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Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 7 septembre 2010 à 15h00
Réforme des retraites — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Vidalies :

Monsieur Copé, quand on arrive en cours de séance, on peut commettre des erreurs : la compassion a été évoquée par M. Méhaignerie et non par nous. C'est pourquoi nous nous sommes permis de lui faire observer que sa remarque était parfaitement déplacée.

Dans ce débat, une vraie question mérite d'être clarifiée au départ : quelle est la justification que vous apportez à votre projet de réforme des retraites ?

Je citerai deux extraits d'un texte prononcé par M. Fillon. Dans le premier, il dit qu'« on sait que le besoin de financement des régimes de base du privé et du public est chiffré par le Conseil d'orientation des retraites à 43 milliards d'euros en 2020 » et, dans le second, il précise qu'il va prendre des dispositions pour que la solution qu'il propose « permette un financement à 100 % de la réforme. »

Ce discours a été prononcé le 10 juin 2003 devant notre assemblée. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Dans les six pages qui précèdent les extraits que j'ai cités, M. Fillon explique que l'évolution de la démographie et de l'espérance de vie fait que le nombre de retraités à l'horizon de 2020 sera tel qu'il faudra payer plus pour leur retraite.

On pourrait au moins se mettre d'accord sur un point : il me semble que les gens susceptibles d'avoir 60 ans en 2010 ou en 2020 étaient nés en 2003. Cela veut donc dire que vous êtes en train de nous vendre deux fois la même chose. Vous nous ressortez les mêmes justifications que vous avez avancées pour la réforme de 2003, pour expliquer comment il faut trouver à nouveau 40 milliards, à cette différence près que ces 40 milliards ne sont pas les mêmes : ils sont la facture de la crise.

Vous aviez prévu de transférer une partie des cotisations d'allocations chômage au financement des retraites. Or vous n'avez pas été en mesure de le faire. La crise n'est pas la seule en cause car, en 2005 et en 2006, cela ne fonctionnait déjà pas parce que votre politique avait échoué. Mais cela a été renforcé par la crise.

Dire la vérité aux Français revient donc à reconnaître que, aujourd'hui, vous présentez la facture de la crise.

Qui doit la payer ? Vous avez fait un choix très simple, vous avez décidé d'aller au plus simple.

D'une part, vous siphonnez – il n'y a pas d'autre mot – le fonds de réserve des retraites. En 1997, vous trouviez qu'il n'était pas suffisamment alimenté, M. Bur parlant même de lui affecter 300 milliards. Aujourd'hui, on est un peu plus raisonnable. Or ce fonds constituait d'une certaine façon la caisse de retraite des jeunes et ne devait être utilisé qu'à partir de 2020. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)

D'autre part, vous cherchez à faire des économies en modifiant les bornes d'âge. Si cela s'appliquait aux gens ayant les meilleures situations dans notre pays, on pourrait le comprendre. Mais c'est exactement l'inverse. Quand on sait qu'il n'y a que 40 % de gens qui sont encore au travail à l'âge de 58 ans, on est en droit de se demander ce qui va se passer. Que vont-ils faire entre 58 et 62 ans ? Rester deux ans de plus au RMI, au RSA, ou au chômage, sans rien, en attendant 62 ans ? C'est sur eux que vous faites des économies. Et ceux qui ont des carrières incomplètes, c'est-à-dire ceux qui ont rencontré les plus grandes difficultés professionnelles ou familiales, et qui attendent souvent 65 ans pour avoir une retraite sans abattement, que se passera-t-il pour eux ? Devront-ils attendre deux ans de plus ?

Vous financez votre réforme non seulement en ponctionnant le Fonds de réserve des retraites, mais encore en faisant payer ceux qui sont déjà le plus en difficulté. C'est pour cette raison que les gens ne l'acceptent pas. Votre réforme est profondément injuste. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Dans les propositions que nous avons formulées, nous prévoyons aussi un effort en matière de cotisations. Acceptez au moins qu'il y ait un débat à ce sujet.

Comme le président du groupe SRC vient de le souligner, il n'est pas possible de continuer ce débat alors qu'il y a, chaque jour et il y a encore quelques minutes, des déclarations de ministres dans les médias affirmant qu'ils vont finir par entendre le peuple. C'est à l'Assemblée nationale que vous devriez faire ces déclarations et annoncer les propositions que vous comptez faire, si vous comptez en faire, pas dans les médias ! Sinon, à quoi sert le Parlement et quel respect a-t-on de lui ?

Tout le monde ignore ce que vous allez dire, y compris les syndicats. Vous avez encore dit ce matin que vous feriez peut-être une déclaration à la fin de la semaine.

Il aurait pu y avoir une grande réforme. En Suède, ils ont discuté pendant plusieurs années de la question des retraites.

L'intervention de Mme Marisol Touraine a montré que nous pouvions avoir ce débat puisqu'il y a deux projets. Les Français qui ont manifesté aujourd'hui attendent des réponses. Ils savent, dans tous les cas, qu'il y a un autre projet sur lequel ils peuvent fonder une espérance : celui du parti socialiste. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC –Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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