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Intervention de Pierre Gosnat

Réunion du 28 mai 2010 à 15h00
Réforme des collectivités territoriales — Article 5, amendement 336

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Gosnat :

Les députés communistes, républicains et du parti de gauche sont défavorables à l'article 5 et à la création du statut des métropoles dans la conception qu'en a la majorité.

La France a une particularité : son réseau de 36 000 communes, qui permet un maillage exceptionnel du territoire. C'est l'héritage de l'histoire de notre pays.

Promoteur inlassable de la mondialisation et du néolibéralisme, le Gouvernement, pour imposer la concurrence entre les territoires et la recherche effrénée de la compétitivité au sens libéral du terme, veut infléchir notre maillage communal dans le sens d'un développement en « taches d'huile ».

C'est l'exemple allemand : d'un côté, de grands centres urbains polarisés à la tête de pôles de compétitivité ; de l'autre, des déserts, des enclaves, des zones reléguées, et une ruralité abandonnée à elle-même. Voilà l'état d'esprit qui préside à la création du statut de métropole. Mais le caractère métropolitain d'une agglomération ne se décrète pas. Ce n'est pas parce que les députés de la majorité confectionnent un label que la France se couvrira, du même coup, de métropoles à l'allemande.

Les discussions sur le nombre d'habitants des futures métropoles soulignent le caractère quelque peu dérisoire de ce label : le Gouvernement avait prévu un seuil de 500 000 habitants, le Sénat réclamait 450 000, l'Association des grandes villes de France voulait 400 000 ; la commission du développement durable de notre assemblée a voté à l'unanimité un amendement portant le seuil à un million.

Nous n'entrerons pas dans ces discussions, car nous refusons que l'aménagement de notre territoire fasse de la France une sorte d'archipel de grands pôles au milieu du désert français, concentrant les investissements, les aides et les emplois, confisquant l'activité économique et se livrant entre eux une concurrence économique acharnée.

Nous retrouvons dans ce projet un peu de celui du Grand Paris : il s'agit d'adapter nos collectivités territoriales au cadre de la concurrence mondialisée et du capitalisme à tout crin qui réduit la qualité de vie et les services rendus aux populations.

La métropole est une attaque contre les communes et contre les départements. Je m'explique.

Contre les communes, d'abord, qui sont l'échelon préféré des Français. Les communes qui désireront former une métropole seront en effet supplantées par un conseil métropolitain omnipotent, qui aspirera toutes leurs compétences. La liste des transferts automatiques des communes à la métropole est impressionnante. À terme, les communes seront donc amenées tout simplement à disparaître, dissoutes dans cette super-intercommunalité. Ainsi, les échelons démocratiques de proximité seront effacés au profit d'une entité bureaucratique et lointaine.

Mais la métropole est aussi une attaque contre le département, l'acteur des solidarités. En effet, les métropoles reprennent bon nombre de ses compétences – transports scolaires, routes départementales, action sociale, collèges – et leur périmètre sera bien souvent quasiment le même que celui du département concerné. Par exemple, dans mon département, deux ou trois métropoles se substitueraient au département. Le département sera donc une coquille vide, concurrencé de l'intérieur par la métropole, qui aura aspiré ses compétences et se sera superposée à son périmètre.

Parent pauvre de la réforme territoriale, le département deviendra un acteur de second plan, privé des subsides de l'État et de la clause de compétence générale. La métropole, territoire de compétitivité et d'accumulation du capital, pourra se financer elle-même grâce aux amendements du rapporteur en commission, qui a prévu son « intégration financière ».

Le département en sera réduit à financer chichement les territoires subalternes, oubliés de la course à la compétitivité, c'est-à-dire les communes pauvres et les zones rurales. Le risque est immense de voir la fin de la solidarité départementale, notamment financière, entre pôles urbains et zones rurales.

Comme le département ne disposera plus d'élus spécifiques, autant dire qu'il est voué à disparaître. Et la création des « pôles métropolitains », que nous aborderons à l'article 7, aura les mêmes effets dans les territoires moins densément peuplés.

Les députés communistes, républicains et du parti de gauche condamnent ces choix qui aboutiront, dans les années à venir, à un aménagement du territoire déséquilibré et injuste, avec la concentration des emplois, des services, des richesses dans quelques grands pôles urbains, faisant exploser les inégalités territoriales.

Plutôt que la mise en concurrence des territoires, nous prônons au contraire le renforcement de la coopération et de la solidarité entre les collectivités, avec la mise sur pied d'une véritable péréquation financière. Or leur statut permettra aux métropoles de prendre aux communes leurs prérogatives fiscales. Cela signifie que les communautés territoriales de plein exercice que sont les communes, reconnues par la Constitution, se verront dessaisies de leur capacité à lever l'impôt, et ce au profit d'un simple EPCI. Est-ce constitutionnel ?

En plus de dépouiller les communes de leurs prérogatives fiscales, la création des métropoles pourra donner lieu au transfert de la DGF des communes membres au niveau de la métropole, par l'introduction d'un simple mécanisme de majorité qualifiée. C'est la disparition pure et simple des communes qui est en vue.

Pour toutes ces raisons, nous sommes opposés à la création des métropoles.

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