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Intervention de Éric Ciotti

Réunion du 9 juin 2010 à 10h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Ciotti, rapporteur :

L'absentéisme scolaire est un fléau qui touche près de 300 000 jeunes chaque année, soit en moyenne 7 % des effectifs scolaires, tous établissements confondus. Les derniers chiffres publiés par la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance du ministère de l'éducation nationale montrent, hélas, que le phénomène touche chaque année davantage d'élèves, de plus en plus jeunes. Le décret du 19 février 2004 n'a pas réussi à l'endiguer.

En ne fréquentant plus l'école, trop d'enfants ruinent leurs chances de réussite. En refusant les règles de la République, ils se retrouvent parfois soumis à la loi de la rue, souvent en marge de la société et presque toujours en situation de détresse. Ces enfants sont en danger : il est urgent d'agir !

Cette proposition de loi repose sur la réhabilitation de l'exercice de l'autorité parentale. Combattre efficacement le fléau de l'absentéisme scolaire exige de trouver un point d'équilibre entre d'un côté l'accompagnement et le soutien des parents, de l'autre la crainte de la sanction, à la fois dissuasive et pédagogique.

Certes, les causes d'absentéisme sont diverses et chaque cas appelle une réponse individualisée. C'était l'un des objectifs du contrat de responsabilité parentale (CRP) institué par la loi du 30 mars 2006 pour l'égalité des chances qui prévoyait, en cas d'absentéisme, la mise en oeuvre d'un dispositif personnalisé, adapté en fonction de la situation de l'élève et de celle de sa famille. Hélas, trop peu de présidents de conseils généraux se sont saisis du dispositif. Je le regrette d'autant plus que, pour l'avoir expérimenté dans les Alpes-Maritimes, j'ai pu constater qu'il fonctionne bien. Nous avons signé 90 contrats depuis le 1er janvier et 150 sont en préparation, avec de premiers résultats tout à fait probants : 80 % des élèves absentéistes ont ainsi retrouvé le chemin de l'école.

Mais, à côté de parents qui, démunis face à l'attitude de leur enfant, acceptent la main tendue, il y en a d'autres qui refusent d'assumer leur responsabilité, démissionnent ou encore estiment que c'est à la société de prendre en charge ce qui pourtant leur incombe à la fois naturellement et de par la loi. Or, le versement des allocations familiales est un droit, en contrepartie duquel les parents sont tenus à des devoirs. Le premier d'entre eux est celui d'assumer leur autorité parentale et de veiller au respect de l'obligation scolaire. En cas de carence avérée, il faut que des sanctions puissent être prises, et aujourd'hui il est d'ores et déjà possible de demander la suspension des allocations familiales.

Face à ces constats, cette proposition instaure un nouveau dispositif équilibré et gradué, au coeur duquel se trouve placé l'inspecteur d'académie. Lorsqu'un chef d'établissement constatera qu'un élève aura eu au moins quatre demi-journées d'absence non justifiées en un mois, il le signalera à l'inspecteur d'académie. Celui-ci adressera alors un avertissement à la famille à la fois pour lui rappeler ses obligations légales et pour l'informer des différents outils d'accompagnement parental. Il saisira parallèlement le président du conseil général pour la mise en place d'un CRP. Si, au cours de la même année scolaire, l'élève est de nouveau absent sans raison valable, l'inspecteur d'académie, après avoir mis les parents en mesure de se justifier dans le cadre d'une procédure contradictoire, saisira le directeur de la caisse d'allocations familiales, qui pourra suspendre immédiatement le versement de la part des allocations familiales afférente à l'enfant concerné. Si, dans le mois qui suit cet avertissement, l'élève est de nouveau assidu, le versement reprendra, et ce de façon rétroactive sauf si, depuis l'absence ayant donné lieu à la suspension, une ou plusieurs nouvelles absences d'au moins quatre demi-journées par mois sans motif légitime ni excuses valables sont constatées. Dans ce dernier cas, à la demande de l'inspecteur d'académie et après que les représentants légaux de l'enfant auront pu de nouveau présenter leurs observations, le versement sera amputé d'autant de mensualités que de mois où au moins quatre demi-journées d'absences injustifiées auront été constatées.

Ce dispositif est équilibré. Il rétablit le lien entre l'attribution de prestations familiales et l'exercice de l'autorité parentale, principe constant et très ancien de notre droit, comme tous les dispositifs le confirment, depuis le décret-loi du 12 novembre 1938, l'ordonnance du 6 janvier 1959 et le décret du 18 février 1966.

Ce dispositif est gradué car il prévoit, à chaque étape, une information détaillée des parents sur les dispositifs d'aide existants et une main tendue. Il doit être dissuasif, son objectif premier étant d'aider les parents défaillants à prendre conscience de leur responsabilité et ainsi de mieux les accompagner. À un premier avertissement, succède une suspension des allocations et ce n'est qu'en dernier ressort au cas où, malgré toutes ces mesures, l'élève ne serait toujours pas redevenu assidu, qu'il y aurait suppression.

Enfin, ce dispositif est proportionné et adapté puisque l'inspecteur d'académie aura la faculté d'apprécier chaque situation individuelle à chacune des étapes, pouvant notamment estimer que les motifs invoqués constituent une excuse valable et légitime.

Ce dispositif, j'en suis bien conscient, ne permettra pas à lui seul de régler totalement le problème de l'absentéisme scolaire. Il constitue cependant un outil complémentaire aux nombreux dispositifs qui existent déjà et à ceux, nouveaux, que mettra en place le Gouvernement dès la rentrée prochaine, comme l'a annoncé le Président de la République dans le cadre de la mobilisation générale décrétée contre l'absentéisme scolaire : médiateurs de la réussite scolaire, dispositifs relais et micro-lycées, « mallette des parents », contrat de responsabilité parentale..., autant de mesures d'accompagnement destinées d'abord à soutenir les parents. Mais il faut aussi pour consolider l'ensemble, remettre certains parents face à leurs responsabilités, replacer l'école au centre de l'éducation et les enfants au coeur des préoccupations de notre société. L'absentéisme scolaire n'est pas une fatalité sociale. Pour l'endiguer il faut raffermir les liens entre les familles et l'école. Tel est l'objet de cette proposition de loi.

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