hortefeux, s'appuyant sur les statistiques – dont on pourrait au demeurant beaucoup discuter –, ne cesse de dire que la délinquance est en baisse ? La délinquance est en baisse, mais la garde à vue est en hausse : voilà une contradiction qu'il faudrait nous expliquer. Chaque semaine, les exemples affluent de gardes à vue de vingt-quatre heures pour des motifs dérisoires. Les moyens de la police et de la gendarmerie, en baisse du fait de la politique d'austérité budgétaire du Gouvernement, sont ainsi mobilisés par les gardes à vue à répétition, y compris pour de simples infractions au code de la route ou de bagarres entre enfants.

Comment justifier ces milliers de gardes à vue annuelles pour des délits mineurs, alors que, dans bien des cas, les personnes concernées ne contestent même pas les faits qui leur sont reprochés ? Que dire, en plus, des personnes convoquées qui se rendent de leur plein gré au commissariat et qu'on enferme aussitôt qu'elles arrivent ?

Le critère des crimes et délits susceptibles d'entraîner trois ans de prison est, à ce titre, un filtre tout à fait minimal. En plus de ce filtre, il conviendrait de changer radicalement la doctrine de l'ex-ministre de l'intérieur et de l'actuel qui préside encore aujourd'hui, hélas ! à l'intervention policière, de rompre avec la politique du chiffre et du prétendu résultat, d'en finir avec les indicateurs de performance qui poussent les policiers à recourir à la garde à vue et d'augmenter les moyens et les effectifs partout où c'est nécessaire. C'est le sens de notre amendement, par lequel nous proposons de porter à trois ans la peine minimum encourue pour pouvoir prononcer une garde à vue.

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