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Intervention de Claude Birraux

Réunion du 5 octobre 2010 à 17h00
Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaude Birraux, député, président de l'OPECST :

a demandé comment l'Agence de la biomédecine (ABM) dont les compétences sont étendues, organisait ses relations avec d'autres institutions comme la Haute Autorité de Santé (HAS) et l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS). Il a souhaité savoir si les missions du Conseil d'orientation de l'ABM dont le rôle et la composition sont assez voisins de ceux du Comité national consultatif d'éthique (CCNE), ne risquaient pas de conduire à un chevauchement.

Il s'est interrogé sur l'état des recherches sur les xenotransplantations et sur l'impact des phénomènes de rejet du greffon pour les patients atteints de mucoviscidose, maladie d'origine génétique. S'agissant de l'AMP, il s'est enquis du fonctionnement des procédures d'évaluation des risques, de la situation dans les pays membres de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe, et de l'existence d'une coordination des politiques dans ce domaine. Evoquant les principes de gratuité et d'anonymat, il s'est demandé quel serait l'effet d'une éventuelle légalisation de l'accès aux origines pour les enfants issus de donneurs anonymes sur le nombre de donneurs de gamètes. A cet égard, il a regretté que la France n'ait pas ratifié la Convention d'Oviedo.

S'agissant des questions relatives à la coordination entre les Agences, Mme Emmanuelle Prada-Bordenave, directrice générale, a indiqué comprendre la vigilance des parlementaires, et a expliqué que l'Agence française de sécurité sanitaire et des produits de santé (AFSSAPS) était une autorité de police sanitaire respectée, alors que l'Agence de la biomédecine (ABM) veillait à la qualité des pratiques au niveau des professionnels de santé, notamment dans le domaine de greffe pour éviter les risques. L'ABM n'est pas une autorité de police, elle ne définit pas de règles strictes donnant lieu à des condamnations. Quand un sujet nouveau apparaît, l'ABM s'appuie sur l'état des connaissances, les souhaits des professionnels de santé et les confronte à l'expertise de l'AFSSAPS basée sur la sécurité sanitaire. Il appartient alors aux autorités de tutelle de trancher entre l'ABM qui raisonne en terme de bénéfice-risque, et l'AFSSAPS qui se fonde sur la sécurité. La démarche des deux agences n'étant pas identique, il n'y a pas de confusion des rôles. Cependant, une exception a été introduite par le législateur ; elle porte sur les procédures de contrôles des pratiques d'AMP « l'AMP vigilance », confiée à l'ABM. En effet, les activités d'AMP étaient depuis leur origine éclatées, car réalisées à l'hôpital ou par des médecins libéraux peu habitués à être contrôlés par l'AFFSAPS dont les procédures adaptées au milieu industriel auraient été inappropriées vis-à-vis des professionnels concernés. « L'AMP vigilance » se met lentement en place, l'AFFSAPS contrôlant la standardisation des milieux de culture, les outils et les matériels utilisés, tandis que la prescription et les bonnes pratiques relèvent de l'ABM.

Rappelant que la Haute Autorité de Santé (HAS), n'était pas une agence sanitaire Mme Prada-Bordenave, directrice générale a indiqué travailler en complémentarité totale avec elle pour l'accréditation des établissements de santé. Toutefois, pour l'activité très spécifique du prélèvement d'organes, l'ABM délivre à la HAS des certificats qui valent certifications des établissements contrôlés, et lui indique les audits en cours. Les recommandations concernant des bonnes pratiques sont dans certains cas effectuées en collaboration avec la HAS, notamment quand elles s'adressent aux médecins généralistes etou que l'on souhaite leur conférer une notoriété particulière. Ce fut le cas pour le dépistage de la trisomie 21 et le prélèvement sur donneur vivant.

