Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Pierre Gosnat

Réunion du 15 juin 2010 à 15h00
Urbanisme commercial — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Gosnat :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, avant d'intervenir sur le fond du texte, permettez-moi de formuler une remarque préalable et une critique.

Nous devons nous prononcer sur une proposition de loi relative à l'urbanisme commercial. Si ce texte est relativement court, il traduit un changement réel en matière urbanistique. Il n'est donc pas acceptable que, la date limite de dépôt des amendements ayant été fixée, dans le cadre du règlement, à vendredi dernier, dix-sept heures, le rapport issu des travaux de la commission n'ait été mis en ligne que ce même vendredi, à seize heures quinze, soit trois quarts d'heure avant l'heure butoir. Hier encore, il n'était pas disponible sur support papier.

Depuis le début de cette législature, nous n'avons de cesse de dénoncer le rythme du calendrier parlementaire et les conditions dans lesquelles nous sommes contraints de légiférer. Pour cette proposition de loi, les conditions du débat sont d'autant plus regrettables que la question avait fait l'objet d'un travail préalable positif en commission et que la proposition émane des députés eux-mêmes, le Gouvernement n'ayant pas respecté sa promesse de présenter un projet de loi sur le sujet.

J'en viens au fond du texte.

La proposition de loi de M. Piron et de M. Ollier résulte donc du fait que le Gouvernement n'a pas tenu ses promesses et des conséquences négatives de la loi de modernisation de l'économie, que tout le monde, sur les bancs de gauche comme de droite, s'accorde à dénoncer. La LME, véritable fourre-tout législatif, était censée moderniser les structures économiques de notre pays. Plus que de modernisation, c'est de libéralisation à marche forcée qu'il a été question.

À l'époque, les députés communistes n'avaient eu de cesse de dénoncer les dangers et les écueils de ce projet de loi. En matière d'urbanisme commercial, la LME a relevé de 300 à 1 000 mètres carrés le seuil au-delà duquel une autorisation spécifique est obligatoire pour tout agrandissement ou création de surface commerciale. Le Gouvernement postulait alors qu'en limitant les contraintes administratives nous assisterions à une multiplication du nombre de centres commerciaux, notamment de hard discount, stimulant par-là même la concurrence, ce qui ne manquerait pas de renforcer le pouvoir d'achat des Français.

Deux ans après, force est de constater que le porte-monnaie de nos concitoyens est toujours aussi vide, ou qu'il n'est pas plus plein, et que les conséquences de la LME en matière d'urbanisme ont été désastreuses. Elles ont accéléré la désaffection des centres-villes et des métiers traditionnels du commerce de proximité.

La période transitoire qui a suivi l'adoption de la LME a donc donné lieu à une situation chaotique, que définit bien le rapport de M. Gaubert et de M. Ollier. La publication, le 28 août 2008, d'une circulaire exonérant d'autorisation les projets d'extension allant jusqu'à 1 000 mètres carrés, indépendamment de la surface d'origine du commerce, a abouti à une situation très problématique. Les agrandissements de 990 mètres carrés se sont multipliés dans des zones déjà denses, donnant lieu à une véritable anarchie urbanistique. La nouvelle circulaire du 24 octobre 2008, revenant sur la précédente, a certes tenté d'en limiter les dégâts mais a donné lieu à un gros contentieux administratif.

Cette proposition de loi se présente donc comme une réponse face à la situation que je viens de décrire. Elle tend à intégrer l'urbanisme commercial dans l'urbanisme général. Elle confère aux communes et EPCI le soin d'élaborer un document d'aménagement commercial au sein des PLU ou des SCOT. Cela me semble aller dans le sens de la décentralisation, en déléguant des prérogatives supplémentaires aux élus de proximité. Ces derniers sont en effet les plus à même de cerner les réalités et enjeux locaux.

Je formulerai cependant deux observations.

Premièrement, je regrette la suppression de la commission départementale d'aménagement commercial, même si ces commissions méritaient d'être rénovées, et je partage la critique formulée par M. Dionis du Séjour. Ce texte s'inscrit dans le prolongement de la réforme des collectivités, que les députés communistes ont combattue avec vigueur. Il déleste le département au profit des EPCI et des régions. Or, en matière d'urbanisme commercial, l'échelon départemental reste mieux adapté que l'échelon régional. À l'exception notable de l'Île-de-France, les projets commerciaux sont d'envergure départementale, voire locale. Le choix d'une commission régionale, dont les compétences sont fort limitées, ne me paraît donc pas optimal. Cela l'est d'autant moins qu'en ce qui concerne l'urbanisme cinématographique l'échelon départemental est maintenu.

Enfin, si je salue l'esprit de décentralisation qui se trouve dans ce texte, je me permets de mettre en avant la permanence des risques de développement d'un urbanisme sauvage. Nombreux sont les maires qui ont laissé se développer aux abords de leur ville des zones commerciales déshumanisées qui ont eu un impact durable sur l'environnement, pour des raisons qui peuvent d'ailleurs se comprendre : la demande des consommateurs, les recettes fiscales induites pour la commune et, surtout, la pression des grandes enseignes. Or je ne suis pas sûr que cette proposition de loi nous protégera de tels excès, pas plus que le PLU n'a mis fin à la spéculation immobilière.

Nous devons donc limiter ces risques en conférant un caractère contraignant aux conditions d'implantation énoncées à l'article 1er. C'est d'ailleurs le sens d'un des amendements que nous avons déposés.

Ce texte doit être amélioré. Nous avons proposé des amendements en ce sens, j'espère qu'ils seront pris en compte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion