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Intervention de Gérard Bapt

Réunion du 17 juin 2010 à 15h00
Suspension de la commercialisation des biberons à base de bisphénol a — Article 1er, amendement 4

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales :

Cet amendement a recueilli en commission l'assentiment de députés de groupes très différents ; c'est dire s'il ne procède d'aucune approche partisane.

Pour aller plus loin dans la protection des organismes en développement, in utero, post-natal et jusqu'au stade de la puberté, au moment où il est le plus sensible à l'action hormonale, il est essentiel d'éviter le contact avec les agents perturbateurs et notamment le bisphénol A.

Le bisphénol A fait, depuis des années, l'objet d'études dans tous les pays : on se souvient de l'appel de Chapel Hill en 2007, à l'initiative de Ana Soto que M. Domergue lui-même m'a amenée un jour et qui m'a sensibilisé à ce problème avec le réseau environnement-santé. Il est important d'entendre ces signaux d'alerte de scientifiques internationalement reconnus.

Les agences officielles sont un peu figées dans des procédures qui relèvent certes de bonnes pratiques, mais qui excluent parfois des études universitaires au motif que celles-ci ne répondent pas à ces exigences de bonnes pratiques ni aux règles de l'OCDE, tout simplement parce que cela revient trop cher – il faut également réfléchir à cet aspect des choses. Les responsables du laboratoire INRA de Toulouse, qui avaient montré pour la première fois au monde les effets du bisphénol sur la perméabilité de la barrière intestinale humaine, ont abandonné, il y a trois ou quatre ans, les bonnes pratiques de laboratoire, qui leur coûtent 20 à 25 % plus cher. Ils préfèrent faire plus d'études à moindre coût…

Au bout du compte, seules les études exclusivement financées par l'industrie peuvent répondre à ces exigences de bonnes pratiques – quitte à les abandonner en cours de route, on l'a vu, si elles se révèlent par trop négatives !

L'amendement n° 4 vise à substituer à l'article 1er aux mots : « biberons produits à base de bisphénol A sont suspendues » les mots : « contenants de denrées alimentaires produits à partir de bisphénol A autres que les biberons sont suspendues, à compter du 1er janvier 2012, ». Il appartiendra ensuite à l'AFSSA de rendre un avis motivé autorisant à nouveau leur commercialisation.

Est-il trop tôt pour prendre une telle décision ? Je vois, madame la secrétaire d'État, monsieur le président de la commission, que vous êtes tout aussi en alerte et conscients que nous de la nécessité de protéger la santé. Mais vous nous renvoyez à un débat en janvier 2011 – encore ne sera-ce qu'un débat, non une occasion de production législative. Retirer cet amendement au profit d'un débat, où il n'y aura ni vote ni amendements, reviendrait à désarmer d'ores et déjà cette initiative parlementaire provenant du Sénat, dont je ne peux que me féliciter.

Un autre argument a été avancé : les autres États auraient fixé des échéances plus lointaines. C'est oublier qu'au Canada, l'interdiction des biberons à base de bisphénol A est en vigueur depuis mars 2010. Quant à l'État du Connecticut que vous avez cité, madame la secrétaire d'État, il fixe effectivement au 1er octobre 2011 la date d'interdiction de la fabrication et de la vente des contenants de denrées alimentaires, mais c'est plus tôt que ce propose mon amendement ; et sa décision remonte à mai 2009, autrement dit à plus d'un an. Autrement dit, ces considérations d'échéance et de date sont bousculées par le fait que de nombreux autres États.

Le Danemark vient de saisir la Commission européenne. Vous l'avez saisie vous-même pour demander la suspension de la vente des biberons contenant du Bisphénol A. Provoqueriez-vous un si grand désordre dans le fonctionnement de la Commission européenne si vous lui faisiez part de notre intention de suspendre l'utilisation de contenants alimentaires à base de bisphénol A au 1er janvier 2012 sous réserve d'un avis de l'AFSSA ? Il doit être permis de presser un peu la Commission lorsque l'intérêt et la santé publique sont en jeu…

Après tout, la décision unilatérale de Mme Merkel visant à interdire les ventes à découvert en matière de régulation bancaire provoque un désordre bien supérieur – cela aurait même fait reporter un dîner entre chefs d'État ! (Sourires.)

Je suis très attaché à cet amendement, madame la secrétaire d'État, qui recueille l'assentiment de nos collègues sur de nombreux bancs, même si M. Domergue m'a quelque peu déçu en laissant entendre que le principe de précaution devait passer après les préoccupations de la production industrielle.

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