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Intervention de Laure de La Raudière

Réunion du 13 janvier 2011 à 21h30
Adaptation au droit de l'union européenne en matière de santé de travail et de communications électroniques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaure de La Raudière, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques :

Madame la présidente, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, la commission des affaires économiques s'est saisie pour avis de l'article 11 du projet de loi visant à habiliter le Gouvernement à transposer sous forme d'ordonnance le troisième « paquet télécoms », adopté le 25 novembre 2009, et qu'il est nécessaire de transposer avant le 25 mai 2011 sous peine de sanctions.

Même si le contenu de ce troisième « paquet télécoms » est important pour le secteur des télécommunications, il ne me semble pas pour autant injustifié de légiférer par ordonnance.

En effet, les sujets sont majoritairement techniques, les deux directives à transposer comportent un très grand nombre de modifications, puisqu'elles comptent respectivement 33 et 26 pages ! L'essentiel de la transposition consiste à répliquer en droit français les nouvelles dispositions de droit européen, ce qui justifie le recours à l'ordonnance.

Mes chers collègues, je me permets aussi de vous rappeler que le Gouvernement a été très transparent dans sa démarche : un avant-projet a été mis en consultation publique en mai 2010. Peu de remarques structurantes ont été effectuées par les acteurs. Vous trouverez dans mon rapport le tableau de concordance entre la directive et l'avant-projet d'ordonnance.

Par ailleurs, je tiens à remercier le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique d'avoir tenu l'engagement pris lors de l'examen de l'article 11 en commission des affaires économiques de nous transmettre le projet d'ordonnance stabilisée avant l'examen en séance.

Par rapport aux questions soulevées en commission, nous ne pouvons que nous réjouir de la rédaction retenue par le Gouvernement concernant l'extension du pouvoir de règlement des différends de l'ARCEP aux conflits entre opérateurs et fournisseurs de contenus, au sens large, c'est-à-dire même si les fournisseurs de contenus n'ont pas de lien commercial direct avec l'opérateur.

Nous notons aussi avec intérêt la disposition introduite à l'article 44-3 pour donner à l'ARCEP la faculté de saisir le président du TGI de Paris pour faire bloquer un numéro surtaxé utilisé à des fins frauduleuses. Cela nous paraît tout à fait intéressant.

Les autres modifications apportées à l'ordonnance me paraissent justifiées eu égard aux répartitions de compétence entre la DGCCRF et l'ARCEP, ou encore entre l'ANFR et l'ARCEP. Quelques autres modifications de forme ou de cohérence ont été apportées.

Voilà, mes chers collègues, l'éclairage que je voulais vous apporter après la lecture du projet d'ordonnance que nous avons reçu il y a quelques jours.

Je voudrais maintenant aborder le sujet de la neutralité des réseaux, en partie couvert par le projet d'ordonnance, mais pas complètement.

L'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen affirme « la libre communication des pensées et des opinions ». Quel support aujourd'hui respecte mieux ces principes qu'Internet ?

Aussi devons-nous oeuvrer pour préserver les formidables avancées sociétales que représente Internet : démocratisation de l'accès au savoir comparable à ce que fut en son temps la révolution de l'imprimerie ; commercialisation universelle des produits et services ; promotion facile de nouvelles idées ; participation des citoyens aux débats politiques ; diffusion rapide des nouvelles technologies ; développement économique des PME.

Tous ces enjeux méritent que l'on crée certaines règles pour préserver l'internet universel, immense bien collectif, qui ne doit pas être transformé au gré des intérêts de ses différents acteurs en plusieurs internets, l'internet d'Orange ou de Bouygues, l'internet de SFR, ou encore le Free internet. C'est un objectif politique, économique et de société.

Aussi, si l'on peut considérer comme acceptable, pour des raisons techniques et objectives, que les acteurs puissent gérer de façon différenciée certains flux, qu'ils soient opérateurs ou fournisseurs de contenus, encore faut-il que cela se fasse dans des conditions transparentes et non discriminatoires.

De même, s'il faut être conscient que les opérateurs doivent pouvoir offrir des services gérés, dans le cadre d'offres commerciales spécifiques, cela va de pair avec l'obligation de fournir une offre internet de qualité, permettant l'accès à tous les services et applications internet.

Plus que jamais, le travail du législateur va se situer au point d'équilibre entre la nécessité absolue de garantir un accès à internet neutre et universel et la nécessaire liberté d'entreprendre et d'investir : autant d'intérêts parfois antagonistes qu'il convient de réguler avec doigté.

Le but du débat qui s'engage dans un climat très passionné, c'est de trancher un noeud gordien : nous allons devoir prendre des décisions aux conséquences bien plus lourdes que les discours techniques ne le laissent supposer.

C'est tout l'objet de la réflexion de la mission d'information sur la neutralité d'internet et des réseaux de la commission des affaires économiques, que je copréside avec Corinne Erhel.

J'ai souhaité ouvrir le débat aujourd'hui sur ce sujet par le biais de deux amendements, même si je reconnais volontiers que le calendrier n'est pas forcément idéal au vu du travail non achevé de la mission de la commission des affaires économiques, mais aussi de la Commission européenne, dont on attend prochainement un livre blanc sur la neutralité des réseaux.

Je ne voudrais pas terminer mon propos sans évoquer l'amendement gouvernemental proposant d'instituer un commissaire du Gouvernement auprès de l'ARCEP. Cet amendement déposé mardi émeut beaucoup de personnes, car elles craignent qu'il puisse entacher l'indépendance de l'ARCEP. Certains osent même parler de mise sous tutelle. Je me demande s'ils ont bien lu l'amendement proposé : les pouvoirs du commissaire du Gouvernement sont très limités et, en aucun cas, ne portent atteinte à l'indépendance de l'ARCEP.

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