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Intervention de Françoise Briand

Réunion du 7 décembre 2010 à 21h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2010

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Briand, rapporteure pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées :

À titre de comparaison, le coût unitaire d'un soldat engagé en Afghanistan est de 122 000 euros par an alors qu'il n'est que de 66 000 euros au Liban.

Concernant les recettes exceptionnelles, il n'a pas été possible de respecter le calendrier initial, ni pour la vente des emprises, ni pour la cession des fréquences. L'article 11 ajuste les recettes des comptes d'affectation spéciale en conséquence. Il ne s'agit pas d'annulations au sens strict mais plutôt d'un décalage : les recettes sont bien réelles, elles n'interviendront que plus tard. En attendant, le ministère a obtenu des mesures compensatoires, notamment avec l'autorisation de consommation de reports de crédits.

Les articles 39 et 40 du projet concernent quant à eux la SNPE et l'A400M.

Depuis l'autorisation de privatisation accordée par la loi de programmation militaire, les négociations ont abouti entre la SNPE et Safran qui veut acheter la SNPE-ME, ses filiales majoritaires et ses participations dans Roxel et Regulus. L'objectif de Safran est de poursuivre l'activité pour constituer un pôle français unique dans le domaine de la propulsion solide. Il n'est nullement question d'une réorganisation de la filière ou de la fermeture de sites.

La plupart des emprises concernées par cette cession sont des sites pyrotechniques fortement pollués. L'État ne peut se dédouaner de ses obligations environnementales en tant qu'exploitant historique. Safran ne peut pas non plus accepter de reprendre gratuitement ce passif environnemental et les risques associés.

Safran souhaitant continuer l'activité actuelle, les coûts de dépollution ne sont que potentiels. Il ne faudra engager de telles opérations que si l'environnement réglementaire change drastiquement ou si la France renonce à la propulsion solide, c'est-à-dire si nous abandonnons les missiles balistiques et les programmes spatiaux, ce qui ne me semble pas très réaliste.

Pour couvrir ce risque éventuel, la SNPE a accordé une garantie à Safran : si Safran est contraint de dépolluer, la SNPE paiera, dans la limite de 216 millions d'euros. Je précise que cette garantie ne pourra pas être mise en oeuvre si Safran décide de réorganiser ses unités.

La SNPE devrait conserver en trésorerie une somme correspondant à cette garantie, ce qui n'est pas pertinent en termes de gestion des entreprises publiques. Pour éviter cette charge de trésorerie inutile, l'article 39 prévoit que l'État accorde une garantie de 216 millions d'euros à la SNPE. La société ne pourra la faire jouer que si Safran fait jouer sa propre garantie.

Ce mécanisme est pertinent et raisonnable. Pertinent, car il évite d'immobiliser inutilement des sommes conséquentes sur le compte de la SNPE. Raisonnable, car la garantie est limitée à 216 millions d'euros et uniquement jusqu'au 1er janvier 2052. Au-delà de cette date, on peut en effet considérer que la responsabilité historique de l'État s'efface devant la responsabilité de l'exploitant.

L'article 40 met en place un autre système de garantie pour assurer le financement de l'A400M. Le 5 mars dernier, les clients et EADS sont parvenus à un accord qui prévoit, outre l'augmentation de 10 % du coût du programme et le renoncement aux pénalités de retard, que les États accordent à l'industriel une avance remboursable de 1,5 milliard d'euros appelée export levy facility. Comme l'a indiqué le délégué général pour l'armement devant la commission de la défense, cette avance sera remboursée sur l'export : à chaque appareil vendu, EADS reversera une somme, ce versement augmentant au fur et à mesure de l'avancement des exportations.

La France pourrait accorder cette avance remboursable sur ses fonds propres et la transformer en dépense budgétaire. Ce ne serait cependant pas satisfaisant car cela reviendrait à inscrire dans le budget de l'État une dépense qui n'en est pas une puisqu'il s'agit d'une avance remboursable. Par ailleurs, certains de nos partenaires, comme l'Allemagne, préfèrent recourir à un intermédiaire pour ce type d'opérations. La France a donc demandé à la Caisse des dépôts et consignations d'intervenir : la Caisse va avancer 417 millions d'euros à EADS et percevra les remboursements d'ici le 1er janvier 2041.

La Caisse n'étant pas partie prenante au contrat, elle n'a pas à supporter le risque d'un tel projet. L'article 40 prévoit donc que l'État garantit à la CDC le remboursement de l'avance. En couvrant le risque de l'exportation, la France marque sa confiance dans le programme et envoie un signal positif très fort à tous les clients potentiels. La prise de risque est mesurée car les hypothèses sous-jacentes sont très raisonnables, avec une estimation de 250 à 300 appareils exportés.

Le projet de loi de finances rectificative respecte donc parfaitement les grands axes de la programmation militaire, montrant bien que la défense reste un domaine stratégique qui doit être préservé, même en période de crise.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à suivre l'avis favorable de la commission de la défense et à adopter ces cinq articles. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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