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Intervention de Martine Billard

Réunion du 1er juin 2010 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2010 — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Billard :

Madame la ministre, dans une interview à la presse vous avez très bien résumé ce qui, aujourd'hui, dicte la politique de l'immense majorité des pays, au détriment de la dimension humaine et de la sauvegarde de la planète : « Les marchés n'aiment pas ce qui prend du temps. Ils seront rassurés lorsque les seize pays de l'euro auront voté ce fonds de stabilisation. » La dépendance à ces marchés est telle que nous aurions voté ce plan à la sauvette si le groupe GDR n'avait demandé un vote solennel.

La volonté de dumping social et fiscal entre États de l'Union européenne, associée au dogme monétariste, est à l'origine des difficultés structurelles de la zone Euro.

Avant même la crise financière, les réductions d'impôts et de cotisations favorables aux entreprises et aux privilégiés avaient creusé les déficits publics.

Puis, les créances pourries des banques provenant de la spéculation effrénée à laquelle elles s'étaient livrées, notamment par le phénomène de la titrisation, ont été neutralisées par les interventions des États. Pour ce faire, ces derniers se sont encore plus endettés et se retrouvent aujourd'hui fragilisés.

Pourquoi les banques se gêneraient-elles, puisqu'il a suffi qu'elles appellent au secours pour qu'elles soient tirées d'affaires sans contrepartie ?

Vous nous demandez de voter ce plan au nom de la responsabilité pour sauver l'euro. Mais, une fois de plus, les coupables ne sont pas les responsables et ne seront pas les payeurs. L'impunité totale est garantie aux spéculateurs.

Après avoir été sauvés par l'argent des contribuables, provoquant ainsi des déficits publics sans précédent, les marchés financiers s'attaquent aux États en spéculant sur l'euro. Et vous vous soumettez à leur diktat jusqu'à proposer un contrôle a priori des budgets nationaux par la BCE et la Commission européenne. Nous refusons la dépossession de la souveraineté populaire par une instance non élue et une banque centrale sans contrôle politique dont le principe fondamental est l'application des recettes les plus éculées de l'ultralibéralisme.

La potion va être amère pour les peuples puisqu'il s'agit, ni plus ni moins, que d'imposer l'austérité partout en Europe, notamment par l'abaissement des salaires des employés du secteur public, la réduction ou le gel des pensions, des coupes drastiques dans les dépenses publiques.

À travers ces plans, c'est ce qu'il reste du modèle social européen et de ses services publics que les gouvernements, dans leur ensemble, veulent liquider.

Comme toujours, depuis que le libéralisme dicte ses politiques au niveau européen, le problème des déficits est toujours vu du côté de la dépense, jamais des recettes.

Pourtant tout y est passé : l'impôt sur les sociétés ramené de 50 % à 33 %, les larges défiscalisations des revenus du capital, les baisses massives et continues des cotisations sociales au nom soit de la baisse du coût du travail, soit de l'attractivité du territoire, jusqu'aux dernières diminutions des taux marginaux de l'impôt sur le revenu, bouclier fiscal inclus, sans parler des niches fiscales et sociales qui exemptent d'impôts les plus riches.

Ce nouveau plan de sauvetage ne répond à aucun des problèmes de fond posés. Il prétend résoudre une crise de la dette en favorisant le recours accru à la dette, et maintient ainsi la dépendance des États vis-à-vis des marchés financiers qui seront les premiers bénéficiaires des nouveaux emprunts européens.

Quant à la question des déséquilibres commerciaux internes à l'Europe, elle reste entière. Ce programme, dit de stabilisation, risque au final d'enfoncer l'Europe dans une période de déflation et de stagnation sans précédent depuis les années 1930.

À chaque nouvelle étape de la crise, nous avons droit à de grandes déclarations lénifiantes sur la nécessaire régulation du capitalisme, sur l'immoralité de la spéculation, sur l'irresponsabilité des banques et des agences de notation, sur la lutte contre les paradis fiscaux. Mais rien de concret car, pour vous, pas question de s'attaquer aux intérêts de cette minorité d'accapareurs planétaires qui s'engraissent sur le dos des peuples.

Pour nous, la seule issue passe par la volonté politique de casser les reins à la spéculation, en instaurant un contrôle sur les marchés de capitaux. Cela commence par l'interdiction de la vente à découvert sur les titres souverains des pays de la zone euro et sur les CDS des mêmes titres, comme vient de le décider l'Allemagne. Mais vous le refusez.

Pour les banques, c'est : « à tous les coups, on gagne ». Il n'est pas acceptable que la seule taxe proposée par le FMI soit destinée à venir à leur secours, en cas de nouvelle crise. Rien n'est envisagé pour les empêcher de recommencer leurs spéculations. Cela suffit ! Nous voulons une taxe sur toutes les transactions financières pour limiter les opérations spéculatives et contribuer au financement de politiques sociales et écologiques à l'échelle de la planète.

Ce plan relève des préceptes libéraux habituels du FMI dont les interventions passées dans d'autres pays ont régulièrement plongé les peuples dans la misère.

Rappelez-vous, il y a dix ans, la réponse du peuple argentin aux politiques imposées par le FMI, sous la houlette de son directeur français de l'époque, Michel Camdessus, aujourd'hui conseiller de Nicolas Sarkozy : « Que se vayan todos ! », c'est-à-dire qu'ils s'en aillent tous !

En Europe aussi, les peuples se mobilisent. Nous refusons donc de cautionner ce plan car, à la solidarité envers les banques, nous préférons la solidarité entre les peuples.

Les député-e-s communistes, républicains, du parti de Gauche et Verts du groupe GDR voteront donc contre ce projet loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

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