Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Marc Peschanski

Réunion du 1er décembre 2010 à 14h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Marc Peschanski, directeur de recherche à l'INSERM :

Je laisserai Philippe Menasché vous répondre pour ce qui concerne l'encadrement et la thérapie cellulaire. J'évoquerai, pour ma part, la situation des industriels de la pharmacie. Sollicités l'an dernier par le Gouvernement dans le cadre des États généraux de l'industrie, ils ont clairement cité, dans le rapport élaboré sous la direction de Jean-Luc Bélingard, alors président du groupe IPSEN, la médecine régénératrice comme l'un des trois axes envisageables de réindustrialisation dans un secteur industriel en pleine révolution. L'industrie pharmaceutique ne se fonde plus aussi largement sur la chimie que par le passé, d'autres méthodes étant utilisées pour mettre au point les molécules. La possibilité de produire aujourd'hui en quantité illimitée des cellules souches embryonnaires capables de se différencier en tous les tissus du corps humain ouvre des perspectives tout à fait nouvelles à cette industrie. Les indications de la thérapie cellulaire vont s'élargir considérablement alors que jusqu'à présent, elle n'a été expérimentée que dans quelques cas – quinze greffes de cellules souches, pas davantage, ont ainsi eu lieu en France sur des malades atteints de la maladie de Parkinson et quelques autres sur des malades atteints de la chorée de Huntington. On n'imaginait pas alors que cette thérapie pourrait un jour concerner des dizaines, voire des centaines de milliers de personnes. De toute façon, l'accès aux cellules souches embryonnaires était si limité que cela empêchait tout développement à grande échelle. Aujourd'hui, il n'est plus utopique de penser traiter par thérapie cellulaire des maladies aussi différentes que la dégénérescence maculaire, les complications cutanées des patients atteints de diabète ou de drépanocytose, et même les simples ulcères veineux. Ces développements thérapeutiques ne seront toutefois possibles que si les industriels investissent dans ce domaine car les laboratoires académiques ne pourront jamais fournir assez de cellules pour traiter tous les patients potentiellement concernés.

Les industriels de la pharmacie voient dans la thérapie cellulaire un axe important de développement, ils l'ont dit lors des États généraux de l'industrie. Ils sont également intéressés par les cellules souches embryonnaires pour les études de toxicologie prédictive.

Ces études se heurtent aujourd'hui à deux difficultés. La première est que la toxicité d'une substance diffère beaucoup d'un tissu et d'un organe à l'autre. Or, nous ne disposons pas en laboratoire d'un échantillon de l'intégralité des tissus et organes humains, Ainsi, un laboratoire qui souhaite tester la toxicité hépatique d'une molécule sur un hépatocyte humain en est-il réduit à travailler sur des lignées de cellules tumorales, dont le comportement représente nécessairement mal celui des hépatocytes de l'individu sain. Les cellules souches embryonnaires permettraient précisément de fabriquer en quantité illimitée des cellules spécialisées – de foie, de rein, de coeur, de muscle, neurones… – utilisables pour tester la toxicité des médicaments. Cela révolutionnerait les méthodes de travail de l'industrie pharmaceutique.

L'autre difficulté pour évaluer la toxicité d'un produit chez l'homme tient à l'insuffisance du modèle animal. L'exemple à la fois le plus connu et le plus tragique est celui de la thalidomide. Bien que cette substance ait été parfaitement testée chez tous les animaux nécessaires avant d'obtenir son autorisation de mise sur le marché, son utilisation chez l'homme n'en a pas moins été à l'origine de très graves malformations. Je cite cet exemple, mais il y en a d'autres.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion