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Intervention de Jacqueline Fraysse

Réunion du 27 octobre 2010 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacqueline Fraysse :

S'ajoutent à cette situation que vous créez les fluctuations de la demande de soins et la concurrence des cliniques privées, qui ne cesse de s'accroître du fait de vos choix. Il est clair que votre logique marchande pénalise jusqu'à les détruire toutes les activités publiques. C'est grave dans bien des secteurs, et particulièrement pour la santé.

S'ajoute à ces décisions la façon dont le plan Hôpital 2007 a été conduit. Un trop grand nombre de projets mal dimensionnés ont été acceptés dans le cadre de ce plan, alors même que l'enveloppe de l'État, qui s'élevait à 6 milliards d'euros, n'était pas revalorisée en conséquence, ce qui a réduit le taux de subvention, rapidement ramené de 100 % à 43 %, le reste étant financé par des emprunts. La façon dont a été financé Hôpital 2007 constitue, écrivent les rapporteurs de la Cour des comptes, « l'explication essentielle – même si ce n'est pas la seule – de la progression remarquable de l'endettement du secteur ».

D'autres difficultés s'ajoutent encore avec la généralisation de la T2A. Elle a en effet modifié le travail des praticiens du public, désormais responsables du codage de leurs actes. Si cette pratique est habituelle pour les praticiens du privé, rémunérés à l'acte, il n'en est pas de même pour ceux du public. Les erreurs de codage peuvent avoir de graves conséquences financières. Ainsi, en 2008, une anomalie repérée à l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille pourrait lui avoir coûté 40 millions d'euros, alors que le déficit de son budget s'était élevé à 58,4 millions d'euros cette année-là.

Quant aux pertes de recettes liées aux insuffisances de la chaîne de facturation dues notamment aux nombreuses évolutions réglementaires et tarifaires, elles seraient, toujours selon la Cour des comptes, comprises entre 5 et 15 % du budget des hôpitaux.

Si l'on ajoute à tout cela vos décisions concernant la progression de l'ONDAM, qui, chaque année, est inférieure à l'évolution naturelle du budget des hôpitaux, calculée en prenant en compte les revalorisations salariales, l'augmentation du prix des médicaments, des charges d'énergie – il vient d'être annoncé une augmentation de 3 % des tarifs de l'électricité – ou celle des cotisations retraite pour le personnel de la fonction publique hospitalière, on peut dire que le Gouvernement décide, de fait, de faire voter sciemment l'insuffisance budgétaire des hôpitaux publics.

Pour 2011, notre collègue Jean Leonetti, président de la Fédération hospitalière de France, a estimé à 3,23 % la progression du budget des hôpitaux, compte tenu de ces contraintes. Face à cela, madame la ministre, vous décidez de fixer l'ONDAM hospitalier à 2,8 %. Encore une fois, vous faites voter sciemment le déficit des hôpitaux publics. D'ailleurs, la Cour des comptes indique qu'« une partie de la réponse au déficit des hôpitaux est entre les mains de la tutelle ». Il ne s'agit donc nullement d'une épidémie qui, curieusement, ne frapperait que l'hôpital public, ni de la responsabilité des directeurs qui seraient tout aussi curieusement devenus brusquement incompétents, incapables de gérer le budget de leur établissement. Il s'agit bien de choix politiques et stratégiques.

Le comble est que vous utilisez ce déficit organisé pour faire pression sur l'activité des médecins et des soignants, pour diminuer les personnels et les services offerts, qui seraient trop coûteux. C'est une véritable spirale de démantèlement progressif des établissements publics de soins. Il s'agit, je le répète, de choix délibérés, instaurant, chaque année un peu plus, la privatisation des soins.

Vous faites souvent référence à ce qui se passe dans d'autres pays, notamment en Allemagne. C'est effectivement un bon exemple des objectifs que vous poursuivez, car, dans ce pays, deux CHU, dont celui de Hambourg, viennent d'être vendus au secteur privé. C'est un bel exemple de ce que vous envisagez de faire.

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