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Intervention de Jeanny Marc

Réunion du 24 juillet 2007 à 15h00
Libertés et responsabilités des universités — Article 6

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJeanny Marc :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'outre-mer est par excellence l'expression de la diversité : diversité des géographies et des horizons, diversité des cultures et des mémoires, diversité des populations, des statuts juridiques, richesse d'une France rayonnant aux confins du monde. Cette réalité semble pourtant vous avoir échappé, madame la ministre.

En outre-mer plus qu'en France hexagonale, les universités sont des acteurs du développement économique, mais elles sont surtout l'occasion exceptionnelle d'une réelle égalité des chances pour la jeunesse des douze collectivités ultramarines. Lieux de création et de transmission du savoir, les universités ont vocation à offrir des formations de qualité à cette jeunesse, principale richesse de notre pays en devenir.

Or je constate avec une certaine amertume que la réforme de la gouvernance des universités a été pensée en référence à une partie du territoire national seulement, en oubliant, une fois de plus, l'outre-mer. N'avez-vous pas annoncé hier que la situation à tous égards particulière de l'université des Antilles et de la Guyane – éclatée sur trois départements distants de milliers de kilomètres et placée sous la responsabilité de trois recteurs – rendrait nécessaire le recours à une ordonnance afin d'adapter la loi – y compris son titre III – à ses spécificités ? Cette ordonnance, ajoutiez-vous, sera prise après concertation avec l'ensemble des acteurs concernés, notamment les collectivités locales. Il n'en reste pas moins que ce projet, dans son état actuel, ne prend pas en compte les aspirations de notre jeunesse. J'ai même le sentiment qu'il pérennise l'exclusion, et je ressens, malgré moi, une certaine discrimination, car ce sont 28 000 étudiants, inscrits dans les quatre universités d'outre-mer, qui, par négligence ou par oubli, se retrouvent ainsi délaissés.

L'évolution vers une autonomie affirmée ne gêne en rien les Guadeloupéens, bien au contraire. L'université des Antilles et de la Guyane, dans son contrat quadriennal de développement 2006-2009, entend assumer pleinement son rôle d'université française dans la zone caraïbe américaine. Elle souhaite répondre, en outre, à la demande sociale croissante des trois pays qui la constituent. Elle veut enfin participer pleinement à l'espace européen de l'enseignement supérieur et de la recherche et, avec l'ouverture du grand marché caribéen, allier une démarche d'intégration à une volonté de coopération dans la grande zone caraïbe. Si nous ne rejetons donc nullement le principe de l'autonomie, nous déplorons toutefois les carences en ce qui concerne les modalités de sa mise en oeuvre pour les quatre établissements ultramarins.

Le dispositif de l'article 6 n'est pas adapté aux réalités de l'université Antilles-Guyane. Alors que le système français d'enseignement supérieur et de recherche s'appuie sur une longue tradition historique, l'UAG, éclatée sur trois régions monodépartementales, est un établissement public encore très jeune, même s'il constitue un carrefour de communication et d'échanges entre la Caraïbe, l'Amérique intertropicale et l'Europe. Or ce vivier de matière grise n'a pas été consulté. Vous semblez avoir oublié que les universités d'outre-mer pourraient être également concernées. La France n'est pourtant pas seulement hexagonale : nos territoires ont beau revendiquer fortement leur identité, ils en font aussi partie. Qu'elles soient situées dans l'Atlantique, le Pacifique ou l'océan Indien, chacune de ces terres abrite des Français à part entière, comme en atteste d'ailleurs notre présence dans cet hémicycle.

Si ce projet est adopté en l'état, l'avenir de l'UAG est menacé, car la réduction du nombre des membres du conseil d'administration conduira inéluctablement à l'éclatement de l'établissement. En effet, le conseil d'administration comprend actuellement soixante membres – vingt membres par pôle – et c'est cette parité qui est l'une des clés du maintien de l'unité de l'établissement.

Depuis vingt-cinq ans, l'UAG assure dans cette région du monde la promotion de la culture et de la science françaises tout en défendant la culture caribéenne. C'est cette mission qui risque d'être compromise. Au Sénat, vous vous êtes aperçue des lacunes de ce projet par rapport à l'outre-mer. Je vous demande donc de prendre en compte les aspirations de nos territoires et je souhaite qu'à l'avenir nous n'ayons plus à passer par une loi d'habilitation pour prendre des mesures les concernant.

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