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Intervention de Gilles Carrez

Réunion du 23 juin 2010 à 9h30
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Carrez, rapporteur général :

Votre présentation n'incite pas à un optimisme béat, monsieur le Premier président, mais elle est lucide. Nous sommes confrontés à une dégradation de notre solde structurel, c'est-à-dire de l'écart entre les coûts et les recettes.

Je prendrai deux exemples pour illustrer cette dégradation en 2009.

Premièrement, tout le monde croit que le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux permet de stabiliser la masse salariale des fonctionnaires. C'est faux. L'exécution 2009 fait apparaître un dérapage de 600 millions d'euros par rapport à la prévision en loi de finances initiale. Entre l'exécution 2008 et l'exécution 2009, l'augmentation est de 800 millions. Dans ces conditions, l'objectif d'une progression « zéro valeur » de la masse salariale, qui représente plus de 80 milliards d'euros dans le budget de l'État, vous paraît-il tenable et à quelles conditions ? Le gel du point d'indice, alors que l'on sera amené en parallèle à augmenter progressivement le taux de cotisation des fonctionnaires, pose un problème.

Deuxièmement, la dépense fiscale ne peut continuer ainsi. Par exemple, nous avons tous, à tour de rôle, défendu l'article 200 quater du code général des impôts, qui vise à favoriser les économies d'énergie et des énergies renouvelables dans le logement. La prévision de dépenses en loi de finances initiales pour 2009 était de 1,3 milliard d'euros. L'exécution en est à 2,8 milliards. À l'automne 2008, nous avons convoqué et interrogé pendant deux heures les ministres responsables pour exiger qu'ils revoient les arrêtés listant les équipements éligibles à ces avantages fiscaux. On nous a fait des avalanches de promesses, on nous a certifié que la dépense serait maîtrisée. Au bout du compte, elle ne l'est pas ! Et l'on pourrait multiplier les exemples...

Le Premier ministre vient de publier une courageuse circulaire qui interdit aux ministres d'égrener des mesures fiscales ou sociales dans leurs projets de loi, celles-ci étant réservées aux lois de finances et aux lois de financement.

Le moment n'est-il pas venu de faire comme en Allemagne et de revenir à des subventions ? Lorsque l'on veut aider telle ou telle activité, on la subventionne ; et, si les crédits sont épuisés au mois d'octobre, on attend le mois de janvier. Ne serait-il pas pertinent d'appliquer ce système, par exemple, au dispositif d'aide à l'accession sociale au logement ? Pourquoi avoir transformé un système de subventions inscrites au budget de l'État, qui a fonctionné pendant 25 ans, en un crédit d'impôt que l'on ne maîtrise plus, toutes les dépenses étant en guichet ?

Dans le cadre du programme de stabilité, pensez-vous qu'une réduction en volume est envisageable, au vu de la tendance moyenne des dernières années qui se situait à un peu plus de deux points en volume, l'inflation s'y ajoutant. Le programme transmis à Bruxelles prévoit 0,6 %. Ce chiffre est-il à l'échelle de l'ambition fixée ?

Le déficit de cette année est à huit points de PIB, un point représentant presque 20 milliards d'euros. L'objectif est de passer à trois points en 2013, soit 60 milliards. Il y a donc 100 milliards à trouver.

Mais parlons plutôt de 2011, où il faudra passer de 8 à 6 % en trouvant 40 milliards d'euros. Un tel effort vous paraît-il possible en matière de dépenses ?

La dépense publique totale – État, sécurité sociale, collectivités – s'élève à 1 000 milliards d'euros. Depuis des années, ce montant augmente d'un peu plus de 4 % en valeur, soit 40 milliards tous les ans. Il faut absolument diviser cette progression par deux et arriver à 20 milliards d'euros.

Pour ce qui concerne le budget de l'État, les dépenses de fonctionnement sont mineures par rapport à la masse salariale. Pour avoir participé aux exercices de RGPP, je puis témoigner que l'on n'a traité qu'une toute petite partie de la question de la maîtrise de la dépense.

Les dépenses d'intervention – plus de 60 milliards d'euros – représentent un ensemble important. Dans une lettre sur les perspectives pluriannuelles qu'il a adressée aux ministres, le Premier ministre a souhaité qu'on les réduise de 10 % en trois ans, avec un abaissement de 5 % dès 2011.

Vous avez également évoqué, monsieur le Premier président, différentes mesures, comme la non-indexation de certaines prestations ou le resserrement des systèmes de guichet. Pourriez-vous nous en dire plus au sujet des travaux que la Cour mène sur ces différentes hypothèses ?

En matière de recettes, pensez-vous que la seule action sur la dépense fiscale, à hauteur de 6 milliards d'euros, c'est-à-dire 0,3 point de PIB, est suffisante ?

Pour la reconstitution naturelle des recettes, on table sur un taux d'élasticité de 1,2 % qui, vous l'avez remarqué, n'a jamais été observé par le passé en période de sortie de crise. Quelles hypothèses d'élasticité la Cour serait-elle encline à proposer ?

Au-delà de la reconstitution de recettes par le biais de l'interdiction de baisser les impôts et de la réduction de certaines niches fiscales, vous avez implicitement envisagé des hausses d'impôt. Quelles sont les propositions de la Cour en la matière ?

La conjugaison d'un effort sur les dépenses – incluant les dépenses d'intervention, ce qui est très difficile – et d'un effort sur les recettes vous paraît-elle à la hauteur de l'enjeu, à savoir la réduction de 5 points de PIB pour passer de 160 à 60 milliards d'euros de déficit à l'horizon 2013.

S'agissant des collectivités locales, l'exécution 2009 fait apparaître un phénomène curieux. Le plan de relance comportait une mesure d'incitation à l'investissement par le biais du Fonds de compensation de la TVA, le FCTVA. Or, si cette mesure s'est révélée très efficace – en consommation, par rapport à une prévision de 2,5 milliards d'euros de remboursements supplémentaires, on est passé à 3,8 milliards –, le besoin de financement des collectivités locales a en même temps fortement diminué, comme si celles-ci avaient stocké leurs remboursements au titre du FCTVA en fin d'année 2009. Peut-on espérer qu'elles utiliseront ces sommes, conformément aux conventions qu'elles sont signées, dans le courant de l'année 2010 ?

Si l'on additionne les dotations aux collectivités locales et les exonérations et dégrèvements d'impôts pris en charge par l'État, on arrive à 70 milliards d'euros, soit 20 % du budget de l'État, ce qui en fait le premier poste. Compte tenu des problèmes auxquels nous sommes confrontés, il est tout à fait légitime de geler, en « zéro valeur », l'ensemble de ces dotations et exonérations.

Cela dit, la situation est très différente selon les types de collectivités. La dépense continue d'augmenter dans les intercommunalités. En raisonnant en dépenses consolidées – c'est-à-dire communes et intercommunalités confondues –, la dépense par habitant des 10 % qui dépensent le moins est trois fois inférieure à celle des 10 % qui dépensent le plus. Cette observation est parfaitement corrélée au niveau des ressources. Comme les ressources sont principalement constituées de dotations, nous devons avoir le courage d'aller beaucoup plus loin dans la péréquation.

Pourtant, quelle que soit la péréquation, quels que soient les efforts des exécutifs locaux – qui, globalement, se montrent très responsables –, l'échelon du département est susceptible de poser un réel problème. En effet, une partie des guichets, dont le Premier président a souligné le fonctionnement non limitatif et non contrôlé, a été transférée aux départements : l'allocation personnalisée d'autonomie – APA –, l'ensemble constitué par le RMI et le RSA, la prestation compensatoire du handicap – PCH –. Quelle analyse la Cour porte-t-elle sur la situation des finances départementales d'ici à 2013 ?

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