S'agissant des rôles respectifs du Comité d'orientation de l'ABM et du Comité consultatif national d'éthique (CCNE), Mme Prada-Bordenave, directrice générale, a expliqué que le Conseil d'orientation de l'Agence n'était pas une instance nationale mais une instance éthique dédiée à l'ABM, se réunissant dans les locaux de l'Agence, placée auprès de la directrice générale de l'Agence, et chargée de l'éclairer. L'expertise et la notoriété des personnalités qui composent ce Conseil contribuent à l'autorité de ses avis, qui portent sur des problématiques difficiles, comme la recherche sur l'embryon ou les règles d'attribution des greffons. Conjuguer efficacité et équité n'est pas un exercice simple dans un tel domaine : qui doit-on privilégier ? Doit-on par exemple attribuer les greffons en fonction de la proximité géographique pour être plus efficace? Le Conseil d'orientation conduit une réflexion pour dégager des règles cohérentes. Contrairement au Comité d'orientation de l'ABM, le CCNE délivre un message qui n'est pas spécifiquement destiné à l'Agence de la biomédecine, son périmètre d'intervention est plus large que celui du Conseil d'orientation de l'ABM, même si le CCNE peut se saisir de sujets de biomédecine. L'ABM entretient des relations suivies avec le CCNE en raison de la nature des sujets traités.

Quant aux relations de l'Agence de la biomédecine avec l'Alliance pour les sciences de la vie et de la santé (AVIESAN), Mme Emmanuelle Prada-Bordenave, directrice générale a expliqué que celles-ci n'étaient pas formalisées, car l'ABM n'est pas un opérateur de recherches. Toutefois, elle dispose d'un budget incitatif relativement modeste pour piloter des recherches sur appel d'offre : il s'élève à 400 000 € pour l'AMP et la greffe, et 200 000 € pour l'utilisation du registre REIN, les recherches sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires ne pouvant être concernées, car l'Agence délivre les autorisations dans ces deux domaines. Le montant par projet reste modeste 20 000€ à 25 000€, mais vise à être incitatif, à labelliser un projet et ainsi à donner un signal fort à l'égard d'autres bailleurs (régions, industriels). Cependant l'ABM entretient des contacts avec l'INSERM, et maintenant avec l'AVIESAN. Elle interagit avec l'INSERM notamment dans le domaine des recherches sur l'embryon et les cellules souches, afin de mieux connaître la communauté des chercheurs qui y travaillent et ont besoin d'être accompagnés. Ces recherches gagneraient à être plus développées en France, car notre pays a pris du retard dans ces domaines.

Concernant des xénotransplantations, Mme Emmanuelle Prada-Bordenave, directrice générale, a précisé que l'équipe du Pr Soulillou à Nantes redéfinissait le concept, ses travaux étant assez avancés et très prometteurs ; des essais sur les grands singes sont prévus. Il s'agit non pas de greffer des organes entiers, mais des cellules avec un système d'encapsulation de ces cellules dans une membrane, afin d'éviter la transmission de rétrovirus. Les cellules des îlots de Langerhans de porc greffées et encapsulées seraient alors utilisées comme centrales de production pour fabriquer l'insuline. Actuellement, on assiste à un regain d'intérêt pour la xénotransplantation. Un congrès s'est tenu très récemment sur ce thème à Lisbonne ; la Chine s'y intéresse activement.

Concernant l'utilisation de la greffe du poumon pour traiter les patients atteints de mucoviscidose, Mme Emmanuelle Prada-Bordenave, directrice générale, a observé que les progrès dans les traitements immunosuppresseurs avaient démontré que, malgré le risque infectieux inhérent à cette pathologie, on n'observait pas plus de rejets que sur des sujets sains, l'origine génétique d'une pathologie ne faisant pas obstacle à la greffe.

Abordant la problématique de la vigilance en AMP, Mme Prada-Bordenave, directrice générale, a fait valoir que la France était très en avance en Europe où les procédures ne sont pas systématisées, sauf au Royaume-Uni, où cette vigilance est confiée à la Human Fertilization and Embryology Authority (HFEA). Certains pays considèrent même que les systèmes relèvent du libre choix des praticiens. Cependant l'Union européenne se préoccupe d'homogénéiser les pratiques de vigilance en AMP avec le projet européen de Soho V&S (Substances Of Human Origin Vigilance and Surveillance).

Quant à la légalisation de l'accès aux origines pour les enfants issus de donneurs anonymes, Mme Prada-Bordenave, directrice générale de l'Agence de la biomédecine a considéré que, dans la mesure où la question faisait l'objet d'une disposition de l'avant-projet de loi en cours d'examen par le Conseil d'Etat, l'Agence de la biomédecine n'avait pas à l'évoquer.

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