Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Didier Rebut

Réunion du 17 novembre 2010 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Didier Rebut, professeur à l'Université Paris II Panthéon-Assas :

Les récents arrêts de la Cour de cassation s'inscrivent tout à fait dans cette perspective. La Cour reprend bien évidemment les critères de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et ceux de la jurisprudence européenne, puisqu'il s'agissait d'examiner la conformité des règles de la garde à vue au droit européen. Se référant à la notion d'assistance effective, elle considère que l'assistance prévue par le droit français est aujourd'hui insuffisante. La décision du Conseil constitutionnel s'appuie sur la même notion, ce qui montre bien la pression exercée par la Cour européenne des droits de l'homme sur les deux juridictions françaises. On peut dire que les trois juridictions vont désormais dans le même sens : l'assistance de l'avocat doit être prévue dès la première heure.

Le récent arrêt de la CEDH, où il est clairement fait mention de l'« assistance pendant les interrogatoires », me semble mettre fin au débat sur le sens à donner au mot « assistance », débat à la faveur duquel certains voulaient repousser le moment où l'avocat est effectivement présent. Je ne vois pas comment cette assistance pendant les interrogatoires pourrait se faire par téléphone, ou de façon intermittente.

Le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation sont également clairs sur ce point, le premier sans le dire car il n'est pas censé appliquer le droit européen, la seconde en le disant car elle est censée contrôler la conformité de nos textes à la Convention européenne des droits de l'homme. Dans ce domaine, la Cour de cassation a estimé que notre droit n'est pas conforme au droit européen parce qu'il ne prévoit la présence de l'avocat ni dès le début de la garde à vue ni pendant les interrogatoires.

En ce qui concerne l'accès au dossier, la jurisprudence de la CEDH peut paraître peu explicite mais il est tout de même précisé que l'avocat doit être en mesure d'accomplir sa mission. Celle-ci ne saurait se résumer au fait d'être présent et de réconforter la personne placée en garde à vue – d'autres qu'un avocat pourraient tout aussi bien remplir ce rôle. Elle vise, indique la Cour, à « construire une défense », ce qui suppose la connaissance d'un minimum d'éléments d'information.

Le débat porte sur le degré d'information nécessaire : l'avocat doit-il avoir accès à toutes les pièces, doit-on avoir la possibilité d'en retrancher certaines ? Dans certaines législations européennes, la possibilité de ne pas communiquer l'intégralité du dossier relève de la décision d'un magistrat.

Cette question nous mène à celle des régimes dérogatoires, que nous verrons par la suite.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion