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Intervention de Jean-Luc Warsmann

Réunion du 13 janvier 2009 à 15h00
Application des articles 34-1 39 et 44 de la constitution — Discussion d'un projet de loi organique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Warsmann, président et, rapporteur de la commission des lois :

Le débat porte d'abord sur la manière de mieux préparer les lois qui nous sont proposées. Je voudrais ici rendre hommage à Alain Juppé, ancien Premier ministre. En 1995, il avait initié cette démarche par une circulaire qui, hélas, n'a pas pesé du poids nécessaire face aux traditions, face aux hautes administrations et à leurs habitudes.

Mais nous avons su prendre, le 23 juillet dernier, la décision d'imposer dans la Constitution un mécanisme qui rend obligatoire les études d'impact. Monsieur le ministre, vous avez parlé de révolution en germe : c'est une révolution totale ! En effet, après le vote de la loi organique, le Gouvernement qui viendra nous soumettre un projet de loi devra l'assortir d'une étude portant sur plusieurs points.

Il devra d'abord présenter l'état du droit qu'il entend modifier, les lois et les textes d'application en vigueur, ce qui permettra notamment de vérifier si les textes d'application des lois précédentes ont bien été pris. Son étude devra évidemment intégrer le droit européen, car on ne peut plus travailler en faisant abstraction des règles européennes.

Le Gouvernement devra également présenter le raisonnement qu'il a suivi pour atteindre ses objectifs. Parmi les solutions possibles, pourquoi est-ce la voie législative qu'il a choisie, alors que la modification d'un ou deux décrets, ou bien le développement d'une politique contractuelle avec les collectivités locales aurait permis d'atteindre le même objectif ? Il devra justifier son choix et apporter la démonstration que le rapport qualitéprix de la loi est plus avantageux que celui des solutions non législatives.

L'étude devra enfin proposer un bilan du coût et des bénéfices attendus de la nouvelle loi. La commission des lois a tenu à ce que ce bilan soit extrêmement détaillé, pour l'ensemble des catégories d'administration publique. Combien va coûter ou faire économiser la nouvelle loi à l'État ? Même question pour les collectivités locales, les administrations de sécurité sociale, mais aussi pour le secteur privé. Sur ce dernier point, l'un de nos amendements propose d'insister tout particulièrement sur les petites et moyennes entreprises, largement touchées aujourd'hui par les politiques européennes. Combien de fois, en effet, avons-nous voté ici des amendements ou des lois en croyant introduire des dispositifs simples, et combien de fois, six mois ou un an après, nous sommes-nous fait interpeller dans nos circonscriptions par des professionnels nous reprochant la complexité des dispositifs mis en oeuvre ?

Avec la loi qu'il nous soumet, le Gouvernement devra nous présenter non seulement ses calculs mais – et c'est l'objet d'un de nos amendements – la méthode qu'il a utilisée. Nous ne voulons pas en effet qu'il nous assène que le texte coûtera dix millions d'euros à l'État ; nous voulons connaître le détail de ses calculs : la réforme va générer trois cent mille dossiers par an, chaque dossier nécessitant quatre heures de travail par fonctionnaire, soit tant d'argent.

Que ces chiffres soient mis sur la table constitue une révolution, car je prends le pari devant vous qu'à l'avenir, un ministre qui viendra présenter un nouveau projet de loi s'attachera au moins autant l'étude d'impact qui l'accompagne qu'au dispositif technique. Je prends aussi le pari que, lorsque nous débattrons désormais d'un projet de loi, nos débats porteront davantage sur les modalités d'application de la loi et sur son coût que sur les principes, qui nous font parfois dériver vers l'idéologie. Nous sortirons du manichéisme pour aller vers plus de pragmatisme.

La commission des lois a adopté plusieurs amendements qui enrichissent le texte et limitent les exonérations d'études d'impact qu'il prévoyait initialement. Nous pensons en effet que les lois de programmation doivent également s'accompagner d'études d'impact, ainsi que les dispositions comprises dans les lois de finances ou les lois de financement de la sécurité sociale. Une réforme des dotations des collectivités locales, par exemple, peut figurer dans une loi de finances ; or elle nécessite évidemment une étude d'impact. De la même manière, si l'on veut toucher au bouclier fiscal, intégré dans une loi de finances, cette modification doit faire l'objet d'une étude d'impact.

C'est une saine manière de raisonner. Il ne s'agit pas d'imposer au Gouvernement des obligations nouvelles mais de s'assurer que chaque nouveau texte qu'il produit est l'aboutissement d'un raisonnement qui doit nous être exposé.

Nous tenons également à ce que les amendements gouvernementaux fassent eux aussi l'objet d'une étude d'impact. Rendre ces études obligatoires pour les projets de loi n'aurait aucun sens si le Gouvernement pouvait ensuite déposer sur son texte des amendements sans en justifier le coût.

Ce dispositif va donc profondément modifier la manière de préparer les lois dans notre pays, ce qu'attendent de très nombreux citoyens.

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