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Intervention de Annick Le Loch

Réunion du 30 juin 2010 à 15h00
Modernisation de l'agriculture et de la pêche — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnnick Le Loch :

Les occasions de parler de la pêche sont si rares dans cet hémicycle que je voudrais profiter de la discussion de ce texte pour m'intéresser à cette filière et aux hommes qui la font vivre.

Certes, me direz-vous, l'économie de la pêche représente bien peu de chose dans notre pays – elle est équivalente au marché de la tomate –, mais elle participe malgré tout à l'équilibre de notre alimentation. C'est un secteur d'activité qui, par la crise qu'il traverse autant que par l'importance qu'il revêt pour l'identité même de certains territoires littoraux, mérite que l'on s'y arrête.

La pêche n'est pas une activité du passé, vouée à disparaître, c'est le sens de mon propos, comme c'était le vôtre, monsieur le ministre, avant-hier. Elle est au contraire une filière économique à part entière, une filière d'avenir, à condition de lui donner les moyens de sa modernisation.

Permettez-moi de répondre successivement à trois questions : dans quel état se trouve aujourd'hui la pêche française ? En quoi ce texte est-il une réponse à la crise qu'elle subit ? Quelles avancées les députés socialistes vous proposent-ils à l'occasion de l'examen de ce texte ?

Premier point : quel état des lieux peut-on dresser de la pêche française aujourd'hui ?

Le secteur de la pêche représente en France 64 000 emplois et près de 27 000 personnes sont employées dans les ports. Cela semble peu mais, au-delà de ces données brutes, cette activité revêt pour certaines régions littorales et leurs populations une importance bien plus grande que ce que ces seuls chiffres peuvent laisser penser.

Veuillez m'excuser pour le détour par la Bretagne que je m'apprête à faire, mais l'importance de la pêche pour cette région, ainsi évidemment que celle de l'agriculture, ne peut être ignorée. La pêche en Bretagne, c'est 15 000 emplois directs dans 2 600 entreprises, un chiffre d'affaires de 2 milliards d'euros pour la filière halieutique et autour de 1 500 bateaux de pêche.

La pêche française ne se cantonne évidemment pas à la Bretagne, mais peu de régions sont aussi liées à cette activité en termes d'identité et de dynamique économique et touristique. La Bretagne compte 7 000 pêcheurs, soit plus de 30 % des emplois de la pêche en France. C'est la première région française pour le volume des produits débarqués : plus de 41 % des captures de la France métropolitaine en volume et 43 % de la valeur des ventes. La Bretagne, avec ses quinze ports équipés d'une criée, est la première région française aussi bien en termes de valeur des produits vendus qu'en termes de volume. Dans sa contribution à la réforme de la politique commune des pêches en janvier 2010, le conseil régional de Bretagne a rappelé à juste titre que « la pêche et l'aquaculture, comme les autres activités maritimes, sont non seulement des activités structurantes de l'économie régionale, mais aussi des éléments constitutifs de l'identité bretonne ».

Ce crochet par la Bretagne ne visait qu'à rappeler une vérité simple, sans doute trop souvent oubliée lorsque l'on parle de pêche au niveau français ou européen : lorsque l'on considère une activité économique et humaine comme la pêche, il est important de prendre également en compte les territoires qui lui sont liés, en incluant la zone côtière et l'arrière-pays, et en gardant à l'esprit qu'à un marin embarqué sont associés trois voire quatre emplois à terre.

Au-delà de ce préambule, quelles sont dans les grandes lignes les caractéristiques de la pêche française ?

Ce qui frappe tout d'abord, si l'on veut bien se placer dans le contexte incontournable de la mondialisation des échanges, c'est la faiblesse de la filière française au niveau du commerce international Malgré la place de la pêche pour certains territoires, et l'importance de notre façade maritime – M. Guédon a eu l'occasion de le rappeler –, la France ne représente que 7 % des captures européennes et moins de 1 % des volumes mondiaux.

La pêche française est sous-dimensionnée, et sans doute mal orientée. Nous nous trouvons aujourd'hui dans une situation paradoxale : alors que la consommation des Français a augmenté de près de 25 % en vingt ans, la part de marché de la pêche française stagne, voire diminue.

La filière souffre en fait d'un vrai problème de compétitivité. À quoi cela est-il dû ? L'argument consistant à pointer du doigt des normes sociales et environnementales plus élevées en France qu'ailleurs n'est pas convaincant. J'y vois pour ma part un atout à valoriser dans la compétition internationale de demain, pour le respect d'un métier difficile.

Les vraies raisons du retard français sont plus à chercher du côté de la dépendance vis-à-vis de l'énergie et du vieillissement généralisé de la flotte. Et pourtant, si 60 % des bateaux ont plus de vingt ans, les 72 % des armateurs individuels qui ont moins de cinquante ans incarnent bien le désir d'entreprendre du secteur de la pêche dans notre pays.

Mais les difficultés relèvent aussi des défauts d'organisation de la filière : l'atomisation de l'offre constitue un inconvénient du point de vue commercial, surtout dans le contexte d'hyperconcentration des centrales d'achat. La faible prévisibilité de l'offre encourage les acheteurs à se couvrir en ayant recours de manière massive aux importations.

Voilà autant de points sur lesquels nous pouvons converger en termes de diagnostic.

